Le 31 octobre 2022, Michel Aoun devra quitter ses fonctions de président de la République libanaise. À quoi devons-nous nous attendre et comment devrait se dérouler l’élection du nouveau chef de l’État ?
La Constitution est assez claire au sujet de l’élection présidentielle et elle est un bon guide pour comprendre le côté technique de ce processus démocratique.
Selon l’article 73 de la Constitution, à partir du 31 août 2022, nous entrons dans la période d’expiration du mandat présidentiel qui donne la possibilité au président de la Chambre de convoquer les députés à une séance plénière pour élire le nouveau chef de l’État.
Article 73
Un mois au moins et deux mois au plus avant l’expiration du mandat du président de la République, la Chambre se réunit sur convocation de son président pour l’élection du nouveau président. À défaut de convocation, cette réunion aura lieu de plein droit le dixième jour avant le terme de la magistrature présidentielle.
Le président de la Chambre des députés a donc jusqu’au 21 octobre pour convoquer les députés pour élire le prochain président.
Si jamais le poste de président de la République est vacant pour quelque raison que ce soit, la Chambre des députés doit se réunir sans délai pour élire le nouveau chef de l’État comme mentionné par l’article 74.
Article 74
En cas de vacance de la présidence par décès, démission ou pour toute autre cause, l’Assemblée se réunit immédiatement et de plein droit pour élire un nouveau président. Si au moment où se produit la vacance, la Chambre se trouve dissoute, les collèges électoraux sont convoqués sans retard, et aussitôt les élections faites, la Chambre se réunit de plein droit.
Si le poste reste vacant malgré toute la bonne volonté du Parlement, le gouvernement prend la responsabilité à titre intérimaire d’exercer les pouvoirs du président de la République, ce qui est rappelé dans l’article 62.
Article 62
En cas de vacance de la présidence de la République pour quelque raison que ce soit, les pouvoirs du président de la République sont exercés à titre intérimaire par le Conseil des ministres.
Contrairement aux autres démocraties à suffrage direct, les Libanais élisent leur président par suffrage indirect. En effet, le Liban est une république démocratique parlementaire semi-présidentielle, ce qui signifie que la Chambre des députés forme le collège électoral qui élit le président de la République, ce qui est indiqué dans l’article 75.
Article 75
La Chambre réunie pour élire le président de la République constitue un collège électoral et non une assemblée délibérante. Elle doit procéder uniquement, sans délai ni débat, à l’élection du Chef de l’État.
L’article 49 nous rappelle les points essentiels au sujet de la responsabilité qui revient au président de la République, la manière par laquelle il doit être élu et les conditions d’éligibilité de celui-ci.
Article 49
Le président de la République est le chef de l’État et le symbole de l’unité de la patrie. Il veille au respect de la Constitution et à la sauvegarde de l’indépendance du Liban, de son unité et de l’intégrité de son territoire conformément aux dispositions de la Constitution. Il préside le Conseil supérieur de Défense. Il est le commandant en chef des forces armées lesquelles sont soumises à l’autorité du Conseil des ministres.
Le président de la République est élu, au premier tour, au scrutin secret à la majorité des deux tiers des suffrages par la Chambre des députés. Aux tours de scrutins suivants, la majorité absolue suffit. La durée de la magistrature du Président est de six ans. Il ne pourra être réélu qu’après un intervalle de six années. Nul n’est éligible à la présidence de la République s’il ne remplit les conditions requises pour être éligible à la Chambre des députés et qui ne font pas obstacle à la capacité d’être candidat.
Les magistrats et les fonctionnaires de la première catégorie ou son équivalent dans toutes les administrations publiques, établissements publics et toute autre personne morale de droit public ne peuvent être élus au cours de l’exercice de leur fonction et durant les deux années qui suivent la date de leur démission et de la cessation effective de l’exercice de leur fonction ou de la date de leur mise à la retraite.
Les conditions en vigueur d’éligibilité sont celles de la loi électorale de 2018 qui sont les suivantes :
Dans le cas d’un militaire, il faut que le candidat présente sa démission six mois avant le scrutin ou alors que celui-ci soit à la retraite.
