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La rencontre ministérielle consultative qui s’est tenue mardi matin au siège patriarcal maronite d’été, à Dimane (caza de Becharré), sous l’égide du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, a duré moins de deux heures. Au terme des débats, les ministres réunis ont publié un communiqué en cinq points, appelant notamment à l’élection d’un président de la République dans les plus brefs délais, à la préservation de l’accord de Taëf et des principes du vivre-ensemble, ainsi qu’à l’unification de la position libanaise concernant le dossier des réfugiés syriens au Liban. Ils ont, à cet égard, insisté sur la nécessité de "coordonner avec les autorités syriennes et la communauté internationale pour résoudre ce dossier de manière à préserver l’unité du Liban et son identité".

Les ministres ont par ailleurs invité "toutes les instances pédagogiques, médiatiques, privées et officielles, ainsi que les forces vives de la société civile à rester attachées à l’identité nationale et à la morale publique". Un appel au dialogue entre les Libanais a été lancé, de manière à "permettre aux citoyens de rassurer l’autre".

Quinze ministres ont pris part à cette rencontre, à laquelle avait appelé le Premier ministre sortant Najib Mikati. En dépit du fait que le Courant patriotique libre avait déclaré son opposition à une telle réunion, "en l’absence d’un chef de l’État", le ministre sortant de l’Industrie, Georges Bouchikian, proche de la formation aouniste, y a pris part. De leur côté, les ministres du Hezbollah ont pris part à cette rencontre, malgré les critiques soutenues du patriarche Raï qui les accuse de miner l’État et de bloquer la présidentielle.

Outre MM. Mikati et Bouchikian étaient présents à Dimane, les ministres sortants de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, de la Santé, Firas Abiad, de l’Éducation Abbas Halabi, de la Jeunesse et des Sports, Georges Kallas, des Finances, Youssef el-Khalil, de la Culture, Mohammad Mortada, de l’Agriculture, Abbas el-Hajj Hassan, des Télécommunications, Johnny Corm, de l’Information, Ziad Makari, des Travaux publics, Ali Hamiyé, de l’Economie, Amine Salam et du Travail, Moustapha Bayram.

Hommage au patriarche

Dans leur communiqué, les ministres ont rendu un vibrant hommage à "la valeur symbolique du patriarcat maronite dans sa double dimension nationale et spirituelle", mettant l’accent sur "le rôle fondamental de cette instance dans la proclamation du Grand-Liban". Ils ont également rendu hommage, au "rôle du patriarche dans l’unification de la famille libanaise".

Évoquant les différentes crises auxquelles est confronté le Liban, les ministres ont souligné qu’à celles-ci "vient s’ajouter une autre crise existentielle liée à l’essence de l’existence même du Liban et de son rôle civilisationnel sur le plan humain". "Cette petite patrie bénéficie d’une grâce immense, celle d’être le lieu de rencontre de tous ceux qui prônent la liberté, la sécurité et une vie digne, lit-on dans le texte. La formule libanaise consacre ces valeurs dans le cadre du vivre-ensemble qui préserve la diversité au sein de l’unité et impose le respect de l’autre dans sa différence, ainsi que la complémentarité avec cet autre pour édifier une société solidaire."

"Les Libanais sont appelés à préserver cette formule pour consolider notre attachement à notre identité nationale commune, de manière à œuvrer à préserver l’unité par le biais de la diversité", ont poursuivi les ministres.

Ils ont en outre dénoncé "les discours qui, sous couvert de modernité, de liberté et de droits de l’homme, sont en contradiction avec les valeurs religieuses et morales qui sont au cœur de notre essence spirituelle et sociale".

Rencontre "spontanée"

Prenant la parole au début de la rencontre, le patriarche Raï a déploré le fait que "certaines parties aient accordé à cette réunion une dimension plus grande que sa dimension réelle". Il a affirmé à cet égard que cette rencontre est "spontanée" et vise à "aborder les différentes questions nationales urgentes".

"Lorsque l’émissaire français Jean-Yves Le Drian m’a rendu visite pour la première fois, a-t-il poursuivi, je lui ai dit que tout ce qu’il entend ne reflète pas la réalité. Le Liban est une République démocratique parlementaire et il y a deux candidats à la présidence. Que les députés remplissent leur devoir et votent pour l’un d’eux et à la lumière des résultats, un dialogue sera engagé pour parvenir à une entente sur un troisième candidat."

Et Mgr Raï de poursuivre: "Malheureusement, le pays va à la dérive, le gouvernement est à l’agonie, et les polémiques autour de l’action et des prérogatives du gouvernement sont le résultat de cette situation."

Même son de cloche du côté de M. Mikati, qui a, lui aussi, affirmé que l’idée de cette rencontre était "spontanée". "Nous nous sommes alors mis d’accord pour organiser cette réunion, afin de discuter des sujets qui réunissent les Libanais, à commencer par le respect de la formule libanaise et la diversité dans le cadre de l’unité libanaise, que nous considérons être l’une des richesses du Liban. Les Libanais sont unanimes à souligner la nécessité de s’attacher aux valeurs libanaises, spirituelles, éthiques et familiales."

"Nous sommes prêts à être un trait d’union entre les Libanais et à engager un dialogue sur toutes les questions qui rassemblent les Libanais, a encore ajouté M. Mikati. Si nous n’arrivons pas à avancer, même dans le cadre de la rencontre et du dialogue, le pays ne se relèvera pas."