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Qui reste au Liban? Principalement les personnes âgées. Qui émigre? Les jeunes, mais également les familles. La démographie de la population libanaise est en pleine mutation, essentiellement en raison de l’impasse économique dans laquelle le pays se trouve.

L’émigration n’est pas un nouveau phénomène pour les sociétés, lesquelles connaissent généralement des cycles migratoires limités dans le temps et l’espace. Toutefois, au Liban, ce phénomène s’est transformé en un rêve pour la majorité des familles, en particulier pour les jeunes les plus instruits.

Selon les chiffres de Mohamad Chamseddine, économiste au sein du bureau d’études et de recherches Information International, environ 468.000 Libanais, soit près d’un demi-million, principalement des jeunes, auraient émigré entre 2016 et 2024.

M. Chamseddine tire la sonnette d’alarme, soulignant que le pays du Cèdre non seulement se vide de ses habitants, mais que sa population vieillit.

De 2016 à 2019, la croissance moyenne de la population était de 63.500 personnes par an. Cependant, de 2020 à 2023, cette moyenne a chuté à 38.200, accusant une diminution d’approximativement 40%.

Actuellement, 30% de la population libanaise est âgée de 50 ans et plus. Si cette tendance se poursuit lors des sept prochaines années, la proportion de seniors pourrait atteindre 40 à 43%, et même 60% dans les deux prochaines décennies.

Parmi les facteurs ayant contribué à la baisse des naissances figurent, en plus de l’émigration, la crise économique, l’absence de prêts immobiliers, une réduction de 13,3% des contrats de mariage, ainsi qu’une augmentation de 7,7% des divorces.

Metn et Kesrouan   

En réponse à une question d’Ici Beyrouth, Mohamad Chamseddine cite l’exemple des cazas du Metn et du Kesrouan, où la population d’origine chrétienne a enregistré, en 2023, une croissance démographique minime, respectivement de 0,04% et 0,05%. "À l’échelle nationale, le pays survit grâce aux fonds de la diaspora, mais il perd en capital humain, car sa population vieillit", ajoute-t-il.

Il souligne également que le coût de la vie au Liban a considérablement augmenté, précisant qu’une famille de trois personnes a besoin de 580 dollars pour couvrir ses besoins essentiels, une somme dont toutes les familles ne disposent pas.

Le désir de partir

Par ailleurs, une enquête réalisée entre février et avril 2024 par Arab Barometer, un observatoire panarabe, auprès d’un échantillon de 2.400 Libanais a révélé que 38% d’entre eux souhaitent quitter le pays. Cette proportion représente une augmentation de 12 points de pourcentage par rapport aux 26% enregistrés en 2018.

Les chiffres révèlent que les jeunes et les diplômés universitaires sont particulièrement enclins à émigrer.

En effet, 58% des personnes âgées de 18 à 29 ans ont exprimé ce désir, soit le double des individus de 30 ans et plus, selon l’étude. En outre, ceux ayant un niveau d’éducation supérieur sont plus susceptibles de vouloir émigrer que ceux ayant un niveau d’éducation inférieur (46% contre 33%).

Crise économique

L’enquête révèle que les conditions économiques restent le principal facteur de l’émigration. Aucun Libanais ne considère la situation économique comme positive ni ne s’attend à une amélioration. Ainsi, il n’est pas surprenant que près de 7 personnes sur 10 (72 %) souhaitent quitter le Liban.

Les questions de sécurité et de politique jouent également un rôle significatif parmi les raisons invoquées pour émigrer. Les préoccupations sécuritaires, aggravées par la guerre en cours dans le Sud et s’étendant au nord et à l’ouest de la Bekaa, sont désormais la seconde raison la plus fréquemment citée par les Libanais, avec 27% de migrants potentiels en 2024, soit une augmentation de 14 points par rapport aux 13% enregistrés en 2022.

Les inquiétudes concernant la corruption sont aussi devenues un facteur majeur d’émigration, 24% des Libanais affirmant que celle-ci constitue une raison principale pour qu’ils émigrent, contre 16% en 2022. De même, la proportion de Libanais mentionnant les problèmes politiques comme motif d’émigration est passée de 16% en 2022 à 23% en 2024.

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