Deux manifestants ont été tués au Soudan lundi lors de nouveaux rassemblements contre le putsch et le pouvoir militaire, une mobilisation populaire qui ne faiblit pas depuis le coup d’Etat du 25 octobre en dépit d’une répression meurtrière et de nouvelles rafles.

Les manifestants réclament un pouvoir civil dans un pays quasiment toujours sous la férule de l’armée depuis son indépendance il y a 66 ans.

Ils dénoncent également la répression qui a tué 75 manifestants depuis le coup d’Etat du chef de l’armée, Abdel Fattah al-Burhane.

De l’autre côté, un haut-gradé a été poignardé à mort le 13 janvier par des manifestants à Khartoum, selon la police.

Lundi à Khartoum, les manifestants ont tenté de nouveau, sous les tirs de grenades lacrymogènes des forces de sécurité, de converger vers le palais présidentiel où siège le général Burhane, le dirigeant de facto du pays.

Plusieurs manifestants ont été aperçues respirant difficilement à cause des gaz lacrymogènes utilisés par les forces de sécurité pour les disperser. D’autres saignaient après avoir été touchés par des grenades lacrymogènes, selon le correspondant de l’AFP.

Le Comité central des médecins, proche de la contestation, a souligné un " usage excessif de la violence " de la part des forces de sécurité contre les manifestants à Khartoum et dans sa banlieue de Omdourman.

Dans la capitale, un manifestant a été tué d’une " balle réelle dans la poitrine " et un autre d' "une balle dans la tête " selon ces médecins.

A Khartoum et Omdourman, les manifestants ont scandé " le peuple a choisi les civils " et " le pouvoir au peuple! ", de même qu’à Wad Madani, à 200 kilomètres plus au sud, à Gedaref et Port-Soudan dans l’est côtier du pays.

Avec son coup de force, le général Burhane a mis un coup d’arrêt à la transition vers un pouvoir entièrement civil promise il y a plus de deux ans après la chute du dictateur Omar el-Béchir, démis par l’armée sous la pression de la rue.

Il faut " effacer toutes les traces du coup d’Etat ", revenir à un gouvernement civil et " écarter le chef des putschistes et son pouvoir immédiatement ", a une nouvelle fois redit le parti Oumma, le plus ancien du pays, dont plusieurs responsables ont été arrêtés lors du putsch, dans un communiqué.

Comme à chaque fois à la veille des manifestations, les forces de sécurité ont procédé à des rafles nocturnes, arrêtant des membres des Comités de résistance dans différents quartiers de Khartoum, ont indiqué ces organisations locales, véritable colonne vertébrale de la mobilisation.

Avant eux, Amira Osmane, militante des droits des femmes la plus connue du pays, a elle aussi été enlevée à son domicile, a indiqué à l’AFP la secrétaire générale de son association " Non à l’oppression des femmes ", Tahani Abbas.

Samedi soir, " vers minuit et demi, trente hommes armés de fusils et de fouets et cagoulés sont entrés chez elle ", a-t-elle raconté.

" Ils ont refusé de dire pour le compte de qui ils agissaient et ils l’ont emmenée vers une destination inconnue " où elle est toujours détenue, poursuit la militante.

Mme Osmane, qui avait fondé son organisation sous la dictature militaro-islamiste de Omar el-Béchir, souffre de graves problèmes de dos, ajoute-t-elle, disant s’inquiéter pour sa santé.

L’émissaire de l’ONU au Soudan, Volker Perthes, a condamné cet enlèvement, estimant que " la violence contre les militantes des droits des femmes menace de réduire leur participation à la vie politique " dans un pays, où déjà, selon l’ONU, 13 manifestantes ont été violées par des forces de sécurité décidées à en finir avec l’opposition.

Alors que la liste des exactions ne cesse de s’allonger, Khartoum a récemment reporté la visite de l’envoyé spécial de l’ONU pour les droits humains.

La communauté internationale, elle, continue à réclamer un dialogue pour sortir de la crise.

Des responsables de l’ONU rencontrent depuis plusieurs jours politiciens, militants et représentants corporatifs sans pour autant avoir pu les amener jusqu’ici à discuter ensemble.

Le général Burhane, lui, a récemment annoncé un gouvernement " chargé des affaires courantes ".

Il y a nommé des hauts fonctionnaires en remplacement des ministres civils, pour beaucoup arrêtés au moment du putsch. Et, surtout, il a maintenu les ministres issus des anciens groupes rebelles armés, seul groupe épargné par les purges.

AFP

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