Le candidat doit être maronite comme convenu dans l'esprit du pacte national qui fait donc office de texte constitutionnel oral.
Pour mieux comprendre le contexte de cette élection présidentielle, nous avons interrogé Elias Hankash, membre du parti Kataeb et député du Metn.
Selon vous, que va-t-il se passer concernant l’élection présidentielle ?
"C’est une échéance décisive qui va déterminer l’avenir du pays. Soit nous nous trouverons dans une situation de confrontation, d’escalade ou de vacance. Soit la confrontation sera logique, en ce sens que nous devrons agir sur base de critères pour le choix du président de la République. Bien sûr qu’il faut qu’il y ait un consensus pour qu’il soit élu, mais ce qui est plus important ce sont trois critères essentiels. Premièrement, il devrait avoir un positionnement clair au sujet de la souveraineté, qu’il puisse gérer le dossier du Hezbollah, de l’État dans l’État, des armes qui ne sont pas sous le sceau de la légitimité, et qu’il ait la force de dire : venez qu’on parle sérieusement d’une stratégie de défense. Deuxièmement, il faut que ce soit un économiste, qui sache secourir ce pays, et qui soit équitable envers les gens qui ont été lésés, qui ont mis l’argent de toute une vie dans les banques, qui ont eu foi en ce pays et qui pourtant ont été volés. Troisièmement, il doit être un bon diplomate, une personne qui soit capable de rétablir une confiance envers le Liban et vis-à-vis de la communauté internationale. Un président qui sache réchauffer les relations du Liban avec ses amis historiques, mais aussi avec la diaspora libanaise et surtout avec la communauté internationale. Quelqu’un qui sache discuter avec eux, pour repositionner le Liban sur la scène internationale".
Quels sont les paramètres régionaux et internationaux qui peuvent impacter l’élection présidentielle ?
"Malheureusement, nous sommes dans un pays qui ne met pas en pratique la neutralité. Nous sommes encore influencés par tous les évènements qui se déroulent dans le monde : la Russie avec l’Ukraine, la Chine avec Taiwan, l’Arabie saoudite avec le Yémen, l’Iran avec l’Amérique et l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien (JCPoA). Ils jouent tous leur rôle, parce que les équipes en charge de l’opération électorale sont assujettis à des agendas extérieurs. Du coup, nous sommes impactés par tous ces arrangements régionaux et internationaux. Cependant, et pour la première fois depuis l’explosion (du 4 août 2020 au port de Beyrouth), la faillite, le vol de l’argent des gens, la révolution, et tout ce qui s’est produit dans ce pays, le moment est venu pour que la présidence soit décidée au Liban, et qu’on ne soit pas dans l’attente de la volonté des Français, des Américains, ou des Iraniens. Pour une fois, nous avons cette opportunité, avec ce nouveau Parlement post-révolution, de pouvoir choisir avec une certaine indépendance le futur président de la République".
Est-ce que vous vous attendez à un vide présidentiel ?
"Premièrement, je crois que le président Aoun va quitter ses fonctions le 31 octobre. Deuxièmement, si le scenario du vide ou du blocage venait à se réaliser, je ne crois pas que ce sera long, et il est probable que ce vide nous apporte une personne consensuelle qui convienne à toutes les parties prenantes. Joseph Aoun sera le premier sur la liste étant donné que dans le cas d’un vide, l’armée garde son importance. Cette liste se termine par une personne sur laquelle les Libanais vont se mettre d’accord, ou une personne qui conviendra à la classe politique, et qui ne les provoquera pas. Et à mon avis, il est vrai qu’un vide de deux ans et demi s’est produit, pourtant aujourd’hui on voit que la formation ou non d’un gouvernement peut déterminer le maintien ou non de Michel Aoun, ou alors qu’un blocage ait lieu, mais il y a aussi et surtout le scenario de sortie avec une personne comme Joseph Aoun. Je ne vous dis pas qui sera le président de la République, je dis simplement quels sont les différents scenarios auxquels nous pouvons nous attendre. Mais je doute que quelqu’un pense vraiment faire trainer l’élection présidentielle durant une longue période pour des intérêts petits et personnels surtout que le pays se noie petit à petit."
