Ils s’étaient donnés 48 heures, mais le Hamas et Israël n’avaient pas encore répondu jeudi au projet de trêve soumis dimanche par les médiateurs: sous forte pression, aucun des deux camps ne semble vouloir quitter le premier la table des négociations.

Le plan présenté au Caire par les médiateurs américain, égyptien et qatari prévoit dans un premier temps une trêve de six semaines, un échange d’otages israéliens et de centaines de prisonniers palestiniens, l’augmentation de l’aide humanitaire et le retour des habitants du nord de la bande de Gaza déplacés par la guerre, selon une source au sein du Hamas.

À terme, tous les otages seraient libérés, ainsi qu’un nombre indéterminé de détenus palestiniens. L’armée quitterait totalement Gaza et lèverait le siège du territoire.

Depuis dimanche, les annonces officieuses, souvent contradictoires, se succèdent. Pour Hasni Abidi, du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève, "les négociateurs sont dans l’impasse". Pour autant, personne n’a encore jeté l’éponge.

"Le Hamas étudie l’offre", a répété mercredi un porte-parole du Hamas tandis qu’un porte-parole du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a accusé le Hamas jeudi de "tourner le dos" à "une offre très raisonnable".

Au cœur des demandes du mouvement islamiste palestinien, un cessez-le-feu permanent. Inacceptable à ce stade pour M. Netanyahou, déterminé à "éliminer" les derniers bataillons du Hamas, regroupés selon lui à Rafah.

Le chef du Hamas, Ismaël Haniyeh, a assuré que la mort de trois de ses fils dans une frappe mercredi à Gaza ne changeait rien aux exigences du mouvement.

Si la confiance entre les deux camps est nulle, ils sont condamnés à un résultat, estiment des analystes. Le monde les regarde, leurs populations sont à bout.

Trêve tactique

Avec plus de 260 soldats tués, des centaines d’autres blessés et des effectifs épuisés qu’il faut sans cesse relever, les forces armées israéliennes auraient au moins intérêt à une trêve tactique, selon les analystes.

Le retrait annoncé dimanche de toutes leurs troupes, à l’exception d’une brigade stationnée dans le centre de Gaza suggère qu’Israël fait souffler ses soldats avant l’offensive annoncée sur Rafah, note Daniel Byman de la Georgetown University School of Foreign Service.

De plus en plus isolé diplomatiquement en raison du nombre élevé de victimes civiles à Gaza et de l’entonnoir humanitaire, cause de graves pénuries, Israël doit aussi marquer des points à l’étranger.

Surtout, le gouvernement Netanyahou est confronté à la colère des familles qui réclament le retour des 129 otages encore retenus à Gaza.

Une affaire personnelle

D’un autre côté, un accord de trêve pourrait "briser" la coalition gouvernementale israélienne à cause de l’opposition de l’extrême droite à toute concession au Hamas. Un vrai dilemme "pour quelqu’un comme Netanyahou qui n’est pas connu pour placer les intérêts de son pays avant son ambition politique", note Daniel Byman.

Enfin, le dirigeant israélien a fait de cette campagne militaire "une affaire personnelle". "Je ne vois pas comment Netanyahou pourrait crier victoire si aucun responsable du dernier carré du Hamas n’est capturé ou tué", commente Hasni Abidi.

À commencer par Yahya Sinouar, chef du Hamas à Gaza considéré comme le cerveau de l’attaque du 7 octobre.

Pour le Hamas, une trêve sonnerait au contraire comme une victoire symbolique. Elle lui permettrait aussi "de se réorganiser et de mener des embuscades contre l’armée", selon Omer Dostri, expert au Jerusalem Institute for Strategy and Security (JISS).

"Le but du Hamas est de reprendre sa respiration en espérant que les pressions internationales finiront par entraîner la fin de la guerre", estime-t-il.

Gaël Branchereau, avec AFP