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Deux scénarios sont possibles dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1701 au Liban-Sud, notamment à la lumière de la guerre à Gaza et des affrontements frontaliers. Le premier concerne Israël, qui souhaite sécuriser le nord, face au refus des habitants des régions frontalières avec le Liban-Sud de retourner chez eux. Le second concerne l’Iran qui, par l’intermédiaire du Hezbollah, son bras armé libanais, cherche à empêcher la mise en œuvre de la résolution, afin de maintenir la région en conflit. Il suppose qu’Israël ne déclenchera pas de vaste confrontation avec le Liban tant qu’il sera affaibli par la guerre de Gaza et, qu’il est, de ce fait, incapable d’ouvrir deux fronts simultanément.

Lequel de ces scénarios finira par se concrétiser?

Lorsque la médiation française a été lancée, sous l’égide des Cinq de Paris, demandant au Liban d’appliquer la résolution 1701 dans son intégralité et d’établir une zone tampon dépourvue d’armes et de milices illégales, avec la seule présence de l’armée, des forces de sécurité et de la Finul, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a déclaré: "Si le règlement international du conflit au Liban est impossible, nous prendrons les mesures militaires qui s’imposent pour éloigner le Hezbollah de nos frontières."

Selon les cercles occidentaux, les objectifs israéliens se polarisent sur la généralisation du plan de création de zones tampons à Gaza et au Liban pour garantir la sécurité des colonies, en vue du retour des Israéliens dans ces zones. Mais la question cruciale concerne la position du Hezbollah et de l’Iran face aux exigences israéliennes en la matière.

Les responsables du Hezbollah informent ceux qui s’enquièrent de l’application de la résolution 1701 qu’elle relève de la responsabilité de l’État et que c’est à lui de la mettre en œuvre, et non au Hezb. Ils soutiennent que si Israël aspire à la tranquillité, il devra cesser de violer la résolution 1701 par voies terrestre, maritime et aérienne, car c’est bien lui qui l’enfreint, avec plus de 30.000 violations enregistrées depuis l’adoption de cette résolution.

Selon des cercles politiques proches du Hezbollah, "la présence du Hezb au sud est légitime, conformément aux décisions ministérielles, étant donné qu’il résiste à l’occupation. Sa légitimité découle du soutien des Libanais, de l’accord de Taëf et du droit du Liban à résister à l’occupation."

D’autre part, et selon certains milieux souverainistes, le Hezbollah aurait perdu le consensus des Libanais, compte tenu notamment de sa participation aux guerres régionales. Il est devenu un sujet de controverse majeur entre les Libanais après le retrait israélien du sud, particulièrement en raison de l’engagement de la "résistance" sur les scènes arabes, et ce, conformément à l’agenda iranien. Ils ajoutent que les allégations concernant la libération des fermes de Chebaa sont inappropriées, en raison du différend non résolu entre le Liban et la Syrie à leur sujet.

Il n’en demeure pas moins qu’Israël n’aborde pas ce dossier sous cet angle. Un diplomate occidental rapporte les propos suivants des responsables israéliens: "Nous ne sommes pas concernés par les querelles internes libanaises concernant le Hezbollah. Ce qui nous importe, c’est l’application de la résolution 1701 dans son intégralité, c’est-à-dire que la région au sud du Litani soit dépourvue d’armes et de milices."

De son côté, le Liban demande de façon officielle à Israël de respecter les mêmes règles, à savoir aucune arme ni milice près des frontières libanaises jusqu’à 40 kilomètres, notamment après qu’Israël a autorisé les colons à porter des armes sous prétexte de légitime défense.

Cependant, des milieux de l’opposition estiment qu’établir une zone démilitarisée au sud du Litani complique la situation pour le gouvernement qui est incapable de mener à bien cette mission.

Ainsi, les médiateurs demandent à Israël d’initier un cessez-le-feu, de s’y conformer et de s’abstenir de le violer. Cela aiderait indubitablement à l’application intégrale de la 1701, après quoi l’armée libanaise, avec l’assistance de la Finul, assumerait la responsabilité de la sécurité au sud.

Au-delà de la situation interne au Liban, l’Iran, ne souhaitant pas élargir les combats et ouvrir le front sud, se sent toutefois visé par l’application de la résolution 1701, dans le sens où cela représentera un moyen pour mettre fin à l’unification des champs de bataille et libèrera le Liban de l’influence iranienne.

Un retour au calme dans le sud ouvrirait la voie au retour de l’émissaire américain Amos Hochstein, principal conseiller du président Joe Biden, pour discuter des points litigieux à la frontière dont il a informé le président du Parlement, Nabih Berry.

En conséquence, il est fort probable que l’Iran, qui considère le Liban, la Syrie, l’Irak, le Yémen et la Palestine comme ses propres territoires, agisse selon son agenda à travers ses bras militaires, entravant la mise en œuvre de la résolution 1701 en intensifiant les combats sans tenir compte des menaces israéliennes.

Par ailleurs, selon certaines informations, Israël ne peut ouvrir un front au sud, surtout que les États-Unis lui ont donné jusqu’à la fin du mois de décembre pour mettre fin aux opérations militaires à Gaza, provoquant une "tension" dans les relations entre les deux pays – une première dans leur histoire.

Dans ce contexte, l’Iran cherche à tirer profit de cette situation et de la demande d’Israël au Liban d’appliquer la résolution dans son intégralité et d’établir une zone tampon, pour se rapprocher des États-Unis après une interruption des échanges qui dure depuis un certain temps déjà.

Selon des sources occidentales, l’Iran a réussi, après la guerre de Gaza, à renouer un dialogue avec les Arabes, notamment en participant au sommet arabo-islamique à Riyad. Il s’est assis à la même table que les Arabes en tant que puissance régionale, prenant part aux décisions, un objectif qu’il cherchait à réaliser. Cependant, l’Iran réussira-t-il à consolider ces acquis?

Malgré le véto américain concernant le projet de cessez-le-feu à Gaza, des sources diplomatiques affirment que la région entamera des négociations dès le début de la nouvelle année en vue d’un règlement, incluant les négociateurs palestiniens et israéliens après la reconnaissance de l’établissement d’un État palestinien indépendant ayant Jérusalem pour capitale.