Depuis le dernier round d'affrontements entre Israël et le Hezbollah, en 2006, ce dernier s’est toujours vanté de son expérience acquise au fil des combats en Syrie et ailleurs, ainsi que de sa capacité à développer ses techniques militaires et à acquérir les dernières technologies balistiques, capables de renverser le rapport de force. La formation chiite, qui se voulait purement libanaise, avait été fondée pour être une «résistance», dont la mission principale était d’affronter Israël et de défendre le Liban. Mais le parti a vu plus grand lorsqu’il a décidé de mener ses équipées militaires ces dernières années, notamment avec le déclenchement de la guerre en Syrie. C’est alors qu’il a jugé bon de s'y rendre pour combattre ce qu'il a appelé les «Takfiris» (musulmans salafistes), prétendant les empêcher de pénétrer dans le territoire libanais.
Plus de 10 ans après le déclenchement du soulèvement en Syrie et avec la cessation des combats, la formation pro-iranienne cherche de nouveau de quoi justifier sa raison d’être. Particulièrement après le début de la crise financière et économique au Liban, qui a eu pour conséquence de ruiner les institutions étatiques et le prestige de l’État, et de révéler la dimension croissante de ce parti, qui est à deux doigts de couler le pays du Cèdre.
Le parti chiite n’a pas eu à chercher trop loin pour trouver un nouveau motif légitimant son existence. En effet, le dossier de la démarcation des frontières maritimes est arrivé à point nommé. Le Hezbollah compte bel et bien utiliser ce dossier crucial afin de rappeler à la population libanaise affamée, effondrée par la situation dans laquelle se débat le pays, qu’il est présent, puissant, et prêt à utiliser son arsenal pour «protéger le territoire et ses richesses».
Certes, le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, a annoncé à maintes reprises qu’il soutenait les positions de l'État sur ce dossier. Cela ne l’a pas pour autant empêché de s’inviter dans ce dossier crucial, sans crier gare. De ce fait, il a «déchargé» les autorités libanaises concernées du dossier, s’imposant comme unique négociateur pour la partie libanaise. Il se présente d’ailleurs comme un «joker puissant», que les Libanais doivent s’estimer chanceux d’avoir en mains, pour mieux exiger les intérêts du pays.
Alors que ces dernières semaines la possibilité d'une guerre était écartée avec la perspective d’un accord potentiel grâce à la médiation américaine dans ce dossier, le Hezbollah, quant à lui, a opté pour l’escalade, que ce soit à travers les positions de son secrétaire général, ou à travers des opérations symboliques limitées, telles que l'envoi de drones vers la zone maritime israélienne, démontrant qu’une guerre peut survenir à tout moment si l'une des deux parties est provoquée, ou si elle perçoit un intérêt à le faire. Or le Hezbollah veut-il vraiment une guerre ? Et qu’aurait-il concrètement à y gagner ?
Ceux qui ont attentivement écouté le dernier discours de Hassan Nasrallah à l’occasion de la commémoration de Achoura auront vite fait de comprendre que le sayyed prépare le peuple à l’éventualité d’une guerre. En effet, le chef de la formation pro-iranienne s’est adressé aux «djihadistes de la résistance islamique», en leur demandant de se tenir prêts pour parer à toute éventualité.
La réponse des djihadistes lui a été communiqué par message écrit dans lequel ils soulignent : «Notre doigt est sur la gâchette, et nous sommes fins prêts avec toute la puissance qu’on leur réserve. Nous sommes prêts à défendre les frontières de la souveraineté et les lignes de la dignité, que ce soit par voie maritime, terrestre, et là où ils s’y attendent le moins». Pour ceux qui ont suivi le dernier discours de Hassan Nasrallah, un petit rappel s’impose. Ce discours fait écho à celui que le sayyed a prononcé en juillet dernier lorsqu’il n'a pas hésité à mettre l'option d’une guerre sur la table en déclarant : «Nous refusons la guerre, mais nous ne la craignons pas non plus. Nous empêcherons l’extraction du pétrole et du gaz israéliens, si l’extraction des richesses gazières et pétrolières du Liban venaient à être bloquées, même si cela mène à une guerre», notant que «si une guerre venait à éclater, d’autres parties, en plus du Hezbollah, seront impliquées».
Les experts s'accordent à estimer à l'unanimité que le parti ne veut pas de guerre, mais désire plutôt maintenir le statu quo, qui a renforcé sa puissance et son rôle.
