La gauche française fait sa rentrée politique en ordre dispersé cette semaine, avec les universités d’été des différents partis marquées par la candidature de Lucie Castets pour Matignon et la menace de destitution d’Emmanuel Macron brandie par La France insoumise, une initiative qui divise au sein de l’alliance.

En ordre dispersé, la gauche effectue cette semaine sa rentrée politique avec les universités d’été des Insoumis, des communistes et des Écologistes, autant d’événements marqués par l’attente de la nomination d’un nouveau Premier ministre et la menace brandie par LFI de destituer Emmanuel Macron.

La candidate du Nouveau Front populaire (NFP) pour Matignon, Lucie Castets, sera la star de ces rendez-vous. Elle s’exprimera jeudi soir à Tours chez les Écologistes aux côtés de Marine Tondelier, vendredi soir à Montpellier avec Fabien Roussel pour les communistes et samedi près de Valence avec Manuel Bompard pour les Insoumis.

Elle apparaîtra le week-end suivant à Blois au rassemblement des socialistes.

Vendredi soir, avec Fabien Roussel, elle pourra revenir sur la rencontre plus tôt dans la journée avec Emmanuel Macron.

Le président convie en effet le 23 août à l’Élysée les différents chefs de partis et de groupes parlementaires pour des consultations, en vue d’enfin nommer un gouvernement, plus d’un mois après la démission de celui de Gabriel Attal.

Le NFP se rendra groupé à cette invitation et accompagné de Lucie Castets, son choix pour la primature, dont l’Élysée a accepté la présence bien qu’elle ne soit ni parlementaire ni responsable de parti.

Mais cette unité pourra-t-elle résister aux fissures résurgentes?

Les Insoumis, toujours friands d’actions radicales, ont lancé un pavé dans la mare en brandissant l’article 68 de la Constitution qui permet, en cas de vote par les deux tiers des deux chambres du Parlement, de destituer le président en cas de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat".

Même si une telle procédure n’a qu’une chance infime d’aboutir, LFI, qui dénonce un "coup de force institutionnel contre la démocratie" d’Emmanuel Macron, entend lui mettre la pression pour le forcer à nommer Lucie Castets à Matignon.

Mais encore une fois, la méthode isole le mouvement de gauche radicale au sein de la gauche.

"Rajouter du bordel"

Écologistes, communistes et socialistes ont manifesté des sentiments allant du simple désaccord à la franche désapprobation.

"Est-ce que c’est grave qu’ils l’aient fait? Non. Est-ce que c’est notre position? Non plus", a ainsi expliqué Marine Tondelier, reconnaissant qu’elle s’en serait "bien passée".

"Ce n’est pas notre stratégie, la destitution n’est pas du tout à l’ordre du jour", a appuyé le porte-parole du PCF Léon Deffontaines.

Du côté du PS, "nous ne soutenons en aucun cas cette initiative", a affirmé mardi sur BFM Business le député Philippe Brun, qui n’entrevoit "aucune chance d’obtenir la destitution" et déplore "un effet de communication".

"On parle d’un coup de pression au président (…) c’est plutôt un coup d’épée dans l’eau", a même raillé sur Europe1 le sénateur socialiste Rémi Cardon, jugeant que la proposition des Insoumis venait "rajouter du bordel au bordel".

Au sein du parti à la rose, les courants minoritaires de Nicolas Mayer-Rossignol et Hélène Geoffroy, déjà hostiles à l’alliance avec LFI au sein du NFP, ont demandé la tenue d’un bureau national avant la rencontre avec le chef de l’État.

Lucie Castets elle-même a évacué le sujet en déclarant: "Mon sujet ce n’est pas la destitution, c’est la cohabitation".

Pas de quoi faire flancher le coordinateur national de LFI Manuel Bompard, qui a assuré que la destitution du président restait une "possibilité crédible".

À condition de rallier d’autres partis. "Nous entamons un travail de conviction", a assuré la députée Aurélie Trouvé sur RFI, estimant que "si on veut être cohérents, il faudra déposer une motion de censure, mais aussi s’attaquer au premier responsable de cette situation".

Une position qui n’effraie pas dans l’exécutif, où l’on fustige des "propositions farfelues" de gens qui "n’arrivent même pas à se mettre d’accord sur la destitution".

Il convient donc pour les émissaires envoyés par chaque parti dans les universités d’été des autres formations du NFP d’afficher une façade d’unité.

L’année dernière, la gauche, qui se préparait aux élections européennes, avait étalé ses divergences de fond lors des universités, qui avaient été aussi agitées par la polémique créée par la présence du rappeur Médine chez EELV. Cette année, les Écologistes ont choisi d’inviter un artiste moins controversé: le comédien Thomas VDB.

Du côté de l’extrême droite, le RN se prépare à une nouvelle dissolution

Une "nouvelle dissolution" de l’Assemblée est "la seule issue politique possible" pour sortir la France de "l’état de paralysie" auquel conduit le résultat des élections législatives, a affirmé mardi la députée RN Edwige Diaz.

"Nous sommes d’ores et déjà en train de préparer ces nouvelles élections", a indiqué sur Franceinfo la vice-présidente du parti d’extrême droite, troisième bloc à l’Assemblée derrière la gauche et les macronistes. Mais aucun camp ne disposant de la majorité absolue, "quel que soit le Premier ministre nommé, il sera bloqué" et "dans tous les cas la France sera en état de paralysie", a prédit l’élue de Gironde, estimant qu’une "grande coalition qui pourrait aller du PS aux Républicains" ne "tiendra(it) pas parce qu’ils ont des objectifs différents".

"Je le dis à Emmanuel Macron: il faut qu’il procède à une nouvelle dissolution", a-t-elle martelé, mais la Constitution impose d’attendre jusqu’à l’été 2025. Pendant cette "année de paralysie", elle a suggéré de "redonner la parole au peuple" en organisant des référendums, notamment sur l’immigration.

Les deux leaders du RN vont sans doute rappeler au chef de l’État que leur parti "dispose d’un groupe puissant" à l’Assemblée, que l’on "ne pourra pas ignorer", car ses députés sont "assez nombreux pour déposer des motions de censure", voire "pour faire adopter" celles qui émaneraient d’autres groupes.

Par Léo MOUREN, AFP

 

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