La photographe Joumana Jamhouri a exposé ses oeuvres à Paris Photo, l’une des foires les plus importantes dans le domaine. C’est avec la galerie Tanit, fondée et dirigée par Naila Kettaneh et basée à Beyrouth et Munich, que s’est déroulé l’événement intitulé La Mer dans tous ses états.

Qu’est-ce que cela fait d’être exposée dans un événement aussi prestigieux que Paris Photo?

Je suis très reconnaissante à Naila Kettaneh, ma galériste, propriétaire de la galerie Tanit, d’avoir exposé deux de mes photos dans cette foire si prestigieuse. C’était une expérience très excitante. Les photos ont d’ailleurs beaucoup plu au public français. J’étais très émue de faire partie de cette aventure, aux côtés de photographes de renom, exposés dans des musées, tels que Elger Esser et Rania Matar. C’est quand même le rêve d’une vie pour un photographe!

 

Que représentaient les deux photos exposées?

Comme le thème de l’exposition était la mer, la première représentait une tempête sur la corniche de Beyrouth, et là, j’ai attendu le premier rayon de soleil après l’orage pour la prendre, ce qui lui confère une atmosphère très particulière. La seconde, c’est le port de Beyrouth avant l’explosion du 4 août, prise de l’un des immeubles les plus élevés de la capitale. Au niveau de l’ambiance, les deux photos se ressemblent assez, car elles ont été prises à l’heure que je préfère, au coucher du soleil.

 

Que symbolisent ces deux photos pour vous?

La tempête est le symbole du renouveau éternel, la ville qui est déchirée puis qui s’apaise. Le port représente le rapport de Beyrouth à la mer, qui m’a toujours fascinée. Ce port est très beau et il incarne le lien de la ville avec le reste du monde. Je me suis souvent perchée sur de très hauts immeubles pour capter la beauté du port de Beyrouth. En faire le deuil est d’autant plus difficile. N’oublions pas que Beyrouth est une presqu’île tendue vers l’horizon. La photo du port incarne aussi le lien entre l’industriel et la mer.

 

Justement, les photos industrielles constituent une partie essentielle de votre œuvre?

Oui, j’ai photographié beaucoup d’usines dans ma carrière! Cela me permet de faire travailler mon imagination en donnant une autre vie aux objets par le biais de l’objectif. Par exemple, je vois de petits poissons rouges là où, en fait, il y a des briques. C’est le côté ludique de mon travail.

 

La ministre française de la Culture (d’origine libanaise) est venue visiter votre stand à Paris photo? 

La visite n’était pas du tout prévue. Mais en la voyant passer avec une délégation, à quelques mètres du stand, sans aucune intention de s’y arrêter, j’ai tout simplement abordé la directrice de la foire, qui l’accompagnait et je lui ai dit: "Ce serait un crève-cœur que vous ne passiez pas nous voir, vu que c’est le seul stand libanais de toute la foire!". J’ai été entendue, et ne voilà-t-il pas que la ministre (tout à fait charmante et chaleureuse) entre et regarde attentivement les œuvres exposées. Cela m’a fait grand plaisir.

Pensez-vous que l’intelligence artificielle puisse tuer la créativité d’un photographe?

Quand j’ai fait mes études de photographie, les photos étaient en argentique et à la fin de mes études, nous étions passés au numérique. J’ai donc dû tout réapprendre. Mais je l’ai fait avec plaisir, ayant toujours été ouverte au progrès. L’argentique m’a donné une base importante, et j’ai constaté être douée pour l’informatique. Cela m’a permis de rester compétitive. Je pense que l’intelligence artificielle peut beaucoup apporter à la photo, à condition de ne pas sombrer dans les dérives.

 

Quels sont vos prochains projets? 

Deux projets en gestation dont je vous parlerai dès qu’ils seront concrétisés!

Par ailleurs, je souhaite réactiver un projet qui n’a pu voir le jour à cause de la pandémie. Une série de photos de la foire Rachid Karamé de Tripoli, site construit par l’architecte brésilien Oscar Niemeyer, et qui, depuis, a été inscrit sur la liste du Patrimoine mondial en danger de l’UNESCO. Les photos devaient faire l’objet d’une exposition tournante dans tous les Instituts français à travers le Liban.

 

Que faut-il vous souhaiter?

Que mes photos connaissent une plus grande visibilité! Et là, se pose une question fondamentale: est-ce que l’on photographie pour que l’œuvre soit vue, ou simplement pour qu’elle existe? Le débat est ouvert!

https://www.agendaculturel.com/article/joumana-jamhouri-etait-a-paris-photo

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