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Au cours de la prestigieuse manifestation cinématographique du Festival de Venise, la crise migratoire contemporaine se voit propulsée au premier plan, mettant en exergue les tragédies humaines qui se jouent aux portes de l’Europe. À l’ombre des magnifiques architectures vénitiennes, la Méditerranée, ce grand bleu qui sépare et unit des mondes, révèle son rôle sinistre de tombeau pour des milliers de candidats à l’exil.

Ainsi, des cinéastes de renom ont levé le voile sur les questions cruciales d’intégration et de xénophobie. Par exemple, le récent chef-d’œuvre des frères Dardenne, Tori et Lokita, déjà récompensé à Cannes en 2022, et le poignant The Old Oak de Ken Loach, dont la sortie est prévue pour le 25 octobre en France, sont autant de témoignages cinématographiques engagés.

La tension est palpable, surtout dans un contexte où l’Italie, sous un gouvernement d’extrême droite depuis un an, fait face à un afflux croissant de migrants, un chiffre qui a plus que doublé comparé à 2022, atteignant plus de 105.000 arrivées. Selon les données de l’ONU, cette route migratoire est la plus mortelle au monde, emportant déjà plus de 2.000 vies depuis le début de l’année.

C’est dans ce cadre que le cinéaste italien Matteo Garrone présente Io, Capitano, (Moi, Capitaine) une œuvre poignante en lice pour le Lion d’or. Le film raconte l’épopée de Seydou et Moussa, deux adolescents sénégalais, éclipsant toute forme de misérabilisme pour mettre en lumière les épreuves inhumaines que rencontrent les migrants, des traversées désertiques à l’esclavagisme moderne. Garrone, bien conscient de la déshumanisation croissante des migrants réduits à des chiffres dans les médias, choisit une approche empathique, retranscrivant le voyage tragique de ces jeunes pleins d’espoir à travers une caméra fixée sur le sol africain, pointée vers l’Europe.

 

Dans cette même lignée, la réalisatrice polonaise Agnieszka Holland présente Green Border, un film choral en noir et blanc qui illustre sans fard les destins tragiques de migrants pris au piège dans les jeux diplomatiques entre la Pologne et le Bélarus. À travers son œuvre, Holland implore les Européens de ne plus ignorer la crise humanitaire qui se déroule à leurs frontières – un appel vibrant à la conscience et à la responsabilité.

Dans un écosystème politique marqué par des tensions exacerbées, ces œuvres rappellent que derrière les statistiques se cachent des trajectoires humaines, des rêves brisés et des familles déchirées. Holland prévient que sans une prise de conscience immédiate, l’Europe court le risque de se transformer en une forteresse impénétrable, teintée du sang de ceux qui cherchent refuge sur son sol.

Les cinéastes engagés appellent à un réveil des consciences, utilisant le grand écran comme un miroir pour refléter les abîmes de l’inhumanité actuelle et insuffler un élan de compassion et de compréhension. Dans la lumière tamisée des salles de cinéma de Venise, se joue non seulement un festival de films, mais une mise en scène poignante des tragédies réelles et actuelles, invitant à un devoir de mémoire et d’humanité.

Avec AFP

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