Après avoir peiné à s’accorder sur un embargo pétrolier contre Moscou, l’UE hésitait mardi à envisager des sanctions visant le gaz russe dont elle est encore plus dépendante, certains dirigeants plaidant plutôt pour une " pause ".

Le sixième paquet de sanctions " est un grand pas en avant. Et je pense que nous devrions faire une pause maintenant ", a déclaré le Premier ministre belge Alexander De Croo à son arrivée pour la seconde journée du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE à Bruxelles.

Les dirigeants des Vingt-Sept ont trouvé un accord lundi soir qui devrait permettre de réduire de quelque 90% leurs importations de pétrole russe d’ici la fin de l’année afin de tarir le financement de la guerre menée par Moscou en Ukraine.

" Ce paquet, mettons-le d’abord en pratique (…) Le gaz, c’est beaucoup plus compliqué. C’est donc une étape importante. Arrêtons-nous là pour le moment et voyons quel est l’impact ", a plaidé M. De Croo.

En matière de sanctions, " le gros morceau sur l’énergie est en place et fonctionne ", a estimé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, affichant désormais d’autres priorités. " Maintenant que nous avons mis en place la structure sur l’élément énergétique, il est important selon moi que nous visions les secteurs économiques et financiers " de la Russie.

L’embargo pétrolier a nécessité un mois de négociation pour régler les difficultés posées à la Hongrie et à la Slovaquie, deux Etats enclavés et dépendants de leurs importations russes.

" Il y a deux mois, personne ne pensait envisageables les sanctions sur le pétrole russe (…) c’est pourquoi ce 6e paquet est historique ", s’est félicité le président français Emmanuel Macron. Concernant des mesures visant le gaz, " il ne faut rien exclure parce que nul ne sait dire comment les choses évolueront ", a-t-il ajouté.

" Nous devrons parler d’un septième paquet de sanctions parce que la situation ne s’améliore pas en Ukraine. Mais le gaz est bien sûr beaucoup plus difficile que le pétrole ", a souligné la Première ministre de l’Estonie Kaja Kallas. " Le gaz doit faire partie du septième paquet, mais je suis également réaliste, je ne pense pas qu’il y sera ", a-t-elle estimé.

Miser sur les renouvelables

" L’embargo sur le gaz ne sera pas dans le prochain train de sanctions ", a renchéri le chancelier autrichien Karl Nehammer.

En 2021, la Russie a fourni 30% du brut et 15% des produits pétroliers achetés par l’UE. Elle fournit annuellement 150 milliards de m3 de gaz, soit 40% des importations de l’UE.

L’UE, qui a déjà décidé de se passer de charbon russe à partir du mois d’août, a trouvé d’autres fournisseurs aux Etats-Unis pour un tiers de ses achats de gaz russe.

Bruxelles a par ailleurs présenté récemment un plan à 210 milliards d’euros qui prévoit une accélération des énergies renouvelables et des économies d’énergie pour s’affranchir " le plus vite possible " du gaz acheté à Moscou.

" Personne ne veut acheter de l’énergie à la Russie. La Russie, un pays barbare, un pays sur lequel on ne peut compter en aucune façon ", a lancé mardi le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki.

" C’est pourquoi nous discutons de la manière de nous éloigner rapidement non seulement des hydrocarbures russes comme le charbon ou le pétrole, mais aussi, à plus long terme, du gaz ", a-t-il expliqué.

Pour l’Europe, il s’agit aussi de se prémunir contre une possible interruption des approvisionnements.

Le géant gazier russe Gazprom a déjà décidé de couper les livraisons à cinq pays: Pologne, Bulgarie, Finlande, Pays-Bas et Danemark, des pays qui ont refusé les conditions de paiement de Gazprom.

La Commission européenne rejette le paiement du gaz en roubles, comme l’exige le Kremlin, estimant qu’il s’agit d’une violation des sanctions. Les compagnies énergétiques sont tenues de respecter les conditions de paiement des contrats conclus avec Gazprom (97% prévoient un règlement en dollars ou en euros), sous le contrôle des Etats membres.

Avec AFP