La musique du Club Social Bacchus redéfinit l’espace
Chloé Fakhoury porte en elle le cran des notes dans l’âme et la persévérance de transformer la morosité de son pays en air de fête et de douce consolation. Elle fonde ainsi le club social Bacchus, ayant pour but d’organiser des salons de musique dans les maisons et les jardins des habitants grâce au projet «Un concert dans votre salon».



Il faut être téméraire pour rêver de musique. Il faut être tenace pour réaliser ses rêves avec le sourire dans un monde de chez nous qui sombre de plus en plus dans le noir. Voilà ce que les projets de musique de Chloé Fakhoury produisent pour qu'un Liban plus apaisé renaisse de ses cendres grâce à l’art, et pour donner des ailes à la génération de demain.

Comment est née l’idée du club social Bacchus?

Le club social Bacchus est un cri du cœur, c’est une réponse à la morosité ambiante causée par la crise économique, la crise sanitaire, les confinements successifs et d’autres crises qui ont annihilé notre humanité. Puis ensuite, il y a eu la déflagration du port de Beyrouth et son impact matériel et psychologique. Face à cette douleur collective, j’ai décidé de mettre un peu de lumière dans l’obscurité du quotidien et d’apporter du réconfort aux gens à travers la musique. J’ai fondé le club social Bacchus qui a pour objet d’organiser des salons de musique dans les demeures et les jardins des habitants grâce au projet «Un concert dans votre salon». C’est ma façon de redonner un peu de joie de vivre, de faire découvrir des lieux insolites ou historiques en faisant vivre la culture et le patrimoine libanais.



Où se font les salons de musique?

Mes premiers salons de musique ont eu lieu dans les maisons, je voulais faire un hommage à toutes ces habitations détruites à la suite de l’explosion du port de Beyrouth. Face à l’engouement suscité par ces concerts, j’ai décidé d’étendre mes activités musicales à d’autres lieux tels que les mairies, les cryptes, les musées... même si les maisons restent le signe distinctif du club.

Comment se fait le choix des talents?


Je travaille toujours avec des artistes confirmés, mais je suis sensible également aux talents prometteurs. En principe, je glane des informations sur les artistes dès qu’ils ont une actualité sur les réseaux sociaux ou à travers des articles de presse qui les mentionnent. Par moments, je suis sollicitée par des musiciens souhaitant collaborer avec le club. Par ailleurs, j’invite aussi des personnes qui pratiquent l’art de la sculpture ou de la peinture à venir exposer leurs œuvres; ce fut le cas avec la sculptrice Sabine Karam. Rassembler des personnes qui gagnent à travailler ensemble m’enthousiasme; je pense que ce rôle de trait d’union correspond parfaitement aux objectifs du club social Bacchus.



Pouvez-vous nous parler du dernier salon?

Mon dernier salon de musique s’intitule Dolce affetto, avec la soprano Marie-José Matar, le baryton Bruno Khouri et le pianiste Élie Sawma. je l’ai proposé à la mairie de Zahlé dans le cadre du festival Al-Karma. Ce salon fut consacré aux plus beaux airs et duos d’amour composés par Mozart, Poulenc, Gounod, Verdi, Donizetti, Puccini, Léhar, etc.

Pensez-vous que ces événements font la différence pour le Liban d’aujourd’hui?

Bien sûr, car en temps de crises, de guerre, de bouleversements sociaux, la musique permet de souder le groupe et de rassembler les gens; c’est une forme de communication entre êtres humains, c’est un «calmant social». La musique est signe d’espoir, de rêve, d’un lendemain meilleur, car il faut toujours penser qu’il y aura une issue. Mais ce qui fait toute la différence aussi, c’est le fait de convertir les maisons en salles lyriques et symphoniques permettant ainsi de redéfinir l’usage de l’espace privé et de démocratiser la musique savante, tout en apportant une lueur d’espoir dans les foyers! Ces fresques sonores emplissant les salons, favorisent les échanges et permettent de redéfinir une dimension humaine nouvelle basée sur le partage et la solidarité.



Où puisez-vous la force de continuer?

Je ne puise ma force nulle part, ce sont plutôt ces salons de musique qui me procurent de la force, du courage, de l’émotion, du bonheur… Je les considère comme une forme de résistance à travers la musique, car la musique n’est pas un simple objet de consommation, elle permet à l’Homme de progresser et d’approfondir sa dimension humaine; il devient donc plus tolérant, moins étroit et davantage capable de jugement autonome.
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