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L’habit ne fait pas le moine… Ce dicton s’applique, certes, au domaine de la politique politicienne, mais il est aussi et, surtout, adéquat, lorsque l’on se trouve dans une situation de manipulation des masses populaires. Dans un tel cas de figure, les positions affichées à grand renfort de tapage médiatique représentent souvent un épais écran de fumée qui cache mal les véritables intentions de ceux qui tirent les ficelles en coulisses pour tenter de réaliser des objectifs politiques sans aucun rapport avec les comportements publics des manifestants.

Cette déformation des réalités sur le terrain est apparue au grand jour au cours des mouvements de protestation estudiantine dont plusieurs prestigieux campus américains ont été le théâtre ces dernières semaines. Des dizaines d’étudiants en colère ont en effet envahi les campus de Columbia, à New York, de Yale, Harvard et Princeton, entre autres. Cette fronde a même atteint, brièvement, Sciences Po à Paris.  Si l’on se fie aux apparences, le catalyseur de cette fronde a été le dérapage meurtrier qui marque la guerre entre Israël et le Hamas.

Que les étudiants s’élèvent et fassent entendre leurs voix pour stigmatiser les massacres subis par la population de Gaza constitue une initiative louable, dans l’absolu. Cependant, les slogans lancés, les positions affichées ici et là, illustrent à quel point les contestataires ne savent pas de quoi ils parlent et font montre d’une ignorance totale des réalités sur le terrain. Ils stigmatisent le cabinet Netanyahou et font dans le même temps l’apologie du Hamas, qu’ils perçoivent comme un "mouvement de résistance". Ils ignorent à cet égard – ou feignent d’ignorer – que le Hamas a été aidé et renforcé par Netanyahou dans le but d’affaiblir l’OLP et de saboter le projet d’État palestinien. Ils ignorent – ou feignent d’ignorer – que c’est du fait de la collusion et de la coopération de celui qu’ils stigmatisent, en l’occurrence Netanyahou, que le financement massif du Hamas s’est fait à coup de centaines de millions de dollars transférés régulièrement par le Qatar via Israël.

Les frondeurs qui se posent en porte-étendard de la cause palestinienne reprennent à leur compte le slogan "Palestine libre", en insistant toujours sur l’apologie du Hamas. Ils oublient cependant – ou feignent d’oublier – que le Hamas a mené au début des années 2000 une guerre meurtrière à Gaza contre le Fateh et l’OLP, en massacrant près de 800 responsables, cadres et militants du Fateh, dont plusieurs ont été défenestrés de sang-froid. Cette guerre a abouti à l’élimination de la présence de l’Autorité palestinienne à Gaza, et donc de l’OLP, laquelle a été de ce fait sensiblement affaiblie alors même qu’elle avait réussi à s’imposer, sous la conduite de Yasser Arafat, comme le représentant légitime du peuple palestinien, bénéficiant de la reconnaissance de la communauté internationale.

Les étudiants contestataires qui ont envahi des campus américains ne savent sans doute pas également – ou font semblant de ne pas savoir – que le Hamas, avec la droite israélienne comme allié objectif, a torpillé en 1994 et 1995 les accords de paix d’Oslo conclus par l’OLP de Yasser Arafat avec Israël dans le but, précisément, d’édifier cette Palestine libre dont ils se veulent les fervents défenseurs. Ces prétendus frondeurs ne veulent pas voir, dans ce même ordre d’idées, que le Hamas ne s’est pas contenté de saboter les efforts de l’OLP visant à aboutir à une "Palestine libre", mais qu’il s’est fait, parallèlement, l’instrument de la République islamique iranienne dont la stratégie est d’exploiter de manière insidieuse la cause palestinienne dans le seul et unique but de s’imposer sur l’échiquier régional.

Les frondeurs zélés ne réalisent-ils pas, de plus, qu’en adoptant une posture haineuse, clairement antisémite, ils ne font que susciter un élan de solidarité internationale en faveur d’Israël en renforçant, par la même occasion, la droite israélienne?

Autant d’incohérences et d’ignorance qui ont accompagné la vague de contestation apparue de manière "subite", suivant un même scénario dans plusieurs universités (alors que la guerre de Gaza se poursuit depuis plus de six mois) et qui cachent mal une manipulation orchestrée par de puissants acteurs occultes. Une manipulation qui est loin de servir les intérêts légitimes du peuple palestinien.