Il s’agit d’un nouveau coup porté à la chaîne qatarie par l’Etat hébreu, après son interdiction sur le territoire israélien.

La chaîne de télévision qatarie Al Jazeera a annoncé que des soldats israéliens armés et masqués avaient effectué dimanche une descente dans ses bureaux de Ramallah, en Cisjordanie occupée, et émis un ordre de fermeture de 45 jours.

Il s’agit d’un nouvel épisode du conflit de longue date entre la chaîne et le gouvernement du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, qui s’est aggravé au cours de la guerre dans la bande de Gaza depuis bientôt un an entre Israël et le Hamas.

"Agents terroristes"

L’armée israélienne a accusé à plusieurs reprises les journalistes de la chaîne qatarie d’être des "agents terroristes" à Gaza, affiliés au Hamas, auteur d’une attaque sans précédent le 7 octobre en Israël qui a déclenché la guerre.

Quatre membres du personnel d’Al Jazeera ont été tués depuis le début de la guerre à Gaza. Al Jazeera nie les accusations d’Israël et l’accuse de prendre systématiquement pour cible ses employés dans la bande de Gaza.

La chaîne a déclaré que les soldats qui ont fait irruption dans ses bureaux dimanche n’avaient pas donné le motif de la fermeture: "Il y a une décision de justice pour fermer Al Jazeera pendant 45 jours", a déclaré un soldat israélien au chef du bureau, Walid al-Omari.

"Je vous demande de prendre toutes vos caméras et de quitter le bureau tout de suite", a poursuivi le soldat, selon des images de la chaîne.

Walid al-Omari a ajouté qu’Al Jazeera était accusée dans l’ordre de fermeture d’"inciter et de soutenir le terrorisme", selon ses propos rapportés par la chaîne.

Contactée par l’AFP, l’armée israélienne n’a pas réagi dans l’immédiat.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères a condamné dimanche l’opération israélienne, dénonçant une "violation flagrante" de la liberté de la presse.

"Perturber le travail des médias"

La fermeture du bureau d’Al Jazeera "confirme les efforts de l’occupation (Israël, ndlr) pour perturber le travail des médias diffusant (des informations sur) des violations de l’occupation contre le peuple palestinien", a déclaré à l’AFP Mohammed Abu al-Rub, directeur du bureau des médias du gouvernement de l’Autorité palestinienne.

Le 12 septembre, le gouvernement israélien avait annoncé la révocation des cartes de presse de plusieurs journalistes d’Al Jazeera, quatre mois après avoir interdit sa diffusion et ordonné la fermeture de son bureau en Israël, le 5 mai.

Ces initiatives ont été prises en application d’une loi adoptée début avril par le Parlement israélien, autorisant de prendre des mesures contre des médias étrangers "portant atteinte à la sécurité de l’État".

Les fermetures de 45 jours sont renouvelables et la mise à l’arrêt d’Al Jazeera en Israël a été prolongée une quatrième fois, le 11 septembre, par un tribunal de Tel-Aviv.

Cette interdiction n’avait pas affecté jusque-là le travail de la chaîne en Cisjordanie ou dans la bande de Gaza, où les journalistes d’Al Jazeera sont présents pour couvrir la guerre entre Israël et le Hamas.

L’armée israélienne a accusé à plusieurs reprises des journalistes qataris présents à Gaza d’être des "agents terroristes" affiliés au Hamas ou au Jihad islamique, l’un de ses alliés.

"Pas une surprise"

De son côté, Al Jazeera rejette les accusations israéliennes et affirme qu’Israël cible systématiquement ses reporters déployés dans la bande de Gaza.

La fermeture du bureau de Ramallah "n’est pas une surprise", selon la correspondante d’Al Jazeera Nida Ibrahim, citée par la chaîne. "Nous avions entendu des responsables israéliens menacer le bureau de fermeture (…), mais nous ne nous attendions pas à ce que cela se produise aujourd’hui", a-t-elle ajouté.

Le service de presse du gouvernement à Gaza, dirigé par le Hamas, a condamné dimanche cette descente de l’armée israélienne, dénonçant un "scandale retentissant" et une "violation flagrante de la liberté de la presse".

En mai, Al Jazeera avait fustigé son interdiction d’opérer en Israël, dénonçant un "acte criminel" qui "viole le droit d’accès à l’information".

Hossam Ezzedine, avec AFP