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En novembre dernier, le Conseil des ministres a décidé de prolonger et de renégocier le contrat de gestion du secteur postal de LibanPost arrivé à terme en 2019 et renouvelé depuis tacitement. Pourtant, l’armateur français CMA CGM avait remporté, le 13 juillet dernier, l’appel d’offres lancé par le ministère des Télécoms, via le groupe Merit-Colis Privé. Explications.

Le secteur postal continuera, jusqu’à nouvel ordre, d’être géré par LibanPost après une renégociation des termes du contrat. Alors que l’armateur français CMA CGM avait remporté, le 13 juillet dernier, l’appel d’offres pour la gestion du secteur postal via le groupe Merit-Colis Privé, une renégociation du contrat avec LibanPost avait été demandée en Conseil des ministres. L’attribution et le lancement d’un nouvel appel d’offres ont donc été reportés.

Le dossier de l’adjudication de la gestion du secteur postal au Liban montre une fois de plus l’inefficacité de l’État libanais et son incapacité à gérer les affaires publiques. Toujours est-il que ce nouvel appel d’offres aurait permis à l’État de percevoir 6 millions de dollars par an, alors qu’actuellement, il n’en récolte que 40.000. De plus, CMA CGM avait prévu un investissement de 12,8 millions de dollars pour revitaliser le secteur. Des pertes colossales pour le Trésor public. Rappelons que l’adjudication à CMA CGM avait été rejetée par la cour des comptes. Les raisons du rejet des résultats de l’appel d’offres sembleraient motivées par des considérations politiques. Selon ceratines sources, un proche du président de la Chambre, Nabih Berry, chercherait à prendre en charge la gestion du secteur postal. En attendant, ce sont les groupes Saradar et M1, appartenant à la famille du Premier ministre sortant, Najib Mikati, qui détiennent, via LibanPost, le secteur.

Un contrat renégocié à 2,7 millions de dollars

Des sources au ministère des Télécoms ont indiqué à Ici Beyrouth que le contrat renégocié avec LibanPost permettra à l’État de percevoir environ 2,7 millions de dollars par an. Ainsi, selon les termes du contrat précédent, LibanPost versait 5% des recettes des services postaux à l’État, alors que la société versera désormais 12% sur tous les services. De même, un escompte de 15% a été accordé pour les services postaux publics et les tarifs ont été réévalués, puisqu’ils sont actuellement basés sur un taux de change de 1.500 livres pour un dollar.

Par ailleurs, le montant de la location du bâtiment de LibanPost versé à l’Etat passera de 600.000 dollars par an à environ 1.400.000 dollars.   

Néanmoins, ce nouveau contrat doit être avalisé par le Conseil d’État avant d’être approuvé en Conseil des ministres. 

Concernant le nouvel appel d’offres, le quatrième, les sources précitées assurent qu’il faut mener (encore!) une étude de faisabilité et d’établir un nouveau cahier des charges, soulignant que des fonds sont nécessaires pour réaliser ces étapes. Elles rappellent qu’une étude de faisabilité menée en 1997 par Deutsche Post avait coûté 4 millions de dollars. Les montants de cet appel d’offres n’ayant pas été inclus dans le budget 2024 et l’État n’accordant pas d’avance du trésor, le ministère a tenté de contourner le problème en se tournant vers le secteur privé. En d’autres termes, les Télécoms ont demandé à des sociétés du secteur privé de réaliser gratuitement l’étude de faisabilité exigée par la cour des comptes, à condition que celles-ci ne soumissionnent pas à l’appel d’offres.      

Il convient de rappeler que CMA CGM avait remporté en juillet dernier, soit il y a presque un an, via le groupe constitué par la société Merit-Colis Privé France, l’appel d’offres lancé par le ministère des Télécoms. Il devait ainsi succéder à LibanPost qui gère les services postaux au Liban depuis 1998 et prendre en charge la gestion du service postal au Liban. Or, la cour des comptes a rejeté l’attribution du contrat de gestion de la poste au Liban à la société française, même après la demande de révision du ministre sortant des Télécoms, Johnny Corm. La Cour a invoqué des infractions liées aux principes de transparence, d’objectivité, de concurrence et de recherche du meilleur prix. Elle a en outre déploré une offre "taillée sur mesure et peu transparente, ce qui contrevient aux critères et aux principes définis pour soumissionner les recettes publiques". Elle a par ailleurs mis en avant le manque d’expérience du soumissionnaire.

Merit-Colis Privé France avait également remporté l’appel d’offres lancé par le ministère des Télécoms le 30 mars 2023. Toutefois, en raison de vices de forme dans le cahier des charges, l’adjudication avait été annulée.

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