Festival Jazz à la Villette : le come-back des Américains
Quasiment absents des deux dernières éditions à cause de la pandémie de Covid-19, les musiciens américains font un retour en force au Festival Jazz à la Villette, organisé à partir de mercredi à Paris.

« Les Américains ne pouvaient pas du tout venir ; là, d’un seul coup, il y a quelque chose qui circule plus. On a retrouvé une configuration pré-Covid », se réjouit Frank Piquard, programmateur du festival qui se déroulera jusqu’au 11 septembre. Ces musiciens viennent de La Nouvelle-Orléans, New York, Chicago, Los Angeles... autant de places fortes du jazz dans le pays où cette musique est née il y a un peu plus d’un siècle.

Ils incarnent les nouveaux courants d’une scène en pleine ébullition outre-Atlantique, avec de jeunes talents qui vont largement puiser leur inspiration dans le funk, le hip-hop ou les musiques électroniques et bousculent sérieusement les codes du jazz. « On s’est dit que c’était peut-être le moment de miser sur la jeunesse, il y avait énormément de propositions de nouveaux projets », explique Frank Piquard.

Parmi ces propositions qui ont eu le temps de s’épanouir pendant cette période confinée, figure DOMi & JD Beck, un duo de très jeunes musiciens interprète d’un jazz groove. Autre duo, entre électropop et funk : Knower, unissant le batteur Louis Cole et la chanteuse Geneviève Artadi. Voilà pour Los Angeles. La Nouvelle-Orléans délègue Tank and the Bangas, un « combo » qui interprète avec humour une musique rafraîchissante où se télescopent funk, hip-hop, soul et jazz.

Angel Bat Dawid, multi-instrumentiste, représentera l’école de Chicago avec un free jazz mystique et incantatoire dans la droite lignée de ses aînés initiateurs, dans les années 60, du concept de « Great Black Music ». Ces jeunes musiciens reçoivent souvent la caution de leurs aînés. Jazz à La Villette a tenu à témoigner de ces liens tissés entre les générations.

Cimafunk, jeune formation cubaine de funk-rap, dialoguera ainsi avec le tromboniste Fred Wesley (79 ans), ex-membre des JB Horns, légendaire section de cuivres de James Brown au siècle dernier. Autre exemple de formation transgénérationnelle : Scary Pockets, un groupe funky-jazzy-soul vintage né sur la toile où cohabitent le septuagénaire John Scofield, ex-guitariste de Miles Davis, le « quinqua » Larry Goldings à l’orgue et les trentenaires MonoNeon (basse) ou Louis Cole (batterie).


Sans oublier que DOMi & JD Beck a été adoubé par le roi du jazz Herbie Hancock, qui joue sur leur premier disque tout juste sorti. Dans ce concert de découvertes, quelques légendes du jazz parviennent à se frayer un chemin : Abdullah Ibrahim, Dave Holland, Kenny Barron ou Ravi Coltrane.

Abdullah Ibrahim est l’un des derniers survivants de l’aventure du jazz sud-africain né dans les townships au début des années soixante, au temps de l’apartheid. Seul devant son piano, il transportera son auditoire pour un de ces voyages dont il a le secret.

Jazz à La Villette aime se référer à l’histoire de la soul music et du funk, à travers des hommages à ses héros. Après ceux rendus à Bill Withers par José James et à Prince par Jeanne Added ces dernières années, c’est au tour de Marvin Gaye d’être honoré.

En 1971, Marvin Gaye sort un album révolutionnaire : What’s going on. Drogue, droits civiques, pauvreté, guerre du Vietnam, écologie... autant de thèmes qu’il y aborde, brisant son image d’interprète de romances.
Les chansons de cet album mythique vont revivre grâce au Nu Civilisation Orchestra, une émanation de Tomorrow’s Warriors, une sorte d’école de jazz très ouverte, avec une grande mixité sociale, installée à Londres.

« Un projet qui a autant une dimension politique et sociale que purement artistique », souligne Frank Piquard.
Commentaires
  • Aucun commentaire