Débat budgetaire: Que s’est-il passé vendredi au Parlement?
Que s’est-il passé vendredi au Parlement? Le chef du Législatif Nabih Berry a levé la séance de vote du projet de budget 2022 vendredi vers 17h10 parce que les députés des différentes composantes de l'opposition ont quitté l'hémicycle, entrainant un défaut de quorum, en raison de leur rejet du budget tel que transmis à la Chambre.

Le président de la Chambre Nabih Berry a reporté la séance de vote du projet de budget 2022 au lundi 26 septembre, le Premier ministre se trouvant à l’étranger pour honorer des engagements à Londres et à New York.

Le report de la séance est dû au fait que les députés de l’opposition (Forces libanaises, Kataëb, PNL et le bloc Michel Moawad-Achraf Rifi-Fouad Makhzoumi) ainsi que ceux de la contestation et les indépendants ont fait front uni et ont provoqué un défaut de quorum, entrainant la levée de la séance parlementaire. Cette position unifiée des différentes composantes de l'opposition a représenté une première depuis le début du mandat de la nouvelle Chambre et pourrait constituer un indice précurseur de la tournure que pourrait prendre la bataille présidentielle. D’entrée de jeu, M. Berry avait vraisemblablement senti le vent tourner et capter des ondes négatives provenant de l’hémicycle. En début de séance, il s’est empressé de déclarer: «Utilisons, chers collègues, notre mandat d’élus pour redonner aux gens leurs droits. Il y a des retraités et des parents aux portes de l’hémicycle qui demandent que justice soit faite. Transformons ce budget, qu'on dit mauvais, en un budget acceptable».

Il reste que l'attitude des députés de l'opposition s'est crispée à la suite de l’état de confusion totale dans laquelle s’est retrouvé le ministre sortant des Finances Youssef El-Khalil. Alors qu'il exposait dans son intervention les chiffres du budget, un fonctionnaire du Parlement lui a glissé une feuille (alors qu'il était à la tribune) sur laquelle étaient inscrits d'autres chiffres. Balloté entre les chiffres évoqués dans son intervention et ceux qui figuraient sur le bout de papier qui lui avait été transmis par des fonctionnaires de son ministère, M. Khalil a été perturbé. M. Berry, en maestro accompli des séances parlementaires, a rapidement réagi, appelant à la rescousse le Premier ministre Nagib Mikati pour prendre la relève de son grand argentier. Mais toute l’éloquence de M.Mikati n’a pas réussi à sauver la situation. Le front de l'opposition, uni pour la circonstance, a réagi et a réussi à prendre le dessus en se retirant de la séance.

Un projet de budget qui n'en est pas un    

La débâcle du budget n’était plus à démontrer davantage. Au fait, le budget présenté par le gouvernement ne comportait pas de taux de référence du dollar douanier et il était noyauté par des dépenses pilotables. En d’autres termes, il s’agissait d’un projet de budget qui n’en est pas un. Il est en violation flagrante du principe de l’unité du budget.


Sur le perron de l’hémicycle, le député Ali El-Khalil avait du mal à cacher sa mine bouleversée par le défaut de quorum et le retrait des députés de l'opposition. Il a déclaré sur ce plan : "Notre position était claire, en ce sens que nous sommes face à un budget qui n'exprime l'ambition de personne. Mais il ne faut pas que la situation échappe à tout contrôle. Tout contrôle sur les dépenses et toute réalisation d'une partie des demandes de la population vaut mieux que de rester sans budget. Le gouvernement n'a pas respecté les délais de transfert du plan de redressement et n’a pas assumé sa responsabilité constitutionnelle visant à faire approuver un budget».

Hamadé a donné le ton

Avant d’entrer dans l'hémicycle, le député et ancien ministre Marwan Hamadé a confié à la presse que certaines "forces occultes" exercent des pressions afin que le projet de budget soit voté quelles que soient les dispositions qu’il contient.

Abondant dans le même sens, le député Georges Adwan a déclaré qu’il est clair que les députés proches du pouvoir se sont entendus à l'avance sur l'approbation d'un budget, quels que soient ses effets, pour satisfaire le FMI par la fraude ou n’importe quel autre moyen. M. Adwan a expliqué qu’un ajustement des chiffres du budget a été effectué en dernière minute et que le budget a été présenté sans être associé à une clôture des comptes.

Rappelons que la loi sur les douanes et le Code de la monnaie et du crédit donnent au gouvernement et à la Banque centrale le droit de fixer son taux de change. Quant au taux de change officiel de la livre face aux devises étrangères, sa détermination demeure du ressort de la Banque centrale.
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