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À ceux qui se demandent quand le taux de change du dollar bancaire sera relevé, il devient clair que la réponse n’est pas demain la veille. L’énigme est totale. Les causes en sont multiples.

Le gouvernement, la Banque du Liban et le ministère des Finances continuent de se passer la patate chaude au grand dam des déposants.

Aucune de ces entités ne souhaite assumer la responsabilité d’un relèvement du taux de change du dollar bancaire, connu sous le nom de "lollar" en raison de ses possibles retombées sur le marché de change.

Désormais, tout le monde sait qu’une augmentation de la masse monétaire en circulation en livres entraînerait une nouvelle fois une forte demande sur le billet vert. D’autant que le gouvernement n’a pas exprimé jusqu’à ce jour une quelconque intention de procéder à des réformes simples ou structurelles pour assainir une économie sous perfusion, depuis plus de quatre ans.

Parallèlement, les déposants se trouvent pris en tenaille entre les attentes contradictoires des trois acteurs institutionnels. Une grande partie d’entre eux ont besoin de retirer des sommes d’argent pour subvenir à leurs besoins élémentaires, étant donné, entre autres, l’inflation à trois chiffres que connaît le pays.

La circulaire 151

Dans ce contexte, on rappelle que les effets de la circulaire 151 de la Banque du Liban (BDL) ont bel et bien pris fin le 31 décembre 2023.

Cette circulaire, qui fixe les mesures exceptionnelles de retrait à partir des comptes bancaires en devises, prévoyait que la BDL achète des lollars des banques commerciales sur la base d’un dollar bancaire à 15.000 livres pour une somme maximale de 1.600 lollars par compte et par mois et ce jusqu’au 31 décembre 2023. Des dispositions qui permettaient aux établissements de crédit de procéder à la lirification de ce montant pour chaque titulaire de compte qui le désirait.

Aujourd’hui, en l’absence d’un renouvellement ou d’un amendement de la circulaire 151, la marge de manoeuvre des banques est quasiment nulle. Où pourraient-elles vendre leurs lollars et à quels prix, si la Banque centrale refuse de les acheter au taux de 15.000 livres pour un lollar?

Ce qui explique en partie l’arrêt total par certains établissements financiers et l’arrêt partiel par d’autres de la conversion des lollars en livres. Ces derniers se contentent d’autoriser des retraits en lollars sur base d’un dollar bancaire à 15.000 livres pour ceux parmi leur clientèle qui en ont urgemment besoin.   

La circulaire 166 compromise

Par ailleurs, la non-décision relative au relèvement du taux du dollar bancaire compromet la mise en œuvre de la circulaire 166 de la BDL. Celle-ci, rappelle-t-on, autorise les titulaires de comptes bancaires en devises, arrêtés après la date du 31 octobre 2019, à retirer 150 dollars par mois et par compte. Une somme, qui ne représente que le coût des rations alimentaires pour un citoyen misérable, selon les propos du gouverneur par intérim Wassim Mansouri. Cette circulaire est donc incomplète. Elle nécessiterait un complément de détails sur le montant en lollars que le titulaire d’un tel compte est autorisé à retirer en plus des 150 dollars frais et surtout à quel taux de change.

Que dit la Loi?

En réponse à une question, récemment, le Premier ministre sortant, Najib Mikati, avait indiqué que la décision est entre les mains du ministre sortant des Finances, Youssef el-Khalil. Quant à ce dernier, il affirme avoir transmis les documents requis dans cette affaire à la BDL. À la Banque centrale, c’est un silence de mort. Le vice-gouverneur de la BDL aurait enjoint aux différents départements de se montrer discrets sur la question.

De sources juridiques interrogées par Ici Beyrouth, on estime qu’il appartient au Parlement de voter une loi sur le contrôle des capitaux. Une telle loi pourrait permettre de définir les montants autorisés à être retirés et par conséquent la possibilité de fixer l’augmentation du taux de change du dollar bancaire.

D’autres sources ont souligné que sur base de l’article 297 du Code de la monnaie et du crédit, c’est le ministre des Finances qui serait l’autorité de référence sur la question, en coordination avec la Banque du Liban.

Entretemps, les rumeurs circulent sur un taux du dollar bancaire à 25.000 ou 30.000 livres, mais aucune autorité monétaire ne se montre disposée à donner le moindre indice à ce sujet.