Washington adopte un plan climat
Dimanche, le Sénat américain a adopté la grande loi climatique du président Joe Biden. Elle vise à réduire les émissions américaines de gaz à effet de serre de 40% d'ici à 2030. Les États-Unis, premier pays émetteur du monde, rejoignent les inquiétudes européennes sur le climat. La loi est également une réponse au retrait chinois de la coopération avec Washington sur le climat. Le texte devrait être définitivement adopté par le Congrès cette semaine.

Avec une loi climat à 370 milliards de dollars, les États-Unis ont rejoint l'Europe, avec des années de retard, pour donner l'exemple climatique aux autres grands pays pollueurs, se félicitent des experts, pointant néanmoins les limites du plan américain.

L'adoption dimanche soir au Sénat américain de la grande loi climatique du président Joe Biden, qui vise une réduction des émissions de gaz à effet de serre américaines de 40 % d'ici à 2030 par rapport à 2005, remet un peu plus les États-Unis, premier pays émetteur du monde, sur les rails de l'accord de Paris, dont s'était retiré son prédécesseur Donald Trump.

Elle vient contrebalancer le coup de froid jeté par la Chine, deuxième émetteur mondial, vendredi, quand elle a annoncé le gel de sa coopération avec Washington sur le climat, en raison de la crise taïwanaise.

La loi climat adoptée au Sénat américain (AFP)

Le paquet américain est particulièrement pertinent pour l'Union européenne, en train de finaliser l'adoption de la "politique climatique la plus ambitieuse au monde", explique Michael Pahle, de l'Institut de recherche sur l'impact du changement climatique de Potsdam.

Or "la politique de l'UE ne peut réussir - économiquement et politiquement - que si les principaux émetteurs et partenaires commerciaux prennent des mesures similaires", dit-il à l'AFP.

Le texte américain devrait être définitivement adopté par le Congrès cette semaine. En répondant par ailleurs aux préoccupations sur l'inflation des carburants, il démontre la possibilité de légiférer sur le climat "en l'associant à des choses qui comptent vraiment pour les gens ordinaires", note Simon Lewis, de l'University College de Londres.

"Il est très important que la plus grande économie du monde investisse dans le climat avec un ensemble de mesures visant à créer des emplois et une nouvelle économie plus propre et plus verte", dit M. Lewis à l'AFP.
Législation "historique"

Le groupe de réflexion Rhodium Group estime que cette législation "historique" réduira les émissions américaines d'au moins 31 % d'ici 2040, par rapport à 2005, voire de 44 % si les conditions macroéconomiques sont favorables, notamment par un renchérissement accru des énergies fossiles et avec des renouvelables bon marché.

Discussion sur la loi climat au Sénat américain (AFP)


Selon Eric Beinhocker, de l'Institute of New Economic Thinking à l'Oxford Martin School, la loi américaine, qui favorise l'achat de panneaux solaires et l'acquisition de voitures électriques, va conduire à une "augmentation massive" des technologies propres et faire baisser le coût des énergies renouvelables - avec des conséquences mondiales.

Un échec du plan, adopté après 18 mois de difficiles négociations, aurait constitué un "revers majeur pour la viabilité de l'accord de Paris", selon M. Pahle.

L'accord international sur le climat, signé en 2015, enjoint les nations à limiter l'augmentation de la température mondiale à un niveau "bien inférieur" à 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et si possible de 1,5°C. Le monde en est déjà à près de 1,2°C.
Des "limites nombreuses"

Malgré ce satisfecit global, les experts ne se voilent pas la face sur les imperfections du plan américain.

Il inclut un coup de pouce aux gazoducs, "un pas en arrière", déplore Michael Mann, climatologue américain de renom.

"Les limites sont nombreuses", reconnaît aussi David Levaï, chercheur associé à l'Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), "mais c’est quand même un compromis historique" après les "désillusions" depuis l'arrivée au pouvoir de Joe Biden en 2021.

Incendie en Californie, une des conséquences du changement climatique (AFP)

"Certains espéraient que ce projet soit le cercueil et les clous sur le cercueil des énergies fossiles", dit-il à l'AFP. "Il n'y a finalement ni cercueil, ni clous, mais cette loi démontre finalement qu'une culture du compromis a quand même permis de mettre le climat au centre des politiques publiques et de faire passer un projet ambitieux," veut-il retenir.

Cependant, les efforts américains et européens, s'ils assoient leur crédibilité pour négocier avec le reste du monde, ne suffiront pas sans l'engagement des autres principaux émetteurs, en premier lieu Chine, Inde et Russie.

Seule une action à l'échelle mondiale permettrait de réaliser les réductions d'émissions nécessaires pour éviter les pires effets du réchauffement climatique, déjà "ressentis par chacun d'entre nous", rappelle de son côté, Radhika Khosla, de l'université d'Oxford.

Avec AFP
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