Des milliers de migrants, notamment originaires d’Amérique centrale et du sud, souhaitent se rendre aux États-Unis afin d’obtenir une vie meilleure. Mais le chemin reste périlleux pour l’immigration illégale. 

 

À l’image de David Gonzalez, des milliers de Cubains en ont assez de " survivre au lieu de vivre " et tentent désormais par tous les moyens de rejoindre les États-Unis, dans ce qui s’apparente à la plus large vague migratoire de l’histoire en provenance de l’île des Caraïbes.

Ce coiffeur de 34 ans ne supportait plus les pénuries à répétition dans un pays qui traverse sa pire crise économique depuis les années 1990, ni son régime, qu’il n’a jamais su accepter, sans perspective d’avenir.

Un poste de patrouille frontalière des douanes et de la protection des frontières américaines (AFP)

 

" Vous perdez espoir. Vous tentez de vous projeter vers le futur, mais dans ce pays, vous ne le voyez pas ", explique-t-il depuis Miami, sa destination finale.

Ce désespoir touche l’ensemble des plus jeunes à Cuba, les faisant fuir en masse. Depuis le 1er décembre 2021, les autorités américaines estiment avoir réalisé plus de 270 000 interpellations de Cubains tentant d’entrer illégalement aux États-Unis, soit près de 2,5% de la population de l’île.

Un chiffre bien supérieur aux précédentes grandes vagues : celle de Mariel en 1980, qui avait vu 125 000 personnes tenter la traversée, et la crise des " Balseros " (ou boat people) de 1994, avec environ 34 000 personnes, souligne Jorge Duany, directeur de l’Institut des recherches cubaines de l’Université internationale de Floride.

Un investissement

Plutôt que les 150 kilomètres de traversée en bateau, M. Gonzalez a débuté son odyssée par un vol vers le Nicaragua, allié du régime cubain vers lequel les visas ne sont pas nécessaires et devenu la première étape du voyage vers les États-Unis pour la majorité des Cubains prenant la route de l’exil.

Les migrants traversent le Rio Grande vers les USA malgré l’interdiction d’entrée prolongée (AFP)

 

Au total, le voyage lui a coûté 7 000 dollars: 3 500 pour le vol puis autant pour payer les passeurs qui l’ont amené jusqu’aux États-Unis. Une somme importante alors que le salaire mensuel moyen cubain est de 3.768 pesos, soit environ 157 dollars.

Le coiffeur a financé une partie en vendant ce qu’il possédait et le reste est venu d’un ami déjà installé à Miami.

" Ma vraie crainte est qu’ils me renvoient à Cuba ", explique M. Gonzalez, arrivé au terme d’un voyage de 30 jours à travers l’Amérique centrale en bus ou à l’arrière d’un camion.

Embarcations précaires

Ceux qui n’ont pas les moyens de payer pour passer par le Nicaragua tentent la traversée entre Cuba et la Floride, à bord d’embarcations précaires.

Le jour de Noël, les gardes-côtes américains ont ainsi intercepté une quinzaine de petits navires près de l’archipel des Keys, à l’extrême-sud de la Floride, où des dizaines de personnes accostent chaque semaine.

Mariana de la Caridad Fernandez, 20 ans, et sa sœur Yaneris, 31 ans, ont fait la traversée en novembre afin d’éviter d’être condamnées pour leur participation aux manifestations qui ont secoué l’île en juillet 2021 et rejoindre leur mère, déjà installée à Miami.

Un périple de plus de 16 heures entre Cojimar, près de La Havane et l’île Marquesas, à l’extrémité des Keys, en compagnie de 40 autres personnes.

À leur arrivée, une patrouille de la police aux frontières les a interpellées avant de les relâcher rapidement. Les deux sœurs ont désormais fait une demande d’asile et pourront rendre leur présence légale au bout d’un an sur le sol américain grâce à la loi d’ajustement cubain (CAA), qui offre la résidence permanente à tout réfugié cubain.

Les gardes frontière bloquent des migrants sur le point d’entrer aux États-Unis (AFP)

 

Mais d’autres n’ont pas eu cette chance, car les bateaux interceptés en mer sont renvoyés à Cuba, à moins de prouver que la vie des occupants est en danger.

Depuis le 1er octobre, 3 724 embarcations ont été ainsi interceptées, soit environ la moitié des embarcations arraisonnées entre octobre 2021 et octobre 2022. Sans parler de celles qui disparaissent en mer.

En avril, un bateau avec 14 personnes à bord s’est renversé, seulement cinq de ses occupants réussissant à rejoindre les côtes cubaines à la nage.

Le neveu de Miriela, Luis Miguel, fait partie des disparus. " Ne pas savoir ce qui lui est arrivé nous fait d’autant plus souffrir ", explique cette Cubaine qui refuse de donner son nom, car elle travaille dans une entreprise publique. " Nous ne perdons pas espoir, quand bien même il a disparu depuis six mois ".

À Miami, David Gonzalez espère désormais éviter l’expulsion et profiter de la CAA. Il a repris son travail de coiffeur et pense avoir trouvé ce qu’il cherche : un avenir meilleur.

Avec AFP