©Photo by Jalaa MAREY / AFP
Une tuerie, une tragédie de plus… Et pour rien… Ou plutôt, si, pour assouvir les ambitions géopolitiques insatiables d’une puissance régionale théocratique dont les desseins hégémoniques ne connaissent pas de limites. Les mots viennent à manquer pour exprimer le sentiment d’horreur suscité par le sort abject subi par les douze enfants et adolescents de Majdal Shams, tués par un tir de missile alors qu’ils participaient (ou assistaient, pour certains) à un match de football dans ce village druze du Golan, placé sous souveraineté israélienne.
Les photos de ces enfants, garçons et filles (âgés entre 11 et 16 ans), en tenue de sport, gisant, sans vie, sur le terrain de foot, sont insoutenables et répugnantes. Elles nous rappellent, s’il en était encore besoin, une infâme réalité que le pays du Cèdre subit depuis des décennies: celle de populations civiles prises en otage ou réduites à des chairs à canon pour permettre à des régimes sans foi ni loi de se tailler la part du lion sur l’échiquier de la région.
Le drame des enfants de Majdal Shams est le résultat direct de cette stratégie expansionniste et la conséquence non moins directe de la décision unilatérale prise par le Hezbollah de rouvrir, au lendemain de l’attaque du 7 octobre contre Israël, le front du Liban-Sud sous le double prétexte – ô combien fallacieux – de réduire la pression militaire sur Gaza et (le comble !) de progresser sur «la route de Jérusalem»! Bilan de cette prétendue diversion initiée par la formation pro-iranienne: Gaza et le Liban-Sud sont dans une large partie détruits, sans aboutissement ou acquis palpable et rationnel; quant à la route de Jérusalem…
Les dirigeants iraniens donnent souvent la perception que ce sont de bons joueurs d’échecs. Encore que… En provoquant par télécommande l’attaque meurtrière du 7 octobre lancée par le Hamas contre Israël, ils ont, certes, stoppé la normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite, de même qu’ils se sont repositionnés en force sur la scène du Moyen-Orient. Mais à quel prix! Au prix de milliers de morts palestiniens, de la transformation de Gaza en vastes champs de ruines, de la destruction de l’infrastructure militaire du Hamas, de la perte d’une grande faction des cadres et des miliciens de l’organisation fondamentaliste, de l’exode forcé de la population de Gaza, du contrôle par Israël des voies de passage avec l’Égypte et de l’occupation de pratiquement tout le territoire jadis gouverné par le Hamas… Le tout, sans aucun acquis pour les Palestiniens, en contrepartie. Pour le régime des mollahs, ce ne sont là que des dommages collatéraux sans importance, tant que le territoire et les infrastructures de l’État iranien ne sont pas touchés.
Dommages collatéraux également au Liban-Sud où, dans le cadre de sa partie d’échecs avec Tel-Aviv et Washington, Téhéran avait besoin, pour faire avancer (avec précaution) ses pions, d’ouvrir, par le biais du Hezbollah, un front avec Israël, mais en «dosant» savamment la guerre d’usure, de manière à éviter une confrontation généralisée à grande échelle. Et tant pis pour les 400 cadres et miliciens du Hezbollah liquidés dans des attaques de drones minutieusement bien ciblées. Tant pis aussi pour la destruction des villages du Liban-Sud et pour les 100.000 habitants des régions méridionales forcés à l’exode.
Le pouvoir iranien a réussi, dans la foulée, à perturber gravement le trafic maritime et commercial en mer Rouge en instrumentalisant à outrance la milice des Houthis du Yémen. Mais à ce jeu, ce n’est pas tant Israël mais plutôt l’Égypte, plus particulièrement, qui est le grand perdant en raison de la baisse drastique des revenus du canal de Suez. Dommage collatéral… Sans compter, dans ce même sillage, la destruction totale par l’aviation israélienne du principal port du Yémen, Hodeïda. Mais qu’importe? L’important c’est que les Pasdaran iraniens détiennent la carte du trafic international en mer Rouge…
Pour consolider son déploiement régional, la République islamique poursuit en outre patiemment son entreprise de grignotage en Syrie et en Irak en étendant ses tentacules dans les différents secteurs vitaux de ces deux pays.
Face à l’expansionnisme iranien rampant et foncièrement déstabilisateur, des dirigeants occidentaux se laissent prendre au jeu et tentent, à en croire certaines sources, de composer, de négocier, avec le régime des mollahs. Ce serait un peu trop mésestimer le projet idéologique des Pasdaran, fondé dès la mise en place de la République islamique, en 1979, sur «l’exportation de la révolution» dans la région. Ce spectre ne semble pas se limiter uniquement au Moyen-Orient, mais paraît constituer aussi un danger pour certaines grandes capitales occidentales où des cellules dormantes du Hezbollah, à n’en point douter subversives, ont été démantelées ces dernières années, notamment en France, au Royaume uni, à Chypre, en Bulgarie et, il y a quelques jours, en Allemagne.
Plus que jamais, aujourd’hui, il est vital de se rendre à une évidence: le passage obligé de la sécurité et de la stabilité dans la région, mais également dans les pays occidentaux, est d’imposer au régime des mollahs iraniens un plan de sortie de crise qu’il ne saurait refuser. À défaut, les risques que la tragédie de Majdal Shams se répète n’importe où, et en diverses autres circonstances, resteront très élevés avec de tels acteurs sans foi ni loi.