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La bataille de Gaza continue, l’engrenage libanais est déjà en place, les délires psychotiques d’un régime iranien aux abois transgressent tous les seuils, les fronts se multiplient tous azimuts, la militarisation des enjeux sécuritaires et la violence gagnent en ampleur et les permutations du jeu guerrier, politique et diplomatique s’enchaînent de manière vertigineuse, au point de rendre toutes médiations diplomatiques redondantes. Le schéma de cette guerre se complexifie sous l’effet des surdéterminations conflictuelles qui nous renvoient aux effondrements successifs de l’ordre régional. La guerre frontale est doublée de la guerre des ombres, des attaques latérales, des faillites politiques et de la mort des mythes fondateurs de l’ordre régional. Le régime iranien n’a plus d’autre issue que la fuite en avant et la stratégie du chaos comme gage de survie, alors que cette dynamique semble lui échapper et propulser les nihilismes comme unique alternative aux échecs des régimes politiques et des grands récits qui leur ont servi de principe de légitimation.

Les attaques consécutives au Pakistan, en Irak et en Syrie, ainsi que la mobilisation des Houthis répercutent le malaise du régime islamiste qui cherche à se protéger au-delà de ses frontières, alors que l’érosion de sa légitimité intérieure s’effectue à une vitesse météorique, avec la poursuite de la contestation libérale et démocratique qui s’est structurée, depuis plus d’un an, autour de la révolte du voile et du déclenchement des actions terroristes par les séparatistes baloutches et l’État islamique. Sinon, les guerres de l’ombre avancent de manière frontale avec la vague d’assassinats qui a visé les Gardiens de la révolution qui dirigent les politiques de subversion au Proche-Orient. Cette dynamique a fini par relancer les entreprises concurrentes, du côté turc et des mouvements terroristes sunnites, qui s’en sont emparés pour porter des coups aux autonomies kurdes et aux politiques de stabilisation et de réforme dans la région.

La guerre israélo-palestinienne s’enlise avec la prolongation des combats à Gaza, l’indifférence du Hamas et de ses émules aux malheurs qu’ils font subir à la population civile, en plus de l’absence de toute vision politique, hormis celle de la violence nihiliste et des délires de la destruction d’Israël. Les Israéliens, de leur côté, sont confrontés aux traumatismes et dilemmes sécuritaires de l’après octobre 2023, à l’épilogue de la guerre de Gaza et ses priorités (défaite militaire du Hamas, libération des otages, gouvernance de Gaza) et aux perspectives d’une solution d’ensemble. Les différends au sein du cabinet de guerre reflètent des visions contrastées qui vont bien au-delà des vicissitudes du confit actuel et qui n’ont cessé de susciter des interrogations sur l’identité de l’État (sioniste, postsioniste, israélienne ou juive), la sécurité nationale et les chances d’une normalisation dans un environnement où l’hostilité idéologique, le refus de reconnaissance et les cycles récurrents de violence ont ressourcé les irrédentismes des ultranationalistes et des messianismes politiques, affaibli les camps de la paix et dissuadé les citoyens ordinaires en Israël. Quant à l’Autorité palestinienne, elle a failli, jusque-là, à s’imposer comme intermédiaire obligé, point de ralliement et négociateur qui permettrait aux Palestiniens de se soustraire aux instrumentalisations iraniennes et consorts, d’engager l’État d’Israël à partir d’une démarche diplomatique renouvelée basée sur un legs de résolutions et d’accords internationaux, un centenaire de coexistence avec tous ses aléas, échecs et réussites, en plus d’une vision résolue de la paix.

L’explosion de la violence et l’extension de son périmètre est de mauvais augure vu qu’elles mettent en relief les failles systémiques d’un ordre géopolitique pulvérisé. Le conflit du 7 octobre 2023 et les bouleversements qu’il a induits témoignent de la fragilité de ses fondements, de la péremption de ses consensus normatifs, de la revanche des anachronismes politiques et de la prégnance des rapports de force comme mode privilégié de régulation des conflits. Le large spectre de ce conflit, tant idéologique que stratégique, nous renvoie à une solution d’ensemble qui permet de mettre fin aux enchevêtrements conflictuels, de libérer les parties du conflit des appréhensions, des liens de dépendance et des instrumentalisations et de paver la voie à des médiations internationales impératives. Autrement, les perspectives d’un conflit généralisé vont relayer cet état d’incertitude et de latence. Malheureusement, les acteurs de la nouvelle guerre froide ne sont pas là pour faciliter la tâche, surtout qu’ils sont déterminés à torpiller les assises, libérale et démocratique, de l’ordre international et à promouvoir les scénarios du chaos régional, alors que les conflits ont besoin plus que jamais d’indépendance, de réciprocité morale et de partenariat dans la recherche des solutions négociées.

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