Le plan de paix de Trump pour l’Ukraine face au risque d’une capitulation
©Ici Beyrouth

Le président américain élu, Donald Trump, prône un plan de paix pour l’Ukraine. En effet, il a promis à plusieurs reprises que l'une de ses premières actions en tant que président serait de mettre fin à la guerre en Ukraine, affirmant que ce conflit n'aurait jamais éclaté s'il avait remporté l'élection de 2020 et assurant qu'il pourrait y mettre fin en 24 heures.

Jusqu'à présent, Donald Trump a évité de donner des détails précis sur son plan de paix. Cependant, ses conseillers et alliés n’ont pas été aussi discrets.

Dans une interview, le vice-président, JD Vance, a exposé le plan de manière assez claire. Tout d’abord, un cessez-le-feu complet le long de la ligne de front actuelle qui s’étend sur environ 1.300 km. Selon Vance, ce gel des lignes de front ouvrirait la voie à la création d’une zone démilitarisée, semblable à celle qui sépare la Corée du Nord et la Corée du Sud, large de 4 km et solidement fortifiée. Cela impliquerait que l’Ukraine renonce à environ un cinquième de son territoire actuellement contrôlé par la Russie, dont la Crimée, annexée par la Russie en 2014, ainsi que près de 80% du Donetsk et du Louhansk, et environ 70% du Zaporizhzhia et de Kherson.

Le second point serait la neutralité de l’Ukraine. En d'autres termes, Trump estime que l'Ukraine ne devrait pas rejoindre l'OTAN, afin d'éviter d'entraîner l'Occident dans une troisième guerre mondiale et de ne pas perturber la sphère d'influence de la Russie. Ce plan de paix inclurait probablement des mécanismes d'application, tels que le déploiement de troupes de maintien de la paix sur le terrain.

Mais comment Trump parviendra-t-il à amener l’Ukraine et la Russie à accepter ce plan, sachant qu’aucune des deux parties n’est actuellement disposée à négocier? Trump pourrait probablement contraindre l’Ukraine à la table des négociations en menaçant de mettre fin ou de réduire de manière significative l’aide militaire. Toutefois, il est moins clair d’imaginer comment il convaincra la Russie de l'accepter. Bien que l'on puisse supposer que la Russie serait relativement satisfaite de ce plan, il ne répond pas pleinement à ses objectifs de guerre maximalistes. Si Vladimir Poutine refuse le plan de paix de Trump, il sera intéressant de voir quelle sera sa réaction. Alors que de nombreux dirigeants européens et ukrainiens craignent que Trump ne fasse davantage de concessions à Poutine, il est important de noter que, durant son premier mandat, malgré des déclarations parfois amicales, Trump n’hésitait pas à remettre Poutine à sa place. Il avait même déclaré dans une interview à Fox News qu’il augmenterait l’aide militaire à l’Ukraine afin de forcer la Russie à accepter de négocier.

Maintenant son plan de paix abordé, il convient de comprendre pourquoi Trump tient tant à mettre fin à cette guerre. D'une part, en tant qu'isolationniste déclaré, réduire ou suspendre le soutien à l'Ukraine répond aux attentes de sa base électorale: dès décembre dernier, 48% des Républicains estimaient que les États-Unis fournissaient un soutien excessif à l'Ukraine, un chiffre probablement en hausse depuis. Cependant, Trump semble également animé par une logique géostratégique plus profonde. Un rapport de l’America First Policy Institute, rédigé par deux de ses anciens chefs de la sécurité, éclaire sa vision. D’abord, l’analyse constate peu de perspectives de victoire pour l’Ukraine, compte tenu des lignes de front figées. Ensuite, un conflit prolongé pourrait renforcer l'alliance entre la Russie, la Chine, l'Iran et la Corée du Nord: un rapport de l'OTAN signale d'ailleurs que plus de 10.000 soldats nord-coréens auraient été déployés en Russie à la suite d’un accord de défense. Enfin, les États-Unis font face à des stocks de munitions bas et doivent conserver leurs ressources en vue d'un potentiel conflit avec la Chine. Une étude récente de la Rand Corporation indique que, en cas de guerre à Taïwan, les stocks de munitions américains pourraient s’épuiser en seulement 28 jours.

Cependant, une capitulation de l'Ukraine, comme semblerait le définir ce plan, serait problématique pour l'Europe et les États-Unis. Elle accroîtrait la menace russe sur l’Europe, avec un risque de tester la solidité de l’Article 5 de l’OTAN, surtout sous Trump. Elle entraînerait également une augmentation du crime organisé et du trafic d’armes, ainsi qu’une fuite massive d’Ukrainiens vers l’Europe. Une telle issue affecterait aussi la sécurité alimentaire mondiale, accentuant la migration depuis le Moyen-Orient et l'Afrique. Sur le plan géopolitique, cela favoriserait la prolifération nucléaire et réduirait l'influence de l'Occident, au profit de la Russie et de la Chine.

 

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