©Un soldat ukrainien lors d'exercices militaires conjoints avec des troupes US et de l'Otan à l'Ouest du pays, à la frontière polonaise. (AFP)
Joe Biden va-t-il dissuader Vladimir Poutine d'envahir l'Ukraine? Le président russe y est-il vraiment prêt ou bluffe-t-il? Les deux hommes auront mardi un entretien à très haut risque pour essayer d'éviter l'escalade.
Washington et Kiev accusent Moscou de masser des troupes à la frontière avec l'Ukraine pour attaquer le pays, rejouant le scénario qui avait vu les Russes annexer la péninsule de Crimée en 2014, et précipiter l'Ukraine dans une guerre qui a fait plus de 13.000 morts.
Les experts sont partagés: beaucoup pensent que Vladimir Poutine bluffe, mais peu évacuent complètement l'hypothèse d'une attaque.
Si Moscou devait passer à l'acte, un haut responsable de la Maison Blanche a détaillé lundi les leviers que les Etats-Unis seraient prêts à actionner.
D'abord "les Etats-Unis répondraient favorablement" à une demande de présence militaire accrue de la part de leurs alliés de l'Otan en Europe de l'Est. Ensuite, ils soutiendraient davantage l'armée ukrainienne.
Enfin, Washington prendrait des sanctions économiques lourdes contre le régime de Vladimir Poutine, et surtout différentes de celles empilées depuis 2014 contre la Russie, sans grand effet.
Mais "les Etats-Unis ne cherchent pas à se retrouver dans une position où l'usage direct de forces américaines serait au centre de (leurs) réflexions", selon le haut responsable. En clair: pas question pour l'instant d'une réplique militaire américaine directe.
Joe Biden, qui a traité Vladimir Poutine de "tueur", joue une partition délicate.
Il se veut le grand porte-parole des démocrates dans le monde - et organise d'ailleurs jeudi et vendredi un "sommet des démocraties" virtuel vertement critiqué par Moscou et Pékin, qui n'y sont pas invités.
Et il lui faut gérer habilement la crise ukrainienne, sous peine d'échauder encore plus les alliés traditionnels des Etats-Unis, déjà irrités par le retrait d'Afghanistan, mené de manière chaotique, et sans grande concertation selon eux.
Joe Biden entend rendre compte personnellement de son entretien avec Vladimir Poutine au président ukrainien Volodymyr Zelensky. Et il s'est entretenu au téléphone lundi avec les dirigeants de la France, de l'Allemagne, de l'Italie et du Royaume-Uni, tous exprimant "leur détermination à ce que la souveraineté" de l'Ukraine "soit respectée", a fait savoir Paris.
Cette stratégie de dissuasion va-t-elle payer auprès d'un Vladimir Poutine si soucieux de stature internationale?
"Il est difficile de s'attendre à une percée de ces négociations", a d'ores et déjà déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, en estimant qu'il était peu probable de mettre de l'ordre dans "les écuries d'Augias" des relations bilatérales "en quelques heures" d'entretien.
Moscou veut une garantie que l'Ukraine ne rejoindra pas l'Otan, comme tant de pays de l'ex-bloc soviétique l'ont fait. Or ni Kiev, ni Washington ne prendront un tel engagement même si, dans les faits, la procédure d'adhésion de l'Ukraine à l'alliance militaire occidentale, bien qu'officiellement ouverte, semble gelée.
Certains experts estiment que la tenue même de ce sommet est en soi une victoire pour Vladimir Poutine, qui veut affirmer la Russie comme une puissance dans le jeu géopolitique mondial, aujourd'hui dominé par la rivalité entre Chine et Etats-Unis.
Bruce Jentleson, professeur de sciences politiques à la Duke University, et conseiller du département d'Etat entre 2009 et 2011, doute pour sa part de la portée dissuasive des sanctions financières agitées par la Maison Blanche.
Les spéculations vont bon train autour d'une initiative de Washington pour couper la Russie de la messagerie SWIFT, rouage essentiel de la finance mondiale, qui permet aux banques de faire circuler l'argent.
"A les entendre, il s'agit de l'arme nucléaire version économique, mais je doute que (les sanctions) aient un tel impact", explique Bruce Jentleson. Il faudrait "qu'elles soient coordonnées au minimum avec les Européens, et même dans ce cas, il y a des moyens de les contourner".
AFP
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