IVG, prostitution, maternité...au Festival d’Angoulême
Il y a d’abord des films majoritairement portés par des réalisatrices - sept sur 10 en compétition - mais aussi et surtout des films sur l’intimité des femmes : avortement, prostitution juvénile, maternité...Le Festival du film francophone d’Angoulême a fait la part belle à des histoires de femmes, mais aussi à des héroïnes fortes et vulnérables. Tour d’horizon.

Premier long-métrage de la Québécoise Geneviève Albert, Noémie dit oui est un film-fleuve, mais pas cru, sur le phénomène de la prostitution des adolescentes (entre 14 et 17 ans) au Canada. Le spectateur y plonge avec l’histoire de Noémie (Kelly Depeault), une enfant placée et mal-aimée par sa mère. Après une fugue, elle tombe entre les griffes d’un proxénète dont elle pense qu’il est son petit-ami. Fruit de plusieurs années de recherche sur ce fléau, aussi à l’œuvre en France, le film assume de ne pas montrer les scènes de prostitution pour préférer filmer les clients « qu’on ne voit et qu’on n’entend jamais », a affirmé sa réalisatrice.

Des hommes de tous âges et de toutes professions qui ne s’interrogent jamais sur l’âge de Noémie. Rythmée, la mise en scène donne au spectateur le sentiment d’être avec la jeune fille, qui enchaîne les passes malgré une détresse qu’elle ne parvient pas à masquer. Au cœur du film, la question du consentement. Car si Noémie accepte de se prostituer, son corps, lui, dit non.
« Je pense qu’il faut questionner ce oui. Quand vous êtes mineure, seule, sans parents et que vous êtes dans une situation de vulnérabilité émotionnelle est-ce que vous consentez volontairement à vous prostituer ? » a interrogé la réalisatrice, qui se définit comme « abolitionniste ».

C’est un film choral (malgré son titre) et qui n’est pas sans rappeler le film 120 battements par minute (2017) sur le combat d’Act Up au début de l’épidémie de Sida. Mais le sujet d’Annie Colère, troisième long-métrage de Blandine Lenoir avec son actrice fétiche Laure Calamy, est tout autre. En salles le 30 novembre, il revient sur le combat des militantes du MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception) pour la légalisation de l’avortement.


Anonymes, ces femmes qui pratiquaient des avortements sécurisés aux yeux de tous, malgré leur illégalité, ont été oubliées de la mémoire collective.

« Ces femmes sont des héroïnes (...) Ce film est pour elles », a déclaré sa réalisatrice. « On a l’impression que c’est Simone Veil toute seule qui a permis la légalisation de l’avortement alors que c’est la pression des femmes, des militantes, qui a rendu possible la légalisation », a complété l’actrice Laure Calamy. Pas seulement un film sur l’IVG, Annie Colère est aussi le récit d’une émancipation. Car le MLAC n’est pas seulement un endroit où avorter, c’est un espace où les femmes se rencontrent, échangent et découvrent une autre vision de leur corps et de leur sexualité.

Premier film de Léopold Legrand, Le Sixième enfant, en salles le 28 septembre, traite du sujet clivant et régulièrement débattu de la maternité à travers ses deux principales faces : celui du désir profond d’avoir un enfant, mais aussi celui d’une maternité non désirée. Le film raconte l’histoire de Julien et Anna, un couple aisé d’avocats qui souffrent de ne pas avoir d’enfant, et Franck et Meriem, couple modeste déjà quintuples fois parents et qui ne veulent pas du sixième enfant à venir.

C’est lors d’une rencontre que va naître l’idée improbable - et illégale -d’un échange. Adapté du roman Pleurer des rivières d’Alain Jaspard, le film questionne, sans jamais juger les personnages, la quête extrême du désir d’un enfant. Quand celle-ci tourne à l’obsession au point, précisément, d’envisager l’inenvisageable. Il se fait aussi le porte-voix d’une forme de rejet de la maternité. Le tout servi par un casting d’acteurs d’une justesse et d’une finesse absolues : Sara Giraudeau, Benjamin Lavernhe, Judith Chemla et Damien Bonnard.

AFP
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