Le directeur du Centre d'analyse militaire du Moyen-Orient et du Golfe, « Enigma », Riad Kahwaji, affirme que «la dernière chose que désire le Hezbollah est de voir des milliers de citoyens de son propre environnement- du sud et de la Békaa - s’enfuir de chez eux en raison d’une guerre. En effet, peu importe le nombre de missiles que le parti possède, la force de frappe d’Israël, et l'ampleur de la destruction qu’elle peut engendrer, dépasseront de loin ses missiles». Dans une interview accordée à Ici Beyrouth, M. Kahwaji souligne que «lors des récents événements de Gaza, le Jihad islamique a lancé 1 000 missiles sur Israël».
«Un grand nombre d’entre eux ont été interceptés, indique M. Kahwaji, et les dégâts provoqués par ceux qui sont arrivés à destination sont restés limités, sans compter qu’aucune victime n’est à déplorer, côté israélien. En revanche, nous ne pouvons pas en dire autant de Gaza, au regard de l’ampleur des destructions et du nombre élevé de victimes palestiniennes. Et il en sera de même si une confrontation venait à avoir lieu avec le Hezbollah».
M. Kahwagi voit dans le discours de Hassan Nasrallah une volonté de «jouer sur la fibre sectaire, à un moment où l'Iran subi des pressions, allant de l'Irak au Liban». «Sans compter que la situation économique au Liban ne cesse de s’aggraver, de même que le fossé entre les Libanais», souligne-t-il. Le directeur du centre d'analyse militaire, souligne que «la commémoration de Achoura est le timing parfait choisi par le Hezbollah pour jouer sur la fibre sectaire et consolider le front interne en prévision de tout développement sur les scènes régionale et libanaise.
Sami Nader
De son côté, le directeur de l'Institut des affaires stratégiques du Moyen-Orient, Sami Nader, estime que le Hezbollah tient à garder le contrôle sur le cours des négociations, considérant que le parti chiite ne veut pas d'un accord sur la démarcation de la frontière maritime. Sur ce point, il déclare à Ici Beyrouth : «Le Hezbollah veut juste maintenir les règles de blocages. Il ne désire ni la guerre ni le règlement de ce dossier. Par ailleurs, il est conscient que ni lui, ni Téhéran ne pourront parvenir au règlement qu'ils souhaitent. De plus, ils ne pourront pas remporter une guerre vu l'équilibre des forces actuelles. Partant, nous constatons que le parti s’applique dans le blocage et la déstabilisation. Une stratégie qui, pour lui ainsi que pour l'Iran, remplit les objectifs voulus, et leur fait gagner un nombre plus grand de points».
Le directeur du Centre d'études stratégiques du Moyen-Orient, Hisham Jaber, abonde dans le sens que MM. Kahwaji et Nader, qui estiment que ni le Hezbollah ni l'Iran n'ont intérêt à déclencher une guerre. Dans le même temps, M. Jaber ajoute «qu’Israël n'a aucun intérêt à déclencher une guerre non plus, dans la mesure où celui qui déclenchera la guerre est généralement celui qui portera la responsabilité majeure de ses répercussions». M. Jaber explique dans une interview express à Ici Beyrouth que «si le Hezbollah décide de se lancer dans une guerre, aucune partie libanaise ne l’appuiera, y compris sa propre base populaire». Toutefois, s’il répond à une provocation lancée par Israël, la donne serait complètement différente.
Idem du côté israélien, qui ne peut pas se permettre de supporter les répercussions d’une guerre qu’il aurait lui-même initiée. À moins qu’Israël, en réponse à une provocation, réussisse à piéger le Hezbollah, en le mettant dans la position de l’agresseur. Ainsi, Israël sera en position de défense justifiée aux yeux de sa population.
Hisham Jaber poursuit en expliquant que «ni Téhéran, ni Washington ne souhaiteraient s’impliquer en ce moment dans une guerre libano-israélienne». «Washington a son lot de problèmes à gérer alors que Moscou ne voudrait pas non plus de guerre régionale, sachant que si celle-ci débute au Liban-Sud autour de la voie maritime, les affrontements s’étendront sur le territoire et déboucheront inévitablement vers la Syrie et le Golan, là où les Russes sont présents».
Selon M. Jaber, il est probable qu’«en cas d’échec des négociations, le Hezbollah continuera d'envoyer des drones et des embarcations militaires et à faire des démonstrations de force afin de rendre la zone maritime dangereuse et exposée à des opérations militaires, et empêcher ainsi Israël de commencer les travaux d’extraction de son gaz».
«En réalité, ajoute M. Jaber, les multinationales finiront par se retirer puisque celles-ci ne sont pas suicidaires et ne sont pas prêtes à explorer dans une zone sujette à un dérapage militaire à tout moment». Et de conclure : «Si Israël se sent provoqué, il pourrait effectuer des frappes bien choisies, dans la mesure où certaines cibles du Hezbollah se trouvent dans sa ligne de mire. En revanche, cette action pourrait facilement dégénérer en une guerre à plus grande échelle, à laquelle se joindraient des alliées de la formation pro-iranienne dans la région. Ainsi, la situation deviendra ouverte à toutes les éventualités».
Plus de 10 ans après le déclenchement du soulèvement en Syrie et avec la cessation des combats, la formation pro-iranienne cherche de nouveau de quoi justifier sa raison d’être. Particulièrement après le début de la crise financière et économique au Liban, qui a eu pour conséquence de ruiner les institutions étatiques et le prestige de l’État, et de révéler la dimension croissante de ce parti, qui est à deux doigts de couler le pays du Cèdre.
Le parti chiite n’a pas eu à chercher trop loin pour trouver un nouveau motif légitimant son existence. En effet, le dossier de la démarcation des frontières maritimes est arrivé à point nommé. Le Hezbollah compte bel et bien utiliser ce dossier crucial afin de rappeler à la population libanaise affamée, effondrée par la situation dans laquelle se débat le pays, qu’il est présent, puissant, et prêt à utiliser son arsenal pour «protéger le territoire et ses richesses».
Certes, le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, a annoncé à maintes reprises qu’il soutenait les positions de l'État sur ce dossier. Cela ne l’a pas pour autant empêché de s’inviter dans ce dossier crucial, sans crier gare. De ce fait, il a «déchargé» les autorités libanaises concernées du dossier, s’imposant comme unique négociateur pour la partie libanaise. Il se présente d’ailleurs comme un «joker puissant», que les Libanais doivent s’estimer chanceux d’avoir en mains, pour mieux exiger les intérêts du pays.
Alors que ces dernières semaines la possibilité d'une guerre était écartée avec la perspective d’un accord potentiel grâce à la médiation américaine dans ce dossier, le Hezbollah, quant à lui, a opté pour l’escalade, que ce soit à travers les positions de son secrétaire général, ou à travers des opérations symboliques limitées, telles que l'envoi de drones vers la zone maritime israélienne, démontrant qu’une guerre peut survenir à tout moment si l'une des deux parties est provoquée, ou si elle perçoit un intérêt à le faire. Or le Hezbollah veut-il vraiment une guerre ? Et qu’aurait-il concrètement à y gagner ?
Ceux qui ont attentivement écouté le dernier discours de Hassan Nasrallah à l’occasion de la commémoration de Achoura auront vite fait de comprendre que le sayyed prépare le peuple à l’éventualité d’une guerre. En effet, le chef de la formation pro-iranienne s’est adressé aux «djihadistes de la résistance islamique», en leur demandant de se tenir prêts pour parer à toute éventualité.
La réponse des djihadistes lui a été communiqué par message écrit dans lequel ils soulignent : «Notre doigt est sur la gâchette, et nous sommes fins prêts avec toute la puissance qu’on leur réserve. Nous sommes prêts à défendre les frontières de la souveraineté et les lignes de la dignité, que ce soit par voie maritime, terrestre, et là où ils s’y attendent le moins». Pour ceux qui ont suivi le dernier discours de Hassan Nasrallah, un petit rappel s’impose. Ce discours fait écho à celui que le sayyed a prononcé en juillet dernier lorsqu’il n'a pas hésité à mettre l'option d’une guerre sur la table en déclarant : «Nous refusons la guerre, mais nous ne la craignons pas non plus. Nous empêcherons l’extraction du pétrole et du gaz israéliens, si l’extraction des richesses gazières et pétrolières du Liban venaient à être bloquées, même si cela mène à une guerre», notant que «si une guerre venait à éclater, d’autres parties, en plus du Hezbollah, seront impliquées».
Les experts s'accordent à estimer à l'unanimité que le parti ne veut pas de guerre, mais désire plutôt maintenir le statu quo, qui a renforcé sa puissance et son rôle.
Le directeur du Centre d'analyse militaire du Moyen-Orient et du Golfe, « Enigma », Riad Kahwaji, affirme que «la dernière chose que désire le Hezbollah est de voir des milliers de citoyens de son propre environnement- du sud et de la Békaa - s’enfuir de chez eux en raison d’une guerre. En effet, peu importe le nombre de missiles que le parti possède, la force de frappe d’Israël, et l'ampleur de la destruction qu’elle peut engendrer, dépasseront de loin ses missiles». Dans une interview accordée à Ici Beyrouth, M. Kahwaji souligne que «lors des récents événements de Gaza, le Jihad islamique a lancé 1 000 missiles sur Israël».
«Un grand nombre d’entre eux ont été interceptés, indique M. Kahwaji, et les dégâts provoqués par ceux qui sont arrivés à destination sont restés limités, sans compter qu’aucune victime n’est à déplorer, côté israélien. En revanche, nous ne pouvons pas en dire autant de Gaza, au regard de l’ampleur des destructions et du nombre élevé de victimes palestiniennes. Et il en sera de même si une confrontation venait à avoir lieu avec le Hezbollah».
M. Kahwagi voit dans le discours de Hassan Nasrallah une volonté de «jouer sur la fibre sectaire, à un moment où l'Iran subi des pressions, allant de l'Irak au Liban». «Sans compter que la situation économique au Liban ne cesse de s’aggraver, de même que le fossé entre les Libanais», souligne-t-il. Le directeur du centre d'analyse militaire, souligne que «la commémoration de Achoura est le timing parfait choisi par le Hezbollah pour jouer sur la fibre sectaire et consolider le front interne en prévision de tout développement sur les scènes régionale et libanaise.
Sami Nader
De son côté, le directeur de l'Institut des affaires stratégiques du Moyen-Orient, Sami Nader, estime que le Hezbollah tient à garder le contrôle sur le cours des négociations, considérant que le parti chiite ne veut pas d'un accord sur la démarcation de la frontière maritime. Sur ce point, il déclare à Ici Beyrouth : «Le Hezbollah veut juste maintenir les règles de blocages. Il ne désire ni la guerre ni le règlement de ce dossier. Par ailleurs, il est conscient que ni lui, ni Téhéran ne pourront parvenir au règlement qu'ils souhaitent. De plus, ils ne pourront pas remporter une guerre vu l'équilibre des forces actuelles. Partant, nous constatons que le parti s’applique dans le blocage et la déstabilisation. Une stratégie qui, pour lui ainsi que pour l'Iran, remplit les objectifs voulus, et leur fait gagner un nombre plus grand de points».
Le directeur du Centre d'études stratégiques du Moyen-Orient, Hisham Jaber, abonde dans le sens que MM. Kahwaji et Nader, qui estiment que ni le Hezbollah ni l'Iran n'ont intérêt à déclencher une guerre. Dans le même temps, M. Jaber ajoute «qu’Israël n'a aucun intérêt à déclencher une guerre non plus, dans la mesure où celui qui déclenchera la guerre est généralement celui qui portera la responsabilité majeure de ses répercussions». M. Jaber explique dans une interview express à Ici Beyrouth que «si le Hezbollah décide de se lancer dans une guerre, aucune partie libanaise ne l’appuiera, y compris sa propre base populaire». Toutefois, s’il répond à une provocation lancée par Israël, la donne serait complètement différente.
Idem du côté israélien, qui ne peut pas se permettre de supporter les répercussions d’une guerre qu’il aurait lui-même initiée. À moins qu’Israël, en réponse à une provocation, réussisse à piéger le Hezbollah, en le mettant dans la position de l’agresseur. Ainsi, Israël sera en position de défense justifiée aux yeux de sa population.
Hisham Jaber poursuit en expliquant que «ni Téhéran, ni Washington ne souhaiteraient s’impliquer en ce moment dans une guerre libano-israélienne». «Washington a son lot de problèmes à gérer alors que Moscou ne voudrait pas non plus de guerre régionale, sachant que si celle-ci débute au Liban-Sud autour de la voie maritime, les affrontements s’étendront sur le territoire et déboucheront inévitablement vers la Syrie et le Golan, là où les Russes sont présents».
Selon M. Jaber, il est probable qu’«en cas d’échec des négociations, le Hezbollah continuera d'envoyer des drones et des embarcations militaires et à faire des démonstrations de force afin de rendre la zone maritime dangereuse et exposée à des opérations militaires, et empêcher ainsi Israël de commencer les travaux d’extraction de son gaz».
«En réalité, ajoute M. Jaber, les multinationales finiront par se retirer puisque celles-ci ne sont pas suicidaires et ne sont pas prêtes à explorer dans une zone sujette à un dérapage militaire à tout moment». Et de conclure : «Si Israël se sent provoqué, il pourrait effectuer des frappes bien choisies, dans la mesure où certaines cibles du Hezbollah se trouvent dans sa ligne de mire. En revanche, cette action pourrait facilement dégénérer en une guerre à plus grande échelle, à laquelle se joindraient des alliées de la formation pro-iranienne dans la région. Ainsi, la situation deviendra ouverte à toutes les éventualités».
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