Dans le cadre de son cycle de séances de dialogue participatif, le Conseil économique er social (CES) a accueilli mercredi Ibrahim Kanaan, président de la commission parlementaire des Finances et du Budget. Il s’est exprimé sur "le projet de budget 2022 et son impact sur la situation économique, sociale et sur la cherté de vie". Les présidents et membres de la CGTL, des organismes économiques, des ordres professionnels et divers syndicats étaient présents.

Le président du Conseil économique et social Charles Arbid a commencé la réunion en mettant l’accent sur le manque d’équilibre et de vision du budget.  "Nous attendons avec impatience le jour où nous aurons un budget équilibré, sinon nous resterons dans un état de déficit permanent", a-t-il dit. Selon lui, il existe deux solutions pour combler le déficit: soit l’emprunt qui n’est plus possible, soit une situation inflationniste. " On ne peut persister que si un échéancier est fixé dans une période précise pour atteindre cet objectif, et cette décision doit être nationale ", a-t-il souligné.

Puis il a ajouté : "Nous avons entendu qu’il y a un panier fiscal composé de soixante-quinze points. Ce chiffre est effrayant. Nous sommes dans la réalité d’une récession inflationniste et non plus d’une stagnation inflationniste, il n’est donc plus possible de supporter des frais supplémentaires".

Charles Arbid craint l’impact de ce budget sur la réalité économique, et "nous parlons ici d’investissements, d’opportunités d’emploi et de chômage. Un autre problème est l’intégration de la politique budgétaire à la politique monétaire, car le système de paiement est fondamental pour la régularité de la situation économique au Liban, et nous devons réfléchir ensemble à une manière d’organiser le mode de paiement"

Un budget sans vision

Prenant, à son tour, la parole, Ibrahim Kanaan a insisté sur le fait que certaines choses doivent être clarifiées, pour ne pas tomber dans l’erreur de la généralisation. " Le budget n’est ni une suite de chiffres, ni le comblement du manque des bénéfices par une hausse des taxes ", a-t-il dit.

Pour lui, "la responsabilité du gouvernement est de produire un budget avec une vision, ce n’est ni au Parlement, ni à la commission des Finances et du Budget, qui n’est ni un ministère des Finances ni un ministère de l’Économie de le faire. Ce n’est pas leur affaire, c’est plutôt la responsabilité du gouvernement, dont le budget doit reposer sur une vision économique claire, et les réformes doivent y faire partie, y compris la réforme du secteur public et le dossier des emplois fictifs. Il nous est apparu clairement qu’il y a plus de 32 000 emplois illégaux. De même, les loyers de l’état s’élèvent à 117 milliards de dollars, sans oublier les loyers fictifs et les prêts d’un milliard de dollars tous les ans à EDL, tous ces frais doivent être bannis".

Ibrahim Kanaan s’est demandé, où est la vision dans ce budget? "Ce n’est bien sûr pas une série d’ajustements fiscaux, 75 exactement, qui ne tiennent pas compte de la chute du PIB de 51 milliards de dollars en 2019 à moins de 20 milliards de dollars. Est-il raisonnable d’imposer de nouvelles taxes à la lumière d’un ralentissement économique allant jusqu’à 90%?" Qui est en mesure de les payer?".

Et le député d’insister: "L’argent des gens est gelé dans les banques, et nous avons maintenant 50 taux de change. Allez-y mollo sur le dollar douanier et le dollar des impôts, car cela conduit à la destruction de l’économie et à l’évaporation des dépôts".

Ibrahim Kanaan qui refuse de faire porter aux Libanais la responsabilité des résultats des politiques monétaires et fiscales ratées qui ont été suivies au fil des ans a conclu en disant: "Ne nous plaignons pas, mais agissons plutôt."

Le président des organismes économiques, l’ancien ministre Mohammad Choucair a estimé que le début de la solution commence par la reconnaissance de la performance du secteur privé, qui est le seul secteur productif du pays, et à travers lequel la situation économique du Liban peut être améliorée.

Il a en outre critiqué la campagne menée contre ce secteur, "notamment avec le vote de la loi supprimant les agences exclusives".

Le député Farid Boustani a souligné "la nécessité de parvenir à la justice sociale en ajustant les salaires, à condition que cela s’accompagne d’un contrôle du taux de change du dollar". Et d’ajouter: "Nous ne pouvons pas "couvrir" le déficit de l’État en imposant des taxes. L’État en difficulté ne peut pas imposer de taxes, il faut relancer la roue économique et contrôler le niveau des importations".

Béchara Asmar, président de la CGTL a enfin estimé que le budget et son lot de taxes et redevances, ainsi que le dollar douanier entraîneront "une augmentation des prix des marchandises et davantage de contrebande".