Sous l’impulsion de sa mère qui rêvait d’être concertiste, Glenn Gould commence le piano dès l’âge de deux ans et demi, et s’y révèle aussitôt très doué.
J’ai assisté à la première de la pièce «Glenn, naissance d’un prodige» de Ivan Calberac, au Théâtre Montparnasse & Petit Montparnasse: pur moment de grâce. Comme psychanalyste, j’ai admiré le traitement juste et subtil d’un «cas clinique» célébrissime autant qu’enseignant pour tous.
Comme amatrice de théâtre et de musique, j’ai parcouru une magnifique gamme d’émotions, sur laquelle je vous invite à vibrer à votre tour, en allant voir la pièce, ou en découvrant ma chronique:
«C’est l’histoire de Glenn Gould, l’un des pianistes les plus atypiques du XXe Siècle. Un homme qui, de façon bouleversante et géniale, fait corps avec la musique. Parce que son corps ne lui appartient pas. Il en est d’abord dépossédé par sa mère, musicienne à la carrière inaccomplie, qui se réalise à travers lui jusqu’aux limites de l’inceste. Et il en est dépossédé par une forme probable d’autisme, une psychose infantile qui empêche l’unité psychique de ce corps, le rendant comme poreux au bruit, aux autres, à un environnement toujours susceptible de l’agresser ou de l’envahir.
Cette frontière floue, mal délimitée entre lui-même et le monde, constitue aussi une porte d’entrée totale dans la musique. Son oreille absolue, détectée dès ses trois ans, fusionne avec la vibration des sons. Sa position au piano, basse, penchée à l’extrême, devenue un trait de son identité d’artiste, abolit toute séparation entre lui et l’instrument, qu’il embrasse littéralement. Sa façon simultanée de chantonner les notes, étonnamment distinctes et limpides, qu’il extrait de ses doigts, l’inclut dans son interprétation. En termes de physique quantique, nous dirions que Glenn Gould est intriqué à sa musique.
Grâce à l’intelligence de la pièce, aussi magnifiquement écrite qu’interprétée, nous sentons que, pour Glenn Gould, s’unir à l’œuvre de Bach est une attraction d’âme en forme de survie, comme s’il cherchait dans ces partitions à la métrique parfaite un cadre pour contenir un corps constamment menacé de possession externe et de dispersion propre. La psychanalyse dit alors que Bach remplit pour lui une fonction paternelle (appelée par Lacan “Nom-du-père”), venant pallier celle que son père réel n’assume pas pleinement: l’aveu par ce père de sa lâcheté passée, au terme de la pièce, en est l’un des moments poignants. Car à la fin, c’est la mère qui gagne; la mère de l’ombre, ayant pourtant contribué à la lumière du génie.
En termes de spectacle, la pièce est drôle, émouvante, profonde, riche et magistralement tempérée comme le clavecin de Bach. Aucune linéarité ni monotonie: dans l’histoire de Glenn Gloud, s’invitent aussi la Grande Histoire – celle de la seconde guerre mondiale avec la société de l’époque – et une histoire d’amour, mélodie tissée de dons et de drames, entre Glenn et sa cousine Jessie.
Pour finir sur une note quantique, liant mon émotion devant cette pièce à la passion de ma recherche actuelle (la jonction entre psychanalyse et physique de la conscience), je dirai que cette pièce est une merveille contrapuntique. Souvenons-nous: la technique du contrepoint, inégalable dans les variations Goldberg de Bach, consiste en la superposition harmonieusement organisée de lignes mélodiques distinctes. Comme la superposition d’ondes qui donne forme à nos possibles dans le Champ (“chant”) quantique.»
J’ai assisté à la première de la pièce «Glenn, naissance d’un prodige» de Ivan Calberac, au Théâtre Montparnasse & Petit Montparnasse: pur moment de grâce. Comme psychanalyste, j’ai admiré le traitement juste et subtil d’un «cas clinique» célébrissime autant qu’enseignant pour tous.
Comme amatrice de théâtre et de musique, j’ai parcouru une magnifique gamme d’émotions, sur laquelle je vous invite à vibrer à votre tour, en allant voir la pièce, ou en découvrant ma chronique:
«C’est l’histoire de Glenn Gould, l’un des pianistes les plus atypiques du XXe Siècle. Un homme qui, de façon bouleversante et géniale, fait corps avec la musique. Parce que son corps ne lui appartient pas. Il en est d’abord dépossédé par sa mère, musicienne à la carrière inaccomplie, qui se réalise à travers lui jusqu’aux limites de l’inceste. Et il en est dépossédé par une forme probable d’autisme, une psychose infantile qui empêche l’unité psychique de ce corps, le rendant comme poreux au bruit, aux autres, à un environnement toujours susceptible de l’agresser ou de l’envahir.
Cette frontière floue, mal délimitée entre lui-même et le monde, constitue aussi une porte d’entrée totale dans la musique. Son oreille absolue, détectée dès ses trois ans, fusionne avec la vibration des sons. Sa position au piano, basse, penchée à l’extrême, devenue un trait de son identité d’artiste, abolit toute séparation entre lui et l’instrument, qu’il embrasse littéralement. Sa façon simultanée de chantonner les notes, étonnamment distinctes et limpides, qu’il extrait de ses doigts, l’inclut dans son interprétation. En termes de physique quantique, nous dirions que Glenn Gould est intriqué à sa musique.
Grâce à l’intelligence de la pièce, aussi magnifiquement écrite qu’interprétée, nous sentons que, pour Glenn Gould, s’unir à l’œuvre de Bach est une attraction d’âme en forme de survie, comme s’il cherchait dans ces partitions à la métrique parfaite un cadre pour contenir un corps constamment menacé de possession externe et de dispersion propre. La psychanalyse dit alors que Bach remplit pour lui une fonction paternelle (appelée par Lacan “Nom-du-père”), venant pallier celle que son père réel n’assume pas pleinement: l’aveu par ce père de sa lâcheté passée, au terme de la pièce, en est l’un des moments poignants. Car à la fin, c’est la mère qui gagne; la mère de l’ombre, ayant pourtant contribué à la lumière du génie.
En termes de spectacle, la pièce est drôle, émouvante, profonde, riche et magistralement tempérée comme le clavecin de Bach. Aucune linéarité ni monotonie: dans l’histoire de Glenn Gloud, s’invitent aussi la Grande Histoire – celle de la seconde guerre mondiale avec la société de l’époque – et une histoire d’amour, mélodie tissée de dons et de drames, entre Glenn et sa cousine Jessie.
Pour finir sur une note quantique, liant mon émotion devant cette pièce à la passion de ma recherche actuelle (la jonction entre psychanalyse et physique de la conscience), je dirai que cette pièce est une merveille contrapuntique. Souvenons-nous: la technique du contrepoint, inégalable dans les variations Goldberg de Bach, consiste en la superposition harmonieusement organisée de lignes mélodiques distinctes. Comme la superposition d’ondes qui donne forme à nos possibles dans le Champ (“chant”) quantique.»
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