Emmanuel Macron se rend, jeudi, en Serbie pour une visite durant laquelle Paris et Belgrade espèrent finaliser la vente de douze avions de combat Rafale à ce pays des Balkans. Les discussions porteront également sur la candidature de la Serbie à l’Union européenne, malgré ses relations persistantes avec Moscou en dépit du conflit en Ukraine.

Le président français Emmanuel Macron se rend jeudi en Serbie pour une visite de deux jours au cours de laquelle Paris et Belgrade comptent conclure la vente de douze avions de combat français Rafale à ce pays des Balkans qui conserve des liens amicaux avec la Russie.

Dans un entretien accordé mercredi à l’AFP, le président serbe Aleksandar Vucic s’est montré optimiste sur la signature de cet "énorme contrat". "La Serbie pourrait devenir un membre du Club Rafale", s’est-il réjoui.

Il avait par le passé laissé entendre que son pays était prêt à débourser trois milliards d’euros.

L’Élysée a confirmé à des journalistes avoir bon "espoir" que les négociations avec le groupe Dassault aboutissent à l’occasion de la visite du président français.

La question est sensible: Belgrade, qui espère adhérer un jour à l’Union européenne, maintient des relations avec Moscou malgré l’invasion de l’Ukraine et n’a pas imposé de sanctions à la Russie depuis le début de la guerre en 2022.

Auprès de l’AFP, le président Vucic a plaidé que la quasi-totalité des "avions intercepteurs" serbes et "l’ensemble" des "avions de combat venaient de Russie". "Nous devons évoluer, changer nos habitudes et tout le reste afin de préparer notre armée", a-t-il déclaré.

La France met aussi cet argument en avant, évoquant une logique "d’arrimage de la Serbie à l’Union européenne", à laquelle elle est candidate. Belgrade peut faire le "choix stratégique" de "coopérer avec un pays européen" pour renouveler sa flotte, plaide-t-on à Paris.

"S’éloigner ainsi de la Russie" pour le renouvellement de ses avions, "cela a un poids politique aujourd’hui", confirme Milan Igrutinovic, chercheur auprès de l’Institute for European Studies à Belgrade.

"Consolider l’État de droit"

Pour Vuk Vuksanovic, du Centre for Security Policy, autre cercle de réflexion de la capitale serbe, "Vucic cherche une solution pour remplacer ses Migs vieillissants".

"S’il n’en trouve pas, la Croatie voisine, avec ses propres Rafale, aura une supériorité aérienne dans les Balkans occidentaux. Et l’ego de Vucic ne peut pas accepter cela", explique-t-il. "De plus, il pense qu’en achetant ces Rafale, qui sont un produit extrêmement coûteux de l’industrie française de l’armement, il achètera la protection politique et les faveurs du président Macron."

Les deux pays n’ont pas évoqué de contreparties à la transaction.

La France soutient officiellement le processus d’adhésion de la Serbie à l’UE, défendu de longue date par Aleksandar Vucic malgré les préoccupations qui s’expriment au sein de la population.

Huit mois après les élections législatives entachées de fraudes selon l’OCDE et le Parlement européen, remportées par le parti présidentiel, l’Élysée estime que ce processus d’adhésion doit pousser Belgrade à "consolider l’État de droit" et "le cadre démocratique qui doit être le sien".

Emmanuel Macron doit aussi prôner sur place la "normalisation des relations avec le Kosovo", "partie intégrante" de ce "rapprochement" avec les Vingt-Sept.

Depuis l’indépendance du Kosovo en 2008, que la Serbie n’a jamais reconnue contrairement à de nombreux pays occidentaux, les tentatives d’apaisement et de dialogue ont toutes échoué.

Le président français est attendu en fin d’après-midi à Belgrade, où il s’entretiendra immédiatement avec son homologue.

Une conférence de presse conjointe sera précédée de la signature d’accords. Outre les Rafale, des "discussions préliminaires et exploratoires" sont engagées avec l’électricien français EDF sur le nucléaire civil et des coopérations nouvelles sont envisagées sur l’énergie hydroélectrique, le traitement des eaux usées ou encore la santé.

Le lendemain, les deux hommes se rendront à Novi Sad, deuxième ville du pays, pour une étape culturelle, avec la visite de la galerie Matica Srpska et un échange sur l’intelligence artificielle.

Par David STOUT avec Francesco FONTEMAGGI, AFP