Les États-Unis ont mis fin jeudi au rêve d’adhésion pleine et entière des Palestiniens à l’ONU, mettant sans surprise leur veto au Conseil de sécurité à une revendication rejetée par leur allié israélien, en pleine guerre à Gaza.

Depuis plusieurs semaines, les Palestiniens, qui ont depuis 2012 le statut inférieur "d’État non membre observateur", ainsi que les pays arabes, imploraient le Conseil d’accepter qu’un "État palestinien" déjà reconnu par la majorité des capitales prenne sa place "légitime" au sein des Nations unies.

En vain. Les États-Unis, qui ont tout fait pour retarder le vote, n’ont pas hésité à recourir à leur droit de veto qu’ils utilisent régulièrement pour protéger leur allié israélien.

Une décision immédiatement dénoncée par l’Autorité palestinienne y voyant une "agression flagrante" qui pousse le Moyen-Orient "au bord du gouffre".

Ce rejet "ne brisera pas notre volonté, ne stoppera pas notre détermination. Nous n’arrêterons pas nos efforts. L’État de Palestine est inévitable, il est réel", a de son côté lancé en pleurs l’ambassadeur palestinien à l’ONU, Riyad Mansour.

"N’oubliez pas que quand cette session sera ajournée, en Palestine des innocents continueront à payer de leur vie et de la vie de leurs enfants le prix des actions israéliennes, (…), le prix d’un retard de la justice, de la liberté et de la paix", a-t-il déploré lors d’un discours qui a provoqué des larmes dans la salle du Conseil.

Le projet de résolution présenté par l’Algérie qui recommandait l’adhésion palestinienne a recueilli 12 votes pour, 1 contre et 2 abstentions (Royaume-Uni et Suisse).

Le Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, a, lui aussi, condamné le veto américain, assurant que le peuple palestinien poursuivrait "sa lutte jusqu’à l’établissement (…) d’un État palestinien indépendant et pleinement souverain avec Jérusalem pour capitale".

Mais malgré ce veto, le soutien "écrasant" des membres du Conseil "envoie un message très clair : l’État de Palestine mérite sa place" à l’ONU, a lancé l’ambassadeur algérien Amar Bendjama, promettant au nom du groupe arabe de présenter à nouveau cette requête ultérieurement. "Oui, nous reviendrons, plus forts et plus bruyants".

L’admission d’un État à l’ONU doit recevoir une recommandation positive du Conseil (au moins 9 voix sur 15 en faveur, sans veto d’un membre permanent), puis être approuvée par l’Assemblée générale, à la majorité des deux tiers.

Les États-Unis n’ont cessé de répéter que leur position "n’a pas changé" depuis 2011, lorsque la demande d’adhésion présentée par le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas avait tourné court avant même d’atteindre l’étape du Conseil.

"Actions prématurées"

"Ce vote ne reflète pas une opposition à un État palestinien, mais est une reconnaissance qu’il ne peut naître que de négociations directes entre les parties", a justifié l’ambassadeur américain adjoint Robert Wood, regrettant des "actions prématurées ici à New York, même avec les meilleures intentions".

Les États-Unis ont également mis en avant la législation américaine qui leur imposerait de couper leur financement à l’ONU en cas d’une adhésion palestinienne en dehors d’un tel accord bilatéral entre Israël et les Palestiniens.

Le dernier veto à l’adhésion d’un État à l’ONU date de 1976, quand les Américains avaient bloqué l’entrée du Vietnam.

Les Israéliens dénonçaient également avec virulence l’initiative palestinienne, fustigeant le simple fait que le Conseil l’examine. Et son rejet ne les a pas satisfaits, leur ambassadeur à l’ONU, Gilad Erdan, dénonçant les pays l’ayant soutenu.

"Parler à ce Conseil est comme parler à un mur", a-t-il lancé, estimant que ces voix favorables allaient encourager les Palestiniens à ne pas revenir à la table des négociations et "rendre la paix presque impossible".

Le gouvernement israélien s’oppose à la solution à deux États, défendue par une grande majorité de la communauté internationale, dont les États-Unis.

La majorité des 193 États membres de l’ONU (140 selon le décompte de l’Autorité palestinienne) reconnaissent de manière unilatérale un État palestinien.

Amélie Bottollier-Depois, avec AFP