
Alors que les chrétiens du monde entier contemplent en cette période de Carême le mystère de la mort et de la résurrection du Christ, le théologien Alberto Fabio Ambrosio met la lumière sur une autre dimension théologique importante: la nudité de Jésus.
Tout commence en Italie avec les chefs-d’œuvre de la Renaissance. Le dominicain Alberto Fabio Ambrosio part à la découverte de trois sculptures de Michel-Ange qui dépeignent un Christ nu. Il est interpellé sur cette manière-là d’illustrer Jésus. Au-delà de l’aspect esthétique que cela peut représenter, il existe toute une dimension spirituelle dans laquelle le dominicain se plonge dans son ouvrage, Le Christ nu et cru, paru aux éditions Desclée de Brouwer (DDB) en mars 2025.
Si dans beaucoup d’autres œuvres, on illustre le Christ en croix vