L' "union sacrée ", au moins au premier jour de guerre en Ukraine ? Les candidats à la présidentielle ont condamné jeudi l’invasion russe, qui relance la guerre sur le continent européen et bouleverse la campagne à six semaines du premier tour.

Dans la foulée du président Emmanuel Macron, qui a " condamné fermement la décision de la Russie de faire la guerre à l’Ukraine " et appelé à " mettre immédiatement fin à ses opérations militaires ", les candidats ont affiché un front uni se disant aussi solidaires de l’Ukraine.

Y compris dans le camp de ceux considérés comme les plus compréhensifs envers les positions russes, à l’instar du leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon ou encore des candidats d’extrême droite Eric Zemmour et Marine Le Pen. Tous trois se retrouvent de facto sur la défensive jeudi.

" Mélenchon, Zemmour et Le Pen anticipent qu’ils pourraient éventuellement payer le coup électoral de certaines imprudences ", dit à l’AFP le politologue Pascal Perrineau, qui rappelle que " ce sont des candidats qui sont allés plus ou moins chercher le soutien de (Vladimir) Poutine ".

Les trois candidats ont été critiqués pour s’être à des degrés divers associés aux revendications russes contre l’expansion de l’Otan même s’ils n’ont pas cautionné les agissements du président russe.

M. Mélenchon, arrivé jeudi matin à l’île de la Réunion, a appelé dans un communiqué à refuser cette " escalade insupportable " et à user de la voie " diplomatique " pour obtenir " un cessez-le-feu immédiat et un retrait de toutes les troupes étrangères d’Ukraine ".

Eric Zemmour, qui s’était dit à plusieurs reprises persuadé qu’il n’y aurait pas d’invasion russe, a lui condamné " sans réserve " Moscou.

Il a appelé Emmanuel Macron, " comme l’avait fait le président Sarkozy en août 2008 lors de la crise géorgienne, à se rendre sans délai à Moscou puis à Kiev pour négocier un cessez-le-feu immédiat, la mise en place d’une médiation et d’une négociation de paix ".

De son côté, Marine Le Pen a appelé " à la cessation immédiate des opérations russes ", une invasion qui " rompt l’équilibre de la paix en Europe " et " doit sans ambiguïté être condamnée ". Mme Le Pen avait été reçue par Vladimir Poutine lors de la campagne présidentielle de 2017.

Livrer " des armes "

Pour Valérie Pécresse (LR), " la réponse de la France et de l’Europe doit être vigoureuse, coordonnée et sévère ".

A gauche, la candidate socialiste Anne Hidalgo a condamné " avec la plus grande énergie l’attaque brutale ordonnée par Vladimir Poutine " et demandé à " réagir fermement devant cet acte injustifié et criminel ".

L’écologiste Yannick Jadot a plaidé de son côté pour que la France et l’UE organisent " des livraisons d’armes pour que les Ukrainiens puissent se défendre et des sanctions d’une ampleur exceptionnelle contre Poutine et ses complices, en les bannissant de la communauté internationale ".

Combien de temps durera cette " union sacrée " alors que les candidats ont affiché de vraies divergences de fond par rapport aux relations avec la Russie et s’en sont pris à Emmanuel Macron, accusé de s’être fait " instrumentaliser " par Vladimir Poutine ?

Soutien de Marine Le Pen, Robert Ménard a dit sur Cnews " penser aux responsables politiques, y compris des hommes politiques dans mon camp, qui disaient que les Américains provoquent quand ils disent que Poutine va envahir l’Ukraine ", allusion à peine voilée à Eric Zemmour.

" Inédit "

A 46 jours du premier tour, s’il est encore trop tôt pour juger de l’impact de l’invasion russe sur les Français et la présidentielle, elle n’en vient pas moins déjà bouleverser la campagne.

Les enjeux de politique étrangère pèsent généralement peu sur une élection présidentielle, mais le fait que la guerre soit aux portes de l’Union européenne et qu’elle impacte l’entrée en scène du président Macron, qui ne s’est pas encore déclaré candidat, pourraient changer la donne, estiment des analystes.

Le président Macron, qui a convoqué un Conseil de défense nationale dans la matinée, avait annulé dès la veille sa participation au traditionnel dîner du Crif jeudi soir pour se rendre à un Conseil européen extraordinaire relatif à la crise russo-ukrainienne.

Plusieurs candidats comme Yannick Jadot ou Christiane Taubira ont pour leur part reporté ou annulé des déplacements prévus jeudi pour participer à des manifestations pro-Ukraine, tandis que France 2 a déprogrammé un débat dans la soirée avec Marine Le Pen.

Plus largement, ces évènements " empêche(nt) la campagne de progresser ", souligne le sondeur de PollingVox Jérôme Sainte-Marie, pour qui " ça va encore plus affaiblir les enjeux réels de la campagne, notamment les enjeux sociaux qui sont inaudibles ".

" C’est du jamais-vu " d’avoir une guerre en temps de campagne, note de son côté Frédéric Dabi, directeur général opinion à l’Ifop.

" Mais ça reste très difficile à prédire. Ce qu’on peut peut-être anticiper, c’est une logique de distinction entre le président et les autres candidats " selon qui est le plus " présidentiable ".

AFP

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