L’ONG Tri-pulley " fabrique " des emplois… grâce à une approche unique. L’idée: associer des chômeurs qualifiés à des familles vulnérables et à de petites et moyennes entreprises, en les sponsorisant le temps qu’ils fassent leurs preuves. Une petite révolution qui porte ses fruits: 64% des bénéficiaires ont déjà trouvé un emploi fixe. 

"Tri-pulley, c’est notre façon de faire la révolution." Lamya Karkour, fondatrice de l’ONG, est déterminée à venir en aide aux plus vulnérables et marginalisés. "Nous combattons le clientélisme en créant des emplois et en offrant un soutien qui redonne de la dignité au bénéficiaire", explique la jeune femme, dynamique et chaleureuse. Au cours de la révolution, elle a sillonné les rues de Tripoli avec ses collègues. "Nous voulions agir. Pour nous, il fallait que ce soit ici, notamment du fait de l’extrême pauvreté qui touche la ville", poursuit-elle.

De leurs conversations avec les habitants et les ONG de la région naît un constat préoccupant: les populations vulnérables bénéficient principalement d’une aide alimentaire. Une solution d’urgence nécessaire, mais qui ne s’attaque pas à la racine du problème. "Cet apport est important, mais ce n’est pas une solution à long terme", analyse Lamya Karkour. Ainsi est né Tri-pulley. Son but: redonner un sentiment d’utilité et une place au sein de la société à des populations en recherche d’emploi, tout en créant un lien social.

Durant sept mois, l’ONG sponsorise le bénéficiaire en payant son salaire. Celui-ci peut exercer dans des secteurs très variés (culturel, environnemental, médical…). Tout dépend de ses compétences et de ses envies. Il bénéficie également d’un programme de coaching personnalisé. "Nous soutenons les membres du programme via différents ateliers, allant de  la rédaction de CV à la recherche d’emploi, en passant par des formations", explique Joumana Antar qui travaille pour l’ONG. "Parallèlement, nous les aidons à mieux intégrer l’association, l’institution, voire la famille avec laquelle ils collaborent", ajoute sa collègue Fadila Wehbe.

"Nous travaillons beaucoup avec les femmes et les jeunes", précise Bourhane, ancien bénéficiaire du programme, aujourd’hui employé à Tri-pulley. "Les femmes, parce que nous sommes convaincus qu’elles peuvent faire un changement dans la société, et les jeunes, car ils sont la force active du pays, mais qui malheureusement, du fait de la crise, pensent à émigrer. Nous accordons aussi une importance aux cas marginalisés qui ont du mal à trouver du travail."

Cette période de sept mois permet également aux bénéficiaires de faire leurs preuves auprès de l’employeur. "Très souvent, ce dernier décide de les embaucher à la fin des sept mois", avance Lamya Karkour. Face à ce succès, l’ONG a étendu ses activités à la capitale, notamment aux personnes touchées par l’explosion du 4 août 2020. Sur les 353 personnes ayant bénéficié du programme, 64% ont été embauchées ou ont trouvé un emploi fixe. Une lueur d’espoir dans un pays ravagé par la crise économique et dont le taux de chômage toucherait 60% de la population active, selon certaines estimations.