Un expert du dossier des réfugiés syriens, contacté par "Ici Beyrouth", n’exclut pas la possibilité d’une "répartition des rôles" entre le président de la République, Michel Aoun, et le Premier ministre sortant, Najib Mikati, alors que se poursuit la dispute sur les prérogatives entre le ministre sortant des Déplacés, Issam Charafeddine, et le comité ministériel chargé du dossier des réfugiés.

La dispute sur les prérogatives se poursuit entre le ministre sortant des Déplacés, Issam Charafeddine, et le comité ministériel chargé du dossier des réfugiés syriens, après la visite du premier à Damas où il a fait part d’un plan de rapatriement des réfugiés, parrainé par le chef de l’État, Michel Aoun. Cette visite n’aurait pas été autorisée par le comité en question, présidé par le Premier ministre sortant Najib Mikati, comme l’a laissé entendre le ministre sortant des Affaires sociales, Hector Hajjar, lors d’un point de presse jeudi au Grand Sérail, à l’issue de la réunion du comité ministériel en question, à laquelle M. Charafeddine s’est abstenu de prendre part.

Pour rappel, le comité comprend, outre M. Mikati, les ministres sortants de l’Intérieur, de la Défense, des Affaires étrangères, des Affaires sociales et du Travail et le vice-Premier ministre Saadé Chami.

"Il a été confirmé que le ministère des Affaires sociales est la partie chargée de suivre le dossier, en coordination avec le ministère des Affaires étrangères (…)", a déclaré M. Hajjar, soulignant que "ce dossier nécessite une approche collective à l’échelle du comité ministériel". "Personne ne peut entreprendre des démarches individuelles, parce qu’elles représentent un danger pour la stabilité du Liban et sa situation par rapport aux autres pays (la communauté internationale, NDLR)", a-t-il ajouté, sans toutefois exclure que "les décisions prises à Baabda ont été retenues (par le comité) pour être exécutées".

"Mikati m’a félicité puis ne m’a plus répondu"

Issam Charafeddine a, en revanche, précisé que le plan de rapatriement a bel et bien été examiné et approuvé par le comité ministériel. Dans une interview à Radio Liban libre vendredi, le ministre sortant, proche de l’ancien député druze pro-Assad, Talal Arslane, a affirmé que "le plan a été approuvé à l’unanimité lors de la réunion du comité en date du 10 mars", avant que "le président de la République n’intervienne sur le dossier en avril et (lui) en confie officiellement le suivi auprès de l’État syrien".

"Le Premier ministre sortant m’a contacté pour me féliciter pour le plan et pour ce que j’ai accompli, mais j’ai été surpris quelques jours plus tard, par le fait qu’il s’abstenait de prendre mes appels, même à travers le directeur de son bureau, a-t-il poursuivi. Je lui ai alors adressé une demande écrite déposée au secrétariat général du Grand Sérail, précisant avoir demandé rendez-vous aux autorités syriennes (pour suivre le dossier des réfugiés, NDLR) dont j’entends l’informer". M. Charafeddine a en outre précisé que son différend n’est pas tant avec Hector Hajjar qu’avec Najib Mikati.

Et de conclure sur cette question: "Si Najib Mikati a été informé de données nouvelles, ou s’il a un agenda et qu’il reçoit des instructions, c’est son problème."

Les Syriens dans les geôles libanaises

Un expert du dossier contacté par Ici Beyrouth n’exclut pas la possibilité d’une "répartition des rôles" entre le président de la République et le Premier ministre sortant.

Le chef de l’État mènerait "une offensive populiste ultra-chrétienne avant la fin de son mandat", en se présentant en initiateur d’un plan pour le retour des réfugiés. Un plan dont la faisabilité et la légalité en dehors du cadre onusien est discutable, d’autant qu’il se fonde sur une prétendue volonté du régime syrien, contredite dans les faits, d’assurer un retour sécurisé aux Syriens.

Le Premier ministre sortant aurait quant à lui compris qu’il ne pouvait se mettre à dos la communauté internationale, selon l’expert précité. Il aurait dès lors plus à gagner, surtout au niveau de sa base communautaire sunnite, en s’opposant à un dialogue direct avec Damas pour le retour. Cela ne l’a pas empêché de charger le ministère de l’Intérieur, via le comité ministériel, d’une mesure controversée que les précédents comités chargés du dossier ont toujours choisi d’écarter: la déportation des Syriens détenus dans les geôles libanaises, y compris ceux qui font partie des opposants au régime. Une démarche souhaitée par Damas et qui équivaudrait à "renvoyer une victime à son bourreau", fait remarquer l’expert, qui reste néanmoins dubitatif quant à la disposition du ministre de l’Intérieur sortant à exécuter une telle démarche.

En somme, autant Michel Aoun que Najib Mikati feraient de la surenchère au niveau de leurs communautés respectives pour s’assurer une légitimité, conclut l’expert.

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