
"Le monde est confronté à ses plus grands défis": Emmanuel Macron va s'adresser mercredi aux Français à la veille d'un sommet européen crucial et dans un moment de bascule géopolitique autour d'un rapprochement entre Washington et Moscou, potentiellement aux dépens de l'Europe et de l'Ukraine.
"Mes chers compatriotes, dans ce moment de grande incertitude où le monde est confronté à ses plus grands défis, je m'adresserai à vous ce soir à 20H", a écrit le chef de l'État sur le réseau X pour annoncer son allocution télévisée.
L'Europe "est aujourd'hui à un tournant de son Histoire: depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, jamais notre continent n'avait connu une situation aussi grave et aussi instable", a renchéri la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, à l'issue du Conseil des ministres.
Elle a assuré qu'il n'était "de l'intérêt de personne" de "rompre les relations avec les États-Unis", malgré l'accélération née de la détermination du président américain Donald Trump de mettre fin à tout prix à la guerre en Ukraine, en négociant directement avec son homologue russe Vladimir Poutine, plus de trois ans après le début de l'invasion par la Russie de son voisin.
Dans son discours, Emmanuel Macron pourra annoncer les "prochaines étapes" d'un processus diplomatique très incertain, a précisé un proche du président.
"On sent une angoisse très forte chez les Français", a-t-il ajouté, évoquant un nombre de courriers sur le sujet reçus par l'Élysée "multiplié par quinze" ces dernières semaines. "Le président parle pour y répondre, et transformer ces angoisses en volonté d'agir et d'avancer."
Orban à l'Élysée
Selon l'entourage présidentiel, ce moment de "bascule de l'Histoire peut être aussi l'occasion de cristalliser ce qu'on n'a pas réussi à faire ces dernières années", à savoir renforcer massivement la défense européenne pour rendre le Vieux Continent plus autonome par rapport aux États-Unis.
Ce sera le sujet d'un sommet extraordinaire de l'Union européenne jeudi à Bruxelles.
Juste après son allocution, Emmanuel Macron va d'ailleurs recevoir à dîner le Premier ministre hongrois Viktor Orban, soutien de Donald Trump et de Vladimir Poutine, et l'une des voix les plus dissonantes dans l'UE.
Mardi soir, le président français avait salué la volonté de son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky "de réengager le dialogue avec les États-Unis", après l'altercation spectaculaire que ce dernier avait eu vendredi dans le Bureau ovale avec Donald Trump. Depuis, le président américain a annoncé lundi le gel de l'aide militaire de Washington à Kiev, vitale pour tenir tête à l'armée russe.
Emmanuel Macron, qui s'est entretenu avec les deux hommes après cette nouvelle annonce fracassante, a aussi redit mardi "la détermination de la France à travailler avec toutes les parties prenantes à la mise en œuvre d'une paix solide et durable en Ukraine".
Mardi soir, le locataire de la Maison Blanche a déclaré, dans un discours devant le Congrès américain, avoir reçu une lettre de Volodymyr Zelensky faisant amende honorable et manifestant sa volonté de négocier "dès que possible" une "paix durable" avec la Russie.
Le dirigeant ukrainien avait exprimé cette intention quelques heures avant sur X, esquissant ce que pourraient être, à ses yeux, les "premières étapes pour mettre fin à la guerre". Il a notamment proposé de commencer par une "trêve dans les airs" et "en mer", reprenant de fait une option mise sur la table ce week-end par Emmanuel Macron.
Le président français se veut à la manœuvre, avec le Premier ministre britannique Keir Starmer, pour organiser l'unité des Européens et tenter de maintenir le dialogue transatlantique. Un déplacement d'Emmanuel Macron avec Keir Starmer pour accompagner Volodymyr Zelensky à Washington est "envisagé (...) à court terme", selon Sophie Primas.
Ces derniers temps, le chef de l'État est revenu en première ligne, pour la première fois depuis la dissolution de l'Assemblée nationale, et prend régulièrement la parole sur le dossier ukrainien.
"Emmanuel Macron prend vraiment les Français pour des imbéciles! Il va nous rejouer le sketch comme le Covid, comme quand l'Ukraine a été envahie par Poutine, c'est-à-dire de dramatiser à tel point qu'il faudra en oublier le reste", a déploré le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu sur Sud Radio, au sujet de l'allocution solennelle du président de la République.
Par Francesco FONTEMAGGI, AFP
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