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Les grandes puissances maintiennent des lignes politiques constantes difficiles à ébranler, même lorsque les partis au pouvoir se succèdent ou alternent. C’est particulièrement vrai en Occident, où les mécanismes démocratiques permettent le renouvellement des gouvernements sans pour autant entraîner de bouleversements significatifs dans les principes généraux et fondamentaux qui guident ces nations.

Cependant, dans le cadre de l’élection présidentielle américaine prévue pour le mois de novembre prochain, il n’est pas certain que ces principes de politique étrangère demeurent inchangés, notamment si Donald Trump fait son retour à la Maison Blanche après quatre ans d’absence.  En effet, ce dernier s’est toujours distingué par son éloignement des pratiques traditionnelles, tant dans ses positions que ses comportements.

Il est naturel, si la candidate démocrate, Kamala Harris, remporte la course présidentielle, qu’elle maintienne les grandes lignes des politiques intérieure et étrangère définies par le président Joe Biden, puisqu’ils appartiennent au même parti et partagent une vision politique commune. Cependant, des différences peuvent naturellement émerger en raison de leurs styles distincts, de leurs parcours, de leurs cultures respectives, ainsi que de leur expérience et approche du pouvoir.

Contrairement à Donald Trump, Kamala Harris ne devrait pas s’éloigner des politiques traditionnelles, notamment en matière de politique étrangère. Autrement dit, elle maintiendra des relations étroites avec les alliés, en particulier l’Union européenne, le Royaume-Uni et le Japon. Elle continuera également à diriger l’Otan face à la Russie et à soutenir l’Ukraine tant que les rapports de force resteront inchangés.

En revanche, au Moyen-Orient, Mme Harris, tout comme M. Trump, préservera la relation stratégique avec Israël. Toutefois, elle pourrait également chercher à réaffirmer son engagement envers la solution à deux États, un principe constant dans les discours politiques américains. Cependant, cet engagement risque de rester purement rhétorique, notamment en l’absence de véritables actions pour contraindre Israël à mettre en œuvre les résolutions internationales ou de parvenir à une paix durable.

La politique de Donald Trump concernant le conflit arabo-israélien et la question palestinienne n’a pas rencontré le succès escompté. Il a misé sur une approche centrée sur le soutien économique pour résoudre la question des droits des Palestiniens, une stratégie qui, au final, n’a pas reçu l’approbation d’Israël non plus. Par ailleurs, il a ignoré les demandes fondamentales concernant des enjeux cruciaux tels que Jérusalem, les réfugiés, les frontières, l’eau, les colonies, ainsi que d’autres aspects indispensables au règlement du conflit.

Il s’avère également qu’en dépit de la normalisation des relations entre certains pays arabes et Israël, le conflit historique reste profondément enraciné, comme en témoigne la tournure dramatique des évènements survenus le 7 octobre 2023 dans la bande de Gaza.

Si elle est élue, Mme Harris devra se recentrer sur les fondamentaux du conflit, dont certains principes ont été établis lors de la Conférence de Madrid en 1991, tels que le concept de "la terre contre la paix", ainsi que lors du Sommet arabe de Beyrouth en 2002. La mise en œuvre de ces principes a échoué en raison du manque de volonté d’Israël d’atteindre une paix véritable. Comparée au mandat de Trump, l’administration de Kamala Harris pourrait être perçue comme plus mesurée dans la gestion des enjeux complexes et dans la quête de solutions politiques durables pour cette occupation qui perdure depuis des décennies.

Cependant, le soutien inconditionnel à Israël reste une constante, tant pour elle que pour tout autre dirigeant américain.

Il est toutefois crucial que les États-Unis engagent, à un moment donné, un débat approfondi sur l’aide illimitée qu’ils apportent à Israël, surtout à la lumière de la guerre actuelle à Gaza. Bien que le sénateur démocrate Bernie Sanders ait amorcé ce débat, celui-ci reste insuffisant pour aborder le problème en profondeur et nécessitera un engagement soutenu pour réellement faire évoluer la situation.

Indépendamment de l’issue de la prochaine élection présidentielle, que ce soit avec M. Trump ou Mme Harris, il est évident que le Moyen-Orient continuera à être la région la plus instable au monde. Il est donc grand temps de mettre en place de nouvelles politiques, distinctes de celles adoptées précédemment, afin d’instaurer enfin la stabilité et la paix.