Le président russe Vladimir Poutine a déclaré mardi que l’arsenal russe manquait " malheureusement " de matériel, pendant que le pays est embourbé depuis des mois dans la guerre en Ukraine. Du matériel que, d’aucuns le savent, le chef du Kremlin est allé chercher en Iran, alors que Moscou caracolait depuis des décennies en tête des exportateurs mondiaux d’armes. 

L’offensive militaire en Ukraine a mis en lumière un manque de munitions de haute précision et de drones dans l’arsenal de la Russie, a déclaré mardi le président Vladimir Poutine. " Il est clairement apparu que plusieurs choses manquaient: des munitions de haute précision, des équipements de communication, des drones ", a énuméré M. Poutine lors d’une réunion avec des correspondants de guerre russes. " Nous en avons, mais pas en quantité suffisante, malheureusement ", a-t-il ajouté.

Un immeuble d’habitation et un parc de jeu ont été touchés par les missiles russes durant la nuit de lundi à mardi à Kryvyï Rig. (AFP)

Poutine a par ailleurs concédé que la Russie aurait pu être " mieux préparée " aux attaques de drones et d’artillerie sur son territoire à partir de l’Ukraine, qui se sont multipliées ces dernières semaines.

" Bien sûr, il est nécessaire de renforcer la frontière (…) Il était possible d’être mieux préparé à cela ", a déclaré M. Poutine au cours d’une réunion avec des correspondants de guerre russes. La région russe de Belgorod, frontalière de l’Ukraine, a été visée ces dernières semaines par plusieurs frappes d’artillerie et de drones, ainsi que par une incursion d’hommes armés.

Le président russe a également affirmé, pour la deuxième fois depuis vendredi, que ses forces écrasaient la contre-offensive que l’Ukraine prépare depuis des mois.

" Les pertes (ukrainiennes) s’approchent d’un niveau qu’on peut qualifier de catastrophique ", a assuré Poutine, affirmant que les pertes russes étaient " dix fois moindres ".

Selon lui, Kiev a perdu " environ 25% ou peut-être 30% de l’équipement " fourni par les Occidentaux, avançant le chiffre de 160 chars et plus de 360 blindés. Côté russe, il a admis la perte de 54 chars, dont certains sont réparables.

Moscou a revendiqué pour la première fois mardi la prise de chars allemands Leopard et de blindés américains Bradley, des véhicules fournis par les Occidentaux.

Le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius a prévenu qu’il ne pourrait remplacer tous les chars fournis par son pays à l’Ukraine et mis hors service.

De leur côté, les Etats-Unis ont annoncé une aide supplémentaire de 325 millions de dollars à l’Ukraine, visant notamment à renforcer sa défense aérienne.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait admis lundi soir que l’offensive dans le sud et l’est pour libérer des territoires occupés par la Russie était " difficile ", mais progressait avec la reprise, selon le ministère de la Défense, de sept villages dans le sud et des avancées aux alentours de Bakhmout, ville martyre ravagée par près d’un an de combats.

Mardi, le commandant en chef de l’armée ukrainienne, Valéry Zaloujny, a encore fait état " d’avancées ". De violents combats offensifs et défensifs se déroulent dans l’est et le sud de notre nation ", a-t-il déclaré sur les réseaux, ajoutant: " nous avons des gains, nous appliquons notre plan, et nous avançons ".

Selon M. Poutine, l’Ukraine a lancé sa " contre-offensive à grande échelle " le 4 juin sur " plusieurs " secteurs du front, citant deux zones du sud et l’une dans l’est, sans mentionner Bakhmout. " L’ennemi n’a réussi dans aucune de ces zones ", a affirmé Vladimir Poutine.

Selon des analystes militaires, l’Ukraine n’a pas encore lancé le gros de ses forces dans sa contre-offensive, testant la ligne de front en quête de points faibles. Actuellement, ces opérations semblent se concentrer sur trois axes principaux : Bakhmout, la zone de Vougledar (sud-est) et celle d’Orikhiv (sud).

De son côté, le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg a assuré que l’armée ukrainienne " progresse ". " Plus les Ukrainiens pourront libérer de territoire, meilleure sera leur position à la table des négociations ", a estimé le chef de l’alliance de défense, reçu dans le Bureau Ovale par le président américain Joe Biden, principal architecte du soutien occidental à l’Ukraine.

Sur le terrain, la Russie a une nouvelle fois lancé ses missiles en direction des villes ukrainiennes dans la nuit de lundi à mardi.

A Kryvyï Rig, ville natale de M. Zelensky dans le centre, ces bombardements ont fait au moins onze morts mardi avant l’aube, avec la destruction notamment d’un immeuble d’habitation et d’un entrepôt.

Vladimir Poutine a également, à nouveau, menacé de quitter l’accord sur l’exportation des céréales ukrainiennes, conclu en juillet 2022 et qui avait permis de soulager la crise alimentaire mondiale provoquée par le conflit.

Le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi était lui à Kiev mardi et devait inspecter mercredi la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par la Russie, pour voir notamment si celle-ci a été mise en danger par la destruction du barrage de Kakhovka sur le fleuve Dniepr, dont l’eau est utilisée pour refroidir les six réacteurs.

Selon M. Grossi, il n’y a pas de " danger immédiat ", mais le niveau d’eau dans le bassin de refroidissement l’inquiète: " Il y a un risque sérieux, car l’eau qui est là-bas est limitée ". " Je veux faire ma propre évaluation ", a-t-il dit à la presse.

La destruction du barrage a provoqué de graves inondations dans le sud, faisant 17 morts en zone occupée par la Russie et dix en zone sous contrôle ukrainien.

L’Ukraine accuse Moscou d’avoir démoli l’ouvrage pour gêner sa contre-offensive. La Russie dément et accuse Kiev en retour.

Georges Haddad, avec AFP