" Emma Raducanu sera une joueuse de top niveau ", assure Ken Weatherley, président de Tennis First, une association qui a aidé financièrement la Britannique à l’adolescence.

Mais pour cela, il faudra qu’elle " assimile les leçons " de son triomphe surprise à l’US Open. En septembre dernier, à New York, Raducanu avait stupéfié le monde du tennis en sortant des qualifications et en ne perdant pas un set jusqu’à la finale remportée 6-4, 6-3, à 18 ans, contre la Canadienne Leylah Fernandez, son aînée de 2 mois et 7 jours.

Et hier, à Melbourne, alors que tous les regards étaient rivés sur elle, elle a résisté à la pression pour battre Sloane Stephens au 1er tour de l’Open d’Australie (6-0, 2-6, 6-1).

Un véritable conte de fée pour celle qui avait bénéficié pendant plusieurs années d’une bourse de Tennis First, une association créée en 1999 pour aider financièrement les jeunes joueurs et joueuses à devenir professionnels.

" Ce n’était pas si difficile de voir que quelqu’un comme Emma Raducanu ou Jack Draper (un autre des 17 joueurs et joueuses qui ont intégré les 250 meilleurs mondiaux avec leur aide, NDLR) ont des capacités, une coordination entre l’œil et la main, exceptionnelles ", raconte-t-il à l’AFP.

" Ce qui est plus dur, c’est de savoir comment le joueur ou la joueuse est vraiment, leurs aptitudes athlétiques, si des blessures vont entraver leur développement (et…) ce qu’ils ont dans la tête. Pour jouer au haut niveau, il faut un cerveau adapté au tennis ", complète encore M. Weatherley.

" Pas un produit fini "

Des éléments qu’il est persuadé d’avoir discernés chez Emma Raducanu. " Elle sera une joueuse de top niveau, j’en suis convaincu, parce qu’elle a tous les attributs ", assène-t-il tout en soulignant que, à l’heure actuelle, " elle n’est absolument pas un produit fini ".

A New York, " elle a eu un peu de chance d’avoir un tirage relativement facile dans la mesure où elle n’a pas eu à affronter les toutes meilleures joueuses ".

Sur son chemin vers la gloire, elle n’avait battu que deux têtes de série, Belinda Bencic (N.11) en quart et Maria Sakkari (N.17) en demie, quand son adversaire en finale avait dû se débarrasser d’Aryna Sabalenka (N.2), Naomi Osaka (N.3) et Elina Svitolina (N.5).

" Elle (Raducanu) a joué incroyablement bien et elle était en feu ", corrige immédiatement Ken Weatherley, mais, ajoute-t-il, " il serait irréaliste de penser qu’elle restera à un tel niveau dès maintenant ".

Raducanu en a d’ailleurs pleinement conscience. " Je pense que l’un de mes objectifs sera de ne pas me décourager ou de trop m’enflammer. Ce sera juste d’essayer de faire des progrès réguliers, en visant plus haut, j’espère ", avait-elle réagi la semaine dernière après sa sévère défaite (6-0, 6-1) en 55 minutes face à la Russe Elena Rybakina, 12e joueuse mondiale, au tournoi WTA de Sydney.

Un " effet Raducanu " ?

" Je m’attends à ce qu’elle recule au classement (elle est actuellement 18e), peut-être même au-delà de la 50e place, le temps d’assimiler toutes les leçons dont elle a besoin sur le plan professionnel ", a confirmé Ken Weatherley. " Emma a 19 ans (…) elle va vivre une vie très différente de celle qu’elle a vécue jusque là (…) Elle sera loin de chez elle très souvent, elle va devoir devenir plus indépendante, mais l’entraînement qu’elle a reçu de ses parents est excellent ", assure-t-il cependant.

Et pendant qu’elle mènera sa carrière, Ken Weatherley et Tennis First continueront de leur côté à essayer de repérer et aider les futures stars du tennis britannique. " Nous n’avons pas assez de gens qui jouent régulièrement au tennis (en Grande-Bretagne) par rapport à la France, par exemple, qui produit peut-être dix fois plus de bons joueurs, des joueurs du Top 100, disons ", a-t-il regretté.

Mais la pandémie de Covid-19 et l’exploit d’Emma Raducanu pourraient changer les choses. " Il y a eu une ruée vers le tennis à cause du Covid et du confinement. De nouveaux joueurs qui se sont mis au tennis parce que c’était l’un des seuls sports que vous pouviez pratiquer à l’extérieur ", explique M. Weatherley. " Je suis sûr que de nombreux enfants ont vu ce qui est arrivé (à Emma Raducanu) et pourront être persuadés d’essayer le tennis. Est-ce qu’ils persévèreront ? La réponse viendra sur le long terme ", reconnaît-il cependant.