La mise en place de l’autorité de régulation du secteur de l’électricité reste un des principaux tests de la volonté du pouvoir d’engager des réformes sérieuses pour en finir avec la corruption endémique qui gangrène un État soumis dans toutes ses institutions à l’opportunisme politique.

Jusqu’à présent, les signes que donne le pouvoir sont tous négatifs, comme le démontre le bras-de-fer politique qui persiste autour des prérogatives et de la composition de l’autorité de régulation du secteur de l’électricité.

Ce dossier est à l’ordre du jour de la réunion que le Conseil des ministres tiendra mercredi au Sérail pour poursuivre l’examen du plan de redressement du secteur électrique, au sujet duquel l’Exécutif avait donné son "accord de principe". Sauf que le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, continue, à travers ses représentants au gouvernement, de bloquer une progression au niveau de ce dossier pour deux raisons principales: son insistance pour la construction d’une centrale électrique supplémentaire à Selaata, dans son fief de Batroun, alors que le Liban n’en a pas besoin, et son opposition à l’établissement d’une autorité de régulation qui rognerait les prérogatives du ministre de l’Énergie.

Car, il faut le savoir, depuis 2011 jusqu’aujourd’hui, les ministres successifs de l’Énergie sont tous proches du CPL. Avant, ils étaient proches du camp du 8 Mars (le Hezbollah et ses alliés) et si Gebran Bassil est à ce point attaché aux prérogatives du ministre, cela ne peut être que pour des considérations clientélistes ou affairistes, au vu de l’état catastrophique du secteur de l’électricité et de l’effroyable déficit d’EDL, qui témoignent d’une mauvaise gestion et de l’absence de vision.

Pour ce qui est de la composition de l’autorité de régulation, elle ne fait pas non plus l’unanimité, notamment entre le chef du CPL et le président de la Chambre, Nabih Berry, sans doute pour des considérations de représentation politique.

Sachant comment les nominations se font au Liban, où le critère de base pour le choix d’un fonctionnaire reste son affiliation politique et sa capacité à obéir au doigt et à l’œil à l’autorité supérieure partisane, on peut facilement supposer, et sans gros risque de se tromper, que la querelle tourne autour d’un partage de parts.

Pour essayer que celle-ci ne prenne une dimension démesurée en Conseil des ministres mercredi, le chef du gouvernement, Najib Mikati, s’est rendu mardi auprès de Nabih Berry, dans le cadre d’une mission de conciliation.

Najib Mikati souhaite que la réunion de demain se déroule dans le calme et veut surtout éviter que les ministres représentant Amal et le Hezbollah ne claquent la porte comme ils l’avaient fait le 14 octobre dernier, pour protester contre le fait que le gouvernement ne prenait pas position dans l’affaire des poursuites judiciaires engagées par le juge d’instruction, Tarek Bitar, contre des députés et anciens ministres proches de leurs camps, dans le cadre de son enquête sur l’explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth.