À l’invitation de la campagne Jinsiyati (Ma nationalité, un droit pour moi et ma famille), un sit-in a été observé jeudi, à la place Riad el-Solh au centre-ville de Beyrouth, pour réclamer le vote d’une loi permettant aux femmes libanaises d’octroyer leur nationalité à leurs enfants nés d’un père étranger.

Au fil des ans, plusieurs projets de loi ont été déposés dans ce sens au Parlement, mais ils sont restés dans les tiroirs. Un immobilisme que dénonce la campagne, appelant à les faire sortir des tiroirs et les discuter en public. Bien qu’ayant signé la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedaw), le Liban a émis une réserve sur l’article 9, qui garantit aux femmes le droit de transmettre leur nationalité à leurs enfants.

Cette véritable injustice est justifiée, selon les dirigeants, par la nécessité de préserver l’équilibre démographique du pays. Cela n’empêche pourtant pas les hommes libanais de transmettre leur nationalité à leurs enfants nés d’une mère étrangère.

«Nous n’avons rien à voir avec les instrumentalisations politiques et les calculs démographiques sur ce sujet», martèle Zeina al-Masri, avocate et conseillère juridique de la campagne Jinsiyati.  «Nous sommes des femmes libanaises, qui avons le droit de transmettre notre nationalité à nos enfants, d’autant qu’ils sont nés dans ce pays et y ont grandi», poursuit-elle.

La colère était palpable parmi les mères libanaises accompagnées de leurs enfants, qui n’ont pas accès aux services publics ni à aucune aide de l’État. Pour beaucoup, le statut d’apatride les prive de toute protection légale et les condamne à une vie de précarité.


«Ma mère a 70 ans! Elle a besoin de médicaments, de soins et d’assistance! Je ne peux rien faire pour elle, car je n’ai pas la nationalité!» s’insurge un manifestant, alors que la majorité des Libanais compte aujourd’hui sur la solidarité familiale pour survivre, dans un contexte d’effondrement économique.

Les manifestants espèrent qu’avec les députés de la contestation, le sujet pourra enfin être mis à l’ordre du jour du Parlement, après des décennies d’indifférence de la part de la classe dirigeante. En effet, le décret à l’origine de cette inégalité date du mandat français. Depuis, il n’a jamais été modifié.

«À la veille des législatives, ils nous font des promesses, parce qu’ils ont besoin de notre voix pour assurer leur place au Parlement, s’exclame une manifestante. Mais dès que c’est fini, ils nous oublient! Pourquoi faisons-nous des enfants? Pour qu’ils finissent à la rue, ou qu’ils soient forcés à l’émigration parce que le Liban ne les reconnaît même pas?»

Selon la campagne Jinsyati, 150.000 Libanaises sont concernées par cette situation, tandis que près d’un million de personnes sont privées de leur nationalité en raison de cette disposition discriminatoire.
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