Testify 4Beirut, un livre réunissant des témoignages de rescapés de la double explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020, a été lancé ce dimanche.

Le 8 août 2020, quatre jours après la double explosion meurtrière survenue au port de Beyrouth, Mickaella Pharaon, étudiante en master d’architecture à New York, a eu l’idée de rassembler des témoignages de personnes qui, comme elle, ont survécu à la tragédie. L’objectif est de leur permettre de s’exprimer afin de faire parvenir leur voix et leurs douleurs au monde entier.

" En ce 4 août, j’ai été atteinte dans ma propre maison à Achrafieh, l’endroit où je suis supposée être le plus en sécurité, confie-t-elle à Ici Beyrouth. Mes parents ont survécu par miracle. Au départ j’étais incapable de parler de mon épreuve. Cependant, échanger avec les gens m’a donné l’idée de recenser les histoires et les émotions de la population et de les regrouper sur une seule plateforme. "

L’idée de Testify4Beirut (littéralement témoigner pour Beyrouth) est ainsi née. Pendant près d’un an, d’août 2020 à août 2021, Mickaella Pharaon, aidée de ses amies Cynthia Sfeir et Yara Saadé, a ainsi recueilli les témoignages de quelque 180 personnes qu’elle a publiés sur une page Instagram baptisée @Testify4Beirut.

Ces textes ont fait l’objet d’un ouvrage paru aux éditions L’Orient-Le Jour, et qui comporte également des illustrations réalisées par 45 artistes utilisant des techniques variées: photos, dessins, collages… " Nous voulons raconter à nos enfants et nos petits-enfants ce que nous avons enduré. La tragédie ne doit pas sombrer dans l’oubli ", confie Mme Pharaon, lors de la cérémonie organisée dimanche à Arthaus Gemmayzé pour le lancement du livre.

" J’ai survécu à l’explosion monstrueuse, raconte à Ici Beyrouth de son côté Aya Abdallah, qui a collaboré à la parution de l’ouvrage. Comme tout le monde j’ai couru pour aider les amis que les secours ne pouvaient atteindre. Lorsque je suis rentrée aux États-Unis, quelques mois plus tard, j’avais du mal à pallier mes émotions. J’ai contribué avec Mickaella à la réalisation de ce livre pour archiver les témoignages, prévenir l’amnésie, permettre une thérapie commune et surtout, parce que les ouvrages d’histoire manquent au Liban. "

Et Mme Pharaon d’enchaîner: " Nos amis à New York ne comprenaient pas ce qui s’était passé. Ils étaient choqués par les témoignages tout à la fois différents et similaires. Les photos partagées les avaient impressionnés, d’autant plus que les seules informations qu’ils détenaient provenaient des reportages diffusés sur les chaînes de télévision. "

Mme Abdallah raconte qu’à chaque fois qu’elle plaçait un texte, elle fondait en larmes. Toutefois, montrer l’ouvrage aux étrangers était pour elle très important surtout que la justice n’a pas encore été rendue aux victimes. " Nous n’avons pas le droit de sous-estimer le pouvoir des archives pour façonner l’histoire et l’identité nationales ", insiste-t-elle.

Et Mme Pharaon de conclure: " Nous souhaitons que nos enfants ne connaissent pas les supplices que nos parents et notre génération ont expérimentés. " D’où son appel à la justice, à la reddition des comptes et à l’indemnisation des victimes.

Dans le livre dont les profits de vente iront à la Croix-Rouge libanaise, on peut lire " Comment décrire l’indescriptible? Comment mettre des mots sur une horreur à laquelle aucun mot ne pourrait rendre justice? Comment expliquer ce qu’on ressent en voyant la ville entière, la ville de ses parents, de ses grands-parents désintégrée? "

 

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