Le déni russe ira-t-il jusqu'à l'infamie ? Le 19 septembre, le Kremlin a nié la véracité de la découverte de centaines de corps près de la ville ukrainienne d'Izioum. Des "mensonges" visant à discréditer la Russie, selon Moscou.
Le Kremlin a qualifié lundi de "mensonge" la découverte de centaines de tombes dans une forêt près de la ville d'Izioum, récemment reprises par les forces ukrainiennes, dernière dénégation russe en date quant à des exactions.
Les autorités ukrainiennes ont annoncé cette macabre découverte vendredi près de cette cité de quelque 50.000 habitants avant la guerre, passée sous occupation russe d'avril à début septembre.
Plus de 440 tombes
Des journalistes de l'AFP ont vu vendredi sur place des centaines de tombes marquées d'une croix et de numéros ou de noms et de dates, ainsi qu'une fosse commune renfermant 17 corps de soldats ukrainiens, selon les médecins-légistes.
Au moins l'un des cadavres avait les mains liées avec une corde.
Selon les autorités ukrainiennes, plus de 440 tombes ont été retrouvées dans cette forêt près d'Izioum, où la police nationale a aussi dit avoir découvert, comme dans d'autres localités reprises récemment, des "salles de torture".
"C'est un mensonge. Nous allons bien sûr défendre la vérité dans cette affaire", a assuré lundi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lui évoqué samedi "de nouvelles preuves de torture" à Izioum, où "le processus d'exhumation se poursuit".
Les forces russes ont été accusées de nombreuses exactions dans les territoires qu'elles contrôlent en Ukraine, et notamment à Boutcha, en périphérie de Kiev, où avaient été retrouvés après leur départ fin mars des cadavres de civils froidement exécutés dans les rues. Moscou nie avoir commis ces crimes, évoquant une "falsification" ukrainienne.
La Russie accusée de bombarder une nouvelle centrale nucléaire
La présidence tchèque de l'UE a appelé samedi à la création d'un tribunal international spécial pour Izioum et l'ONU a dit vouloir envoyer "sous peu" une équipe.
Sur le terrain lundi, l'Ukraine a accusé l'armée russe d'avoir bombardé le site de la centrale nucléaire de Pivdennooukraïnsk, dans le sud du pays, après des semaines de tensions autour de celle de Zaporijjia, occupée par Moscou et visée par de multiples frappes.
Selon l'opérateur Energoatom, "une puissante explosion s'est produite à seulement 300 mètres des réacteurs" de cette centrale, la prêtant à une frappe nocturne d'un missile russe.
Le président Volodymyr Zelensky a une nouvelle fois assuré que la Russie mettait "en danger le monde entier" et appelé à "l'arrêter tant qu'il n'est pas trop tard".
À Donetsk, bastion des séparatistes prorusses dans l'est de l'Ukraine, 13 civils ont été tués lundi dans une frappe ukrainienne "punitive" sur une place de cette ville qui échappe au contrôle de Kiev depuis 2014, selon le maire pro-Moscou.
Volodymyr Zelensky partage une vidéo de surveillance en noir et blanc sur son compte Telegram du bombardement présumé de la centrale nucléaire de Pivdennooukraïnsk.
Les combats continuent à l'est
Dans la région voisine de Lougansk, les séparatistes ont condamné à 13 ans de prison un employé de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), accusé de "haute trahison" pour avoir fourni des "informations confidentielles" à des services de renseignement étrangers, dont la CIA.
Dans le reste de l'Ukraine, 10 civils ont été tués et 22 blessés ces dernières 24 heures, selon le bilan de la présidence ukrainienne, qui a rapporté des bombardements dans plusieurs régions le long du front et des combats essentiellement dans celle de Lougansk, dans l'est.
Dans la région de Kharkiv, au nord-est, les journalistes de l'AFP ont constaté des combats d'artillerie sur le front de Koupiansk, tandis qu'un flux régulier de civils traumatisés quittaient la ville, passée sous contrôle ukrainien.
Dans les rues de la ville, d'immenses affiches de propagande prorusse étaient encore visibles, les rues étaient elles jonchées de débris de verre, de douilles, de cartouches et de restes de rations.
"Il n'y a pas de lumière, pas d'électricité, depuis une semaine. Pas d'eau", a déclaré à l'AFP Rouslan, un ancien policier de 49 ans.
Tortures
A Koupiansk, Izioum, Balakliïa, dans l'est de l'Ukraine, des villes fraîchement reconquises par les forces ukrainiennes, des récits de détentions arbitraires et de tortures par les occupants se dévoilent.
Dans la même région, les journalistes de l'AFP ont aussi recueilli les témoignages d'Ukrainiens ayant dit avoir subi des tortures aux mains de militaires russes durant l'occupation des forces russes.
"Ils m'ont frappé les talons, le dos, les jambes et les reins", témoigne Mykhaïlo Tchindeï, 67 ans, rencontré à l'hôpital d'Izioum. Il dit avoir été détenu 12 jours dans une cellule humide et que ses geôliers lui ont cassé le bras à coup de barre de métal.
Les soldats russes l'accusaient d'avoir donné aux forces ukrainiennes les coordonnées d'une école dans laquelle ils s'étaient installés. Un bombardement ukrainien y avait tué de nombreux militaires.
Si depuis plusieurs jours l'avancée ukrainienne a ralenti, le président Zelensky a insisté dimanche soir pour dire qu'il ne s'agissait "pas d'une pause", mais de "préparer les prochaines étapes", la Russie contrôlant une grande partie du Donbass et des régions de Kherson et Zaporijjia, après avoir annexé en 2014 la péninsule ukrainienne de Crimée.
Avec AFP
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