
Les Vingt-Sept pays de l'UE et Volodymyr Zelensky se retrouvent jeudi pour un sommet extraordinaire sur l'Ukraine, destiné à rassurer ce pays et à muscler la défense européenne après l'altercation spectaculaire entre Donald Trump et le président ukrainien.
Parmi les priorités de cette réunion convoquée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen: la question du renforcement de la défense européenne face à la menace russe et à celle du désengagement américain.
"L'Europe fait face à un danger clair et immédiat d'une ampleur qu'aucun d'entre nous n'a connue dans sa vie d'adulte", a affirmé Mme von der Leyen, dans une lettre adressée aux dirigeants des 27.
Le futur chancelier allemand Friedrich Merz a de son côté estimé que le Vieux continent devait se préparer "au pire scénario" d'une Otan dépourvue de la garantie de sécurité américaine.
Selon le président français Emmanuel Macron mercredi soir, "des financements communs massifs seront décidés pour acheter et produire sur le sol européen des munitions, des chars, des armes, des équipements parmi les plus innovants".
En outre, "les Etats membres pourront accroître leurs dépenses militaires sans que cela soit pris en compte dans leur déficit", une mesure réclamée notamment par Paris et Berlin.
M. Macron a également dit vouloir "ouvrir le débat stratégique" sur la protection de l'Europe par le parapluie nucléaire français, tout en soulignant qu'en tous les cas la décision d'une éventuelle frappe "restera entre les mains du président"français.
Première étape
Dans un contexte géopolitique totalement chamboulé par les prises de position du président américain, la Commission européenne a dévoilé un plan pour "réarmer l'Europe" visant à mobiliser quelque 800 milliards d'euros.
Une "première étape" qui devrait recueillir l'accord de principe des 27 jeudi, selon des diplomates à Bruxelles.
A ce stade, quelque 30 milliards d'euros seront disponibles pour l'Ukraine en 2025, et plusieurs pays de l'UE ne voient pas la nécessité, dans l'immédiat, d'augmenter ce montant.
Washington, qui s'est ouvertement rapproché du Kremlin depuis une conversation téléphonique entre M. Trump et son homologue russe Vladimir Poutine le 12 février, a gelé lundi son aide militaire à l'Ukraine.
Ce gel, qui selon les experts compromet à terme la capacité de Kiev à se défendre face à l'agression russe, concerne aussi le partage de renseignement, a fait savoir mercredi le chef de la CIA John Ratcliffe, un élément pourtant essentiel aux soldats ukrainiens sur le champ de bataille.
"Nous suspendons et passons en revue tous les aspects" des relations avec l'Ukraine, a déclaré le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Mike Waltz.
L'Ukraine, qui a multiplié les gestes d'apaisement après l'épisode du Bureau ovale de vendredi, où M. Trump avait menacé de "laisser tomber" l'Ukraine, a indiqué mercredi travailler à de nouveaux pourparlers avec les Etats-Unis.
Le chef de la présidence ukrainienne Andriï Iermak a ainsi indiqué avoir discuté au téléphone mercredi avec M. Waltz. Les deux hommes ont convenu que leurs équipes se rencontreraient dans un avenir proche, selon Kiev.
Menace hongroise
Le chef de l'Etat ukrainien demande de solides garanties de sécurité à ses alliés occidentaux dans le cadre de potentiels pourparlers afin de s'assurer que l'armée russe n'envahisse pas à nouveau son pays après une hypothétique cessation des hostilités.
"Nous voulons tous un avenir sûr pour notre peuple. Pas un cessez-le-feu provisoire mais la fin de la guerre une fois pour toutes. Avec nos efforts coordonnés et le leadership des Etats-Unis, c'est tout à fait réalisable", a-t-il écrit mercredi sur les réseaux sociaux.
Mardi, le président ukrainien avait proposé une trêve avec la Russie dans les airs et en mer pour entamer des discussions sur une "paix durable" sous "le leadership" de Donald Trump.
Il s'est aussi dit disposé à signer un accord-cadre sur l'exploitation des ressources naturelles en Ukraine avec les Etats-Unis, ce que le président américain réclame.
Ce dernier a pour sa part semblé rouvrir la porte au dialogue le même jour dans un discours devant le Congrès, se satisfaisant d'avoir reçu l'assurance de Volodymyr Zelensky qu'il était prêt à discuter d'une "paix durable" avec la Russie.
Dans une allocution télévisée mercredi soir, M. Macron a averti que "la menace russe est là et touche les pays d'Europe".
Il a souligné que Moscou avait "déjà fait du conflit ukrainien un conflit mondial", et tentait "de manipuler nos opinions avec des mensonges diffusés sur les réseaux sociaux".
Selon lui, "cette agressivité ne semble pas connaître de frontières" et dans ce contexte, "rester spectateur serait une folie".
Cette position ne fait toutefois pas l'unanimité parmi les Vingt-Sept:le dirigeant hongrois nationaliste Viktor Orban, soutien de Donald Trump et de Vladimir Poutine a menacé de bloquer le sommet de jeudi. Il a été reçu à dîner mercredi soir par M. Macron.
En Ukraine, quatre personnes ont été tuées dans des frappes russes dans la nuit de mercredi à jeudi, trois dans un tir de missile sur un hôtel de Kryvyï Rig (centre), où 14 blessés sont dans un état critique, et une troisième dans une attaque de drone sur un entrepôt de Soumy (nord), selon les autorités locales.
Avec AFP
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