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À l’aune de l’exacerbation du conflit sur le front sud et de l’intensification des frappes israéliennes sur Gaza, le débat autour d’une stratégie nationale de défense au Liban reprend de l’importance, après avoir été relégué au second plan ces dernières années – du fait de plusieurs facteurs, notamment le nouvel équilibre de force sur le plan local, la fébrilité profonde des équilibres internes traditionnels, ainsi que le dysfonctionnement des institutions et la perturbation de leurs activités. Ce qui se traduit par une quasi-absence de dialogue entre des Libanais, ayant perpétué leurs dissensions historiques, faisant fi des changements régionaux et internationaux.

Connaissant l’aversion profonde d’Israël envers le Liban – depuis bien des décennies – il est question, maintenant plus que jamais, d’accélérer le cessez-le-feu et d’épargner au Liban toute participation à un conflit régional dont les conséquences seraient dévastatrices pour sa sécurité et son économie. S’en sortir ne serait pas de toute aisance, au vu de la froideur caractéristique des relations actuelles entre le Liban et les pays arabes, voire le désintéressement de ces derniers à son égard, à l’exception de quelques initiatives politiques insuffisantes concernant, entre autres, le dossier présidentiel.

Quoi qu’il en soit, que le Liban s’implique dans cette guerre ou non, les opérations militaires cesseront, le jour de paix viendra et l’étau se desserrera. Des négociations sont actuellement entreprises à cette fin, étant donné que les deux camps se sont engagés dans des escarmouches qui pourraient rapidement dégénérer en une guerre totale et incontrôlable.

Partant, il est impératif de trouver une sortie de crise politique et militaire en vue de protéger le Liban contre toute agression israélienne future, soit-elle terrestre, aérienne, ou maritime.

Cela dit, l’on ne peut ignorer l’accalmie relative qui a prévalu au Liban-Sud entre 1996 et 2006, puis entre 2006 et 2023. Il convient de mentionner, dans un premier temps, l’entente quadripartite d’avril 1996 incluant alors le Liban, Israël, la France et les États-Unis. Celle-ci a été signée le lendemain de la guerre menée par Israël contre le Liban à l’époque. Naturellement, l’entente en question a été approuvée par la Syrie qui avait placé le Liban sous sa tutelle en 1991, après la deuxième guerre du Golfe.

L’accord prévoyait les dispositions suivantes: "Les groupes armés opérant au Liban ne lanceront pas de roquettes Katioucha ou autres missiles sur le territoire israélien." La deuxième clause précisait qu’"Israël et ses alliés n’utiliseront aucune arme contre des cibles civiles au Liban". Cet accord a été respecté pendant dix ans, jusqu’au jour où la guerre de juillet 2006 a éclaté, donnant lieu à la résolution 1701.

Cependant, les avis sont mitigés quant à cette résolution. D’aucuns pensent que cette dernière a été garante de stabilité au Liban-Sud, permettant par conséquent une réduction des tensions pendant de longues années. D’autres demeurent convaincus que les armes du Hezbollah ont imposé ce qu’on appelle "l’équilibre de la terreur", empêchant toute escalade militaire sur plusieurs années, jusqu’au jour où l’opération Déluge d’Al-Aqsa a été lancée, le 7 octobre dernier.

Les deux analyses sont peut-être plausibles, dans la mesure où les deux facteurs ont garanti la stabilité au Liban-Sud. Mais, cette même stabilité aurait-elle été assurée par un seul de ces deux facteurs, sans l’autre? Il ne fait aucun doute qu’Israël prétextera le conflit sur le front nord pour imposer un nouveau fait accompli et ignorer la résolution 1701 – même si l’État hébreu enfreint déjà, quotidiennement, cette résolution, sans que ces actes ne dégénèrent nécessairement en un affrontement militaire direct.

Les pourparlers entre le Liban et Israël – à l’heure où le conflit régional s’exacerbe du fait des interceptions des navires israéliens en mer Rouge et des frappes américano-britanniques au Yémen qui présagent une escalade sans précédent –  risquent de ne pas apporter les résultats escomptés. Dans ce contexte, comment serait-ce possible pour le Liban de réaliser des exploits diplomatiques par le biais des négociations, soient-elles indirectes avec Israël, alors que le sang des habitants de Gaza ne cesse de couler depuis plus de trois mois?

La même problématique s’applique également en ce qui concerne la stratégie de défense à adopter au Liban. Le pays du Cèdre devrait seul décider de la stratégie de défense de son territoire, à l’instar de tous les autres pays du monde.

Ces objectifs cruciaux doivent être réalisés dans le cadre d’une entente régionale globale, sinon les guerres intestines reprendront de plus belle, avec des retombées considérables. Il ne sera pas facile d’élaborer une stratégie de défense, mais il faut tout de même trouver le moment opportun pour le faire.

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