Lettres à Beyrouth, juste après (12) L'instant
Tout est dans l’instant.
Ce qu’on est face à soi-même. Ou dans le regard de l’autre. S’il est important... à nos yeux. Ce qu’on est dans ces quatre murs. Dans les 10 452 (à des paramètres près.) Dans la mémoire des disparus. De ceux qui étaient. Qui sont. Qui ne seront plus. Dans le miroir. L’éternel.
Quand plus rien, plus personne ne reste, tout est dans l’instant.
L’instant est libre. Mais pas léger.
Il a été nourri. (Quand le lait -la vache !- était abordable). Nourri de vécu. De champs de blé ou de batailles.
De mots, de sourires, de soupirs.
D’eau et de sel. Et du sel de la terre.
De vagues. D’écumes. De larmes. De vent du Sud et de tous les Nord perdus.
De lassitude, de vicissitude, de saisons.
De promesses vides ou d’ultimes déceptions. D’habitude.
D’encre ou de sang déversés pour mille fois rien. La violence. Les silences. Et une « révolution permanente » pour garder, chacun son bout de terre. De terrain. Haut et fort. Le regard fier. Ou en soi. Comme une prière. Chacun son pays. Un arbre, un ciel bleu, quelqu’un.
Tout est dans l’instant. Les mille et une fois mille pas. Mille détours. Mille retours.
Et tout ce qui forge un homme.
Une femme.
Le cèdre et le drapeau.
Le blanc des nuits tourmentées.

Le rouge et toutes les blessures qui ne se referment pas.
La cicatrice. -et que de !
Le sourire. L’enfant.
La « seule » vérité.
Et l’on vit.
Et l’on meurt.
Pour un instant. L’instant.
Et puis... et puis ?
Le cèdre.
Jusqu’au dernier souffle.
Et tout ce qui appartient à la terre.
Ou aux enfants.
Sans les semblants d’hommes.
Comme une évidence.
Beyrouth.
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