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En temps de guerre, la langue du pouvoir prend le dessus. Le grognement de l’artillerie remplit les zones de conflit et provoque peur et dévastation. Alors, s’ajoute aux confrontations physiques la "propagande psychologique", une bataille qui ne fait pas de morts. L’impact de cette guerre psychologique égale celui de la violence de la guerre conventionnelle. Son spectre hante civils et militaires à parts égales.

"Une guerre en soi"

Selon le journaliste et politologue Ali Hamadé, "la guerre psychologique n’est pas qu’une prémice de la guerre; elle s’étend à la période d’après-guerre".

"Essentiellement, elle jette les fondements de la guerre en façonnant la mentalité de l’opinion publique, au sein du pays ou entre les parties au conflit, allant même jusqu’à l’ennemi", explique-t-il lors d’un entretien avec Ici Beyrouth.

M. Hamadé souligne que lors d’un conflit, la guerre psychologique joue un rôle majeur quant à la mésinformation et la peur suscitée chez tout un chacun. Elle intensifie l’effort de guerre en glorifiant la victoire d’une armée, tout en dramatisant les revers et la déliquescence des forces ennemies.

Le journaliste et politologue libanais a ajouté que la guerre psychologique se poursuit même après la fin des hostilités et s’attaque au moral de l’ennemi, en mettant en exergue ses faiblesses et ses pertes et en biaisant l’interprétation des lectures d’après-guerre.

"La guerre psychologique n’est pas qu’un simple élément de la guerre – il s’agit de la guerre elle-même", affirme M. Hamadé.

Impact et objectifs

Le général retraité Maroun Hitti décrit l’impact considérable de la guerre psychologique, tout en soulignant que dans le contexte actuel, celle-ci doit être accompagnée d’une bonne communication stratégique. "Les effets de la guerre psychologique sont dévastateurs, surtout quand le mensonge entre en jeu. Mais ces effets-là sont limités; l’impact est réduit une fois que la source de cette guerre est dévoilée et que les gens perçoivent les limites de sa crédibilité. Entre-temps, l’ennemi gagne un temps précieux, ce qui constitue un des premiers objectifs d’une guerre de ce type", explique le général Hitti dans un entretien avec Ici Beyrouth.

D’après lui, un des rôles clés de la guerre psychologique est de véhiculer un message à sens unique, souvent sans interlocuteur, rendant la communication plus puissante et difficile à contrer. Et le général Hitti d’ajouter qu’au vu des objectifs divergents des parties impliquées (Israël et le Hezbollah, dans ce cas), la guerre psychologique n’est pas susceptible, à elle seule, de mettre fin au conflit. "À l’heure actuelle, les objectifs du Hezbollah et d’Israël sont incompatibles. Par conséquent, cette guerre psychologique, ou plutôt ce ‘jeu d’attente psychologique’, comme l’a décrit le secrétaire général du Hezb, Hassan Nasrallah, n’a aucune autre finalité que d’adresser un message à son propre public, d’influencer son propre public, non pas Israël", clarifie-t-il.

Le général Hitti a poursuivi en disant que la soi-disant guerre psychologique de M. Nasrallah s’est heurtée à une "surenchère psychologique" initiée par le camp adverse. "Quand un camp devient conscient du fait que son ennemi mène une opération de nature psychologique, l’impact de l’opération en question est réduit. Son efficacité est donc nullifiée. Mais si, par exemple, à 6h38 du matin, l’aviation israélienne venait à franchir le mur du son à basse altitude au-dessus de la banlieue sud de Beyrouth, l’effet de surprise d’un événement pareil aurait un impact comparable à celui de la guerre psychologique."

Le général Hitti conclut en soulignant l’importance du rôle des éléments auditifs et visuels dans les guerres modernes, rappelant à l’esprit les anciens guerriers qui inspiraient la terreur en portant des masques effrayants et en criant à l’unisson.

Au Liban, la guerre psychologique provoque une peur et une panique intenses chez les habitants, notamment les enfants. Les bangs soniques entendus à Beyrouth, dans le Metn et dans le sud présagent la menace de frappes de la part d’Israël, de l’Iran ou de ses proxys. Le cauchemar se réalise, semble-t-il.

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