La Constitution est assez claire au sujet de l’élection présidentielle et elle est un bon guide pour comprendre le côté technique de ce processus démocratique.
Selon l’article 73 de la Constitution, à partir du 31 août 2022, nous entrons dans la période d’expiration du mandat présidentiel qui donne la possibilité au président de la Chambre de convoquer les députés à une séance plénière pour élire le nouveau chef de l’État.
Article 73
Un mois au moins et deux mois au plus avant l’expiration du mandat du président de la République, la Chambre se réunit sur convocation de son président pour l’élection du nouveau président. À défaut de convocation, cette réunion aura lieu de plein droit le dixième jour avant le terme de la magistrature présidentielle.
Le président de la Chambre des députés a donc jusqu’au 21 octobre pour convoquer les députés pour élire le prochain président.
Si jamais le poste de président de la République est vacant pour quelque raison que ce soit, la Chambre des députés doit se réunir sans délai pour élire le nouveau chef de l’État comme mentionné par l’article 74.
Article 74
En cas de vacance de la présidence par décès, démission ou pour toute autre cause, l’Assemblée se réunit immédiatement et de plein droit pour élire un nouveau président. Si au moment où se produit la vacance, la Chambre se trouve dissoute, les collèges électoraux sont convoqués sans retard, et aussitôt les élections faites, la Chambre se réunit de plein droit.
Si le poste reste vacant malgré toute la bonne volonté du Parlement, le gouvernement prend la responsabilité à titre intérimaire d’exercer les pouvoirs du président de la République, ce qui est rappelé dans l’article 62.
Article 62
En cas de vacance de la présidence de la République pour quelque raison que ce soit, les pouvoirs du président de la République sont exercés à titre intérimaire par le Conseil des ministres.
Contrairement aux autres démocraties à suffrage direct, les Libanais élisent leur président par suffrage indirect. En effet, le Liban est une république démocratique parlementaire semi-présidentielle, ce qui signifie que la Chambre des députés forme le collège électoral qui élit le président de la République, ce qui est indiqué dans l’article 75.
Article 75
La Chambre réunie pour élire le président de la République constitue un collège électoral et non une assemblée délibérante. Elle doit procéder uniquement, sans délai ni débat, à l’élection du Chef de l’État.
L’article 49 nous rappelle les points essentiels au sujet de la responsabilité qui revient au président de la République, la manière par laquelle il doit être élu et les conditions d’éligibilité de celui-ci.
Article 49
Le président de la République est le chef de l’État et le symbole de l’unité de la patrie. Il veille au respect de la Constitution et à la sauvegarde de l’indépendance du Liban, de son unité et de l’intégrité de son territoire conformément aux dispositions de la Constitution. Il préside le Conseil supérieur de Défense. Il est le commandant en chef des forces armées lesquelles sont soumises à l’autorité du Conseil des ministres.
Le président de la République est élu, au premier tour, au scrutin secret à la majorité des deux tiers des suffrages par la Chambre des députés. Aux tours de scrutins suivants, la majorité absolue suffit. La durée de la magistrature du Président est de six ans. Il ne pourra être réélu qu’après un intervalle de six années. Nul n’est éligible à la présidence de la République s’il ne remplit les conditions requises pour être éligible à la Chambre des députés et qui ne font pas obstacle à la capacité d’être candidat.
Les magistrats et les fonctionnaires de la première catégorie ou son équivalent dans toutes les administrations publiques, établissements publics et toute autre personne morale de droit public ne peuvent être élus au cours de l’exercice de leur fonction et durant les deux années qui suivent la date de leur démission et de la cessation effective de l’exercice de leur fonction ou de la date de leur mise à la retraite.
Les conditions en vigueur d’éligibilité sont celles de la loi électorale de 2018 qui sont les suivantes :
- Être de nationalité libanaise depuis plus de dix ans ;
- Avoir plus de vingt-cinq ans ;
- Être inscrit sur la liste électorale de sa circonscription.
Dans le cas d’un militaire, il faut que le candidat présente sa démission six mois avant le scrutin ou alors que celui-ci soit à la retraite.
Le candidat doit être maronite comme convenu dans l'esprit du pacte national qui fait donc office de texte constitutionnel oral.
Pour mieux comprendre le contexte de cette élection présidentielle, nous avons interrogé Elias Hankash, membre du parti Kataeb et député du Metn.
Selon vous, que va-t-il se passer concernant l’élection présidentielle ?
"C’est une échéance décisive qui va déterminer l’avenir du pays. Soit nous nous trouverons dans une situation de confrontation, d’escalade ou de vacance. Soit la confrontation sera logique, en ce sens que nous devrons agir sur base de critères pour le choix du président de la République. Bien sûr qu’il faut qu’il y ait un consensus pour qu’il soit élu, mais ce qui est plus important ce sont trois critères essentiels. Premièrement, il devrait avoir un positionnement clair au sujet de la souveraineté, qu’il puisse gérer le dossier du Hezbollah, de l’État dans l’État, des armes qui ne sont pas sous le sceau de la légitimité, et qu’il ait la force de dire : venez qu’on parle sérieusement d’une stratégie de défense. Deuxièmement, il faut que ce soit un économiste, qui sache secourir ce pays, et qui soit équitable envers les gens qui ont été lésés, qui ont mis l’argent de toute une vie dans les banques, qui ont eu foi en ce pays et qui pourtant ont été volés. Troisièmement, il doit être un bon diplomate, une personne qui soit capable de rétablir une confiance envers le Liban et vis-à-vis de la communauté internationale. Un président qui sache réchauffer les relations du Liban avec ses amis historiques, mais aussi avec la diaspora libanaise et surtout avec la communauté internationale. Quelqu’un qui sache discuter avec eux, pour repositionner le Liban sur la scène internationale".
Quels sont les paramètres régionaux et internationaux qui peuvent impacter l’élection présidentielle ?
"Malheureusement, nous sommes dans un pays qui ne met pas en pratique la neutralité. Nous sommes encore influencés par tous les évènements qui se déroulent dans le monde : la Russie avec l’Ukraine, la Chine avec Taiwan, l’Arabie saoudite avec le Yémen, l’Iran avec l’Amérique et l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien (JCPoA). Ils jouent tous leur rôle, parce que les équipes en charge de l’opération électorale sont assujettis à des agendas extérieurs. Du coup, nous sommes impactés par tous ces arrangements régionaux et internationaux. Cependant, et pour la première fois depuis l’explosion (du 4 août 2020 au port de Beyrouth), la faillite, le vol de l’argent des gens, la révolution, et tout ce qui s’est produit dans ce pays, le moment est venu pour que la présidence soit décidée au Liban, et qu’on ne soit pas dans l’attente de la volonté des Français, des Américains, ou des Iraniens. Pour une fois, nous avons cette opportunité, avec ce nouveau Parlement post-révolution, de pouvoir choisir avec une certaine indépendance le futur président de la République".
Est-ce que vous vous attendez à un vide présidentiel ?
"Premièrement, je crois que le président Aoun va quitter ses fonctions le 31 octobre. Deuxièmement, si le scenario du vide ou du blocage venait à se réaliser, je ne crois pas que ce sera long, et il est probable que ce vide nous apporte une personne consensuelle qui convienne à toutes les parties prenantes. Joseph Aoun sera le premier sur la liste étant donné que dans le cas d’un vide, l’armée garde son importance. Cette liste se termine par une personne sur laquelle les Libanais vont se mettre d’accord, ou une personne qui conviendra à la classe politique, et qui ne les provoquera pas. Et à mon avis, il est vrai qu’un vide de deux ans et demi s’est produit, pourtant aujourd’hui on voit que la formation ou non d’un gouvernement peut déterminer le maintien ou non de Michel Aoun, ou alors qu’un blocage ait lieu, mais il y a aussi et surtout le scenario de sortie avec une personne comme Joseph Aoun. Je ne vous dis pas qui sera le président de la République, je dis simplement quels sont les différents scenarios auxquels nous pouvons nous attendre. Mais je doute que quelqu’un pense vraiment faire trainer l’élection présidentielle durant une longue période pour des intérêts petits et personnels surtout que le pays se noie petit à petit."
Lire aussi
Commentaires