Le marron glacé, un luxe de Noël toujours plus raffiné et plébiscité
Une employée emballe un marron glacé dans l'usine Clement Faugier, à Privas, dans le centre-est de la France, le 18 décembre 2024. ©AFP

Confiserie délicate et très chère, aux techniques de fabrication inchangées depuis le XIXe siècle, le marron glacé, luxe des tables de Noël, ne cesse de se raffiner et de séduire.

En apparence, c'est une cave ordinaire. Mais sur les claies, pas de Bordeaux ni de Bourgogne : enveloppés dans des papiers dorés ou argentés, 'Piémont', 'Ardèche', 'Campanie' sont les grands crus de marrons glacés de la boutique Maison Boissier, dans le XVIe arrondissement de Paris.

Une employée emballe un marron glacé à l'usine Clement Faugier, à Privas, dans le centre-est de la France, le 18 décembre 2024 ©JEFF PACHOUD / AFP

"Ils y sont conservés à 5 degrés et 'l'humidité entretient le goût du marron', évitant que le sucre ne devienne 'rigide' et n'assèche le fruit, explique à l'AFP Sylvie Douce, qui a relancé la maison fondée en 1827, tombée en désuétude, et qui compte aujourd'hui des boutiques partout dans le monde.

La cave est une idée de François Jeantet, son mari, pour innover et réinventer le marron glacé (qui est en fait une châtaigne), une douceur pluricentenaire qui s'écoule, chez Boissier, à plus d'une tonne chaque année, à un prix variant entre 4 et 6 euros pièce.

À l'intérieur, on trouve notamment les "marrons de Noël", des produits spéciaux, moins sucrés, à la robe mordorée et brillante, avec un goût de châtaigne très prononcé.

Et n'allez pas confondre un Ardéchois avec un Piémontais : le premier présente un 'goût plus expressif', tandis que le second a l'avantage d'être plus abondant.

Le couple voyage partout en Europe à la recherche de nouveaux "crus" de marrons, qui seront ensuite transformés par un artisan corse selon la technique de glaçage développée par le fondateur de la marque, Bélisaire Boissier, au XIXe siècle.

Si les Italiens revendiquent aussi la paternité de la douceur, en France, c'est dans le livre du cuisinier de Louis XIV, Pierre François La Varenne, Le Parfaict Confiturier (1667), qu'on trouve la première recette. À l'époque, le marron était simplement confit, sans glaçage ajouté.

"Sculpture"

Chez Clément Faugier, autre grande maison de production de marrons glacés et de la célèbre crème de marrons, les ouvriers et ouvrières fabriquent entre 1 000 et 2 000 kilos de marrons d'Ardèche AOP glacés chaque jour en période de Noël, dont 90 % sont vendus pendant les fêtes. Ils répètent, dans un silence quasi religieux, les mêmes gestes depuis 1882.

Le marron est pelé minutieusement à la main pour préserver son intégrité. "C'est pour cela que c'est très cher", explique Jean-David Boiron, à la tête de l'entreprise familiale de 70 salariés depuis 2003. "Rien que le fait de le peler fait grimper le prix : un kilo de marrons se vend entre 10 et 20 euros, c'est colossal", ajoute-t-il, précisant qu'après la transformation complète, le prix peut atteindre entre 80 et 120 euros le kilo.

Les marrons sont ensuite enveloppés délicatement dans du tulle de coton, puis cuits à l'eau, à cœur. "C'est l'opération la plus importante, car une mauvaise cuisson donnerait un mauvais confisage", poursuit M. Boiron.

Lors du confisage, qui dure 4 à 5 jours, l'eau s'évapore lentement pour céder la place au sucre. La châtaigne est ensuite glacée avec le moins de sucre possible, afin de préserver toute la saveur du produit.

"Chaque marron est unique, c'est comme une sculpture", s'enthousiasme M. Boiron.

Un employé prépare le glaçage des marrons à l'usine Clement Faugier, à Privas, dans le centre-est de la France, le 18 décembre 2024©JEFF PACHOUD / AFP

"Plaisir" 

"Si, sous le sapin, vous n'avez pas une boîte de marrons glacés, il manque quelque chose", avance-t-il.

Malgré le prix et l'inflation, les ventes de Clément Faugier restent excellentes en 2024, après une année "exceptionnelle" en 2021 et les célébrations des 140 ans de la marque en 2022.

Quant aux deux boutiques de la Maison Boissier, elles ont réalisé un chiffre d'affaires de 10 000 euros par jour en début de semaine, toutes confiseries confondues.

"C'est un luxe accessible", estime Sylvie Douce, présidente de l'entreprise, notant que ces douceurs attirent également une clientèle jeune et avertie. "Les gens les achètent comme petit plaisir", souvent à l'unité. "C'est chaleureux, comme le chocolat."

Et comme le disait Victor Hugo, "on prend les forts par les bombes, et les faibles par les bonbons."

Par Clara GUILLARD, AFP 

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