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L’aéroport international de Beyrouth-Rafic Hariri étant le seul aéroport opérationnel au Liban, le besoin urgent d’un deuxième aéroport se fait cruellement sentir. Le Liban est sur le point de vivre une guerre totale, alimentée par le conflit à Gaza et les escarmouches transfrontalières entre le Hezbollah et l’armée israélienne. Si les négociations de Doha prévues demain échouent à prévenir un conflit plus large au Moyen-Orient, la création d’un autre aéroport, stratégiquement éloigné des bastions du Hezbollah, est d’autant plus essentielle. Qu’est-ce qui empêche l’ouverture d’un nouvel aéroport au Liban?

L’obstacle principal

Majd Harb, avocat libanais et activiste politique, estime que l’obstacle principal à la création d’un nouvel aéroport au Liban est d’ordre politique. Dans un entretien accordé à Ici Beyrouth, Harb explique que, bien que les membres du Parlement et les ministres aient publiquement exprimé leur soutien au projet, des obstacles significatifs concernant l’exécution subsistent. "Le principal couac réside dans l’acceptation de ‘l’État au sein de l’État’", a-t-il déclaré.

Et d’ajouter: "Ce que nous proposons, c’est une loi qui obligerait techniquement les députés à mettre leurs paroles à exécution". L’approche de Harb consiste à surmonter cet obstacle en proposant un cadre juridique adéquat pour transformer des aéroports militaires en aéroports civils moyennant un coût minimal.

Harb a critiqué les prétextes anticipés qui pourraient être invoqués pour bloquer l’initiative, tels que des problèmes législatifs, l’absence d’un président, un manque de fonds ou un mauvais timing. "Le véritable test se joue ici et maintenant", a-t-il affirmé. "Toutes ces excuses peuvent être réfutées par la validité juridique et constitutionnelle du projet de loi que nous avons présenté lors de la conférence de presse".

Il a également évoqué les défis actuels liés au financement du projet de développement de l’aéroport, en soulignant que la loi sur le partenariat public-privé (PPP), qui facilite le modèle de construction-exploitation-transfert (BOT), n’est actuellement pas réalisable. Les obstacles incluent également des engagements gouvernementaux non tenus et des mesures politiques non décidées.

Harb souligne que si le gouvernement agit efficacement, le modèle BOT pourrait permettre la construction et l’exploitation d’aéroports sans frais. Des projets BOT réussis dans des pays comme la Turquie, la Jordanie, le Japon et la Malaisie démontrent le potentiel de cette approche. Cependant, en raison de l’inaction du gouvernement dans la mise en œuvre de la loi PPP, le projet reste bloqué.

En guise de solution, Harb a proposé de rechercher une ligne de crédit auprès de la Banque centrale pour financer le projet. Des discussions sont en cours avec les parlementaires pour rédiger et proposer la législation nécessaire, en attendant leurs recommandations et leur approbation.

Contrôle centralisé

De son côté, Elias Hankach, député des Kataeb, a affirmé que le Hezbollah est le principal obstacle à l’ouverture d’un autre aéroport au Liban. "La totalité de son contrôle est centralisée dans un seul aéroport (l’aéroport international Rafic Hariri), à partir duquel il gère tout et exerce un contrôle sur les données et les manifestes des passagers, ce qui lui accorde un pouvoir total", a-t-il déclaré dans un entretien accordé à Ici Beyrouth.

Compte tenu de ce niveau de contrôle, Hankach a émis des réserves concernant la volonté du Hezbollah d’accepter l’ouverture d’un autre aéroport.

Il a souligné l’urgence d’avoir un deuxième aéroport, surtout en ces temps difficiles, en signalant qu’"il existe déjà un aéroport prêt à l’emploi — l’aéroport de Hamat, situé dans les hauteurs de Batroun, actuellement utilisé par l’armée libanaise, l’ambassade des États-Unis et d’autres". Il a précisé que l’aéroport est bien équipé et qu’il ne nécessite qu’un entretien minimal pour accueillir des vols civils.

Pour renforcer ses propos, Hankach a cité l’exemple du nouvel aéroport construit à Addis-Abeba, en Éthiopie, qui a coûté 6 milliards de dollars et peut accueillir 100 millions de passagers. "Pendant ce temps, au Liban, entre 70 et 80 milliards de dollars de dépôts libanais sont gaspillés", a-t-il déploré.

Hankach a également souligné que le coût pour rendre l’aéroport de Hamat pleinement opérationnel serait relativement faible, "d’autant plus qu’il est déjà à moitié équipé, avec une piste fonctionnelle et un emplacement est à la fois stratégique et sécurisé".

Tajaddod donne son accord

Il s’agit de noter que le bloc parlementaire du Renouveau (Tajaddod) a signé, mercredi, un projet de loi proposé par Majd Harb pour l’exploitation de l’aéroport de Kleiat. Le député Michel Moawad a souligné l’urgence de la création d’un autre aéroport au Liban pour améliorer la sécurité aérienne, stimuler l’économie et promouvoir un développement équilibré. Il a critiqué le gouvernement qui ne remplit pas ses devoirs et a appelé à l’allocation de fonds pour étudier et ouvrir d’autres aéroports. Plusieurs autres députés se réuniront lundi pour discuter de cette question, considérée cruciale en cette période critique.