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La faculté de réviser les lois appartient exclusivement au président de la République et ne peut en aucun cas être déléguée au Conseil des ministres, d’autant plus que le président de la République est le garant de la Constitution.

La question de l’approbation par le gouvernement d’expédition des affaires courantes des dossiers relevant exclusivement des prérogatives du président de la République demeure un sujet de débat ouvert.

Ce gouvernement, dont la Constitution restreint les fonctions à l’expédition stricto sensu des affaires courantes en cas de vacance présidentielle, justifie ses décisions en se référant à l’article constitutionnel qui confère temporairement les pouvoirs présidentiels au gouvernement réuni en cas de vacance à la tête de l’État.

Cette situation a suscité des critiques, émanant particulièrement des forces chrétiennes, qui reprochent au gouvernement de s’arroger des prérogatives exclusives du président de la République, notamment celles considérées comme relevant spécifiquement de sa compétence.

Cela a conduit plusieurs députés à exprimer leur mécontentement, estimant que le renvoi de lois par le gouvernement au Parlement en vue d’un réexamen ne relève pas de la responsabilité du Premier ministre ni de celle du Conseil des ministres. Ils soutiennent que cette prérogative incombe au président de la République, conformément aux dispositions de la Constitution et au serment qu’il a prêté pour veiller au respect de celle-ci.

Lors de sa dernière séance, le gouvernement a renvoyé au Parlement trois lois portant sur les loyers, les revendications du corps éducatif et des écoles privées, ainsi que l’assistance financière à la Caisse des indemnités.

Cette saisine du Parlement n’est pas passée inaperçue auprès des forces qui s’opposent aux tentatives du gouvernement d’interférer dans les prérogatives du président de la République. De plus, le patriarche maronite, Béchara Raï, a refusé de minimiser le rôle du président de la République, réaffirmant ainsi une position qu’il a déjà exprimée à plusieurs reprises sur cette question. Il a ainsi appelé au respect du pacte national et de la Constitution.

Dans ce contexte, des sources de l’opposition indiquent à Houna Loubnan que l’empiètement sur les pouvoirs de la présidence de la République est devenu monnaie courante. Selon elles, toute analyse soumise lors des réunions gouvernementales en faveur de la légalité de ces actions, notamment en ce qui concerne la délégation des pouvoirs du président de la République pendant une période de vacance, est dépourvue de logique.

Ces mêmes sources soutiennent que d’aucuns tentent de s’approprier les prérogatives du président de la République, et estiment que le gouvernement doit mettre fin à ces agissements au nom des "devoirs", mettant en avant que l’élection d’un président de la République constitue la solution à cette problématique. De plus, elles soulignent qu’il n’est pas envisageable de poursuivre dans la même voie sous prétexte de la vacance actuelle.

Simultanément, elles expriment leur inquiétude quant à une éventuelle stratégie visant à prolonger la vacance en vue de modifier le régime. Elles estiment que recourir aux procédures légales appropriées devant les instances compétentes constitue le moyen le plus efficace pour contrer toute décision anticonstitutionnelle.

Selon la procédure bien établie, une fois que le gouvernement a transmis les lois, la responsabilité incombe de ce fait au Parlement. Cependant, que stipule la Constitution concernant l’action du gouvernement à ce niveau?

L’avocat Saïd Malek, expert constitutionnel, a souligné dans un entretien accordé à Houna Loubnan qu’il est "incontestable que le gouvernement actuel expédie les affaires courantes au sens strict du terme, tout en opérant dans le cadre d’une vacance présidentielle qui dure depuis plus d’un an. Il est aussi indéniable qu’il est confronté à de nombreux dossiers nécessitant des décisions cruciales, surtout en l’absence d’un président de la République. Cependant, on attend du Premier ministre en exercice qu’il administre les affaires tout en tempérant ses actions, afin de ne pas empiéter sur les prérogatives du président de la République".

"Certains pouvoirs sont délégués au Conseil des ministres en vertu de l’article 62 de la Constitution, tandis que d’autres, notamment ceux énoncés dans l’article 53, entre autres, de la Constitution libanaise, demeurent intrinsèques et ne peuvent en aucun cas être transférés au Conseil des ministres. En ce qui concerne le pouvoir de révision des lois, il reste l’apanage du président de la République, d’autant plus que celui-ci est le garant de la Constitution, conformément à son serment énoncé à l’article 50 de la Constitution", a-t-il ajouté.

"Aujourd’hui, le Premier ministre sortant, Najib Mikati, agit-il de la sorte délibérément?", s’est interrogé Me Malek.

"Nous espérons que ce n’est pas le cas, car chaque position et autorité jouit de ses propres prérogatives, et aucune autorité n’est censée empiéter sur les pouvoirs d’une autre. Que serait-ce alors lorsqu’il s’agit de la position du président de la République, considérée comme la plus haute autorité et le symbole de l’unité du pays? La solution adéquate serait de procéder de toute urgence à l’élection d’un président, car il est impossible de laisser les choses en l’état. Les événements évolueront vers le pire en matière de compétences et de confiscation des rôles, ce qui ne profitera ni à l’État, ni au pays, ni à la population libanaise.

À mesure que la vacance présidentielle persiste, le pays et ses institutions plongent davantage dans une période d’incertitude et de tiraillements concernant la question des prérogatives. D’où la nécessité d’élire un président de la République sans délai ni blocage", a-t-il conclu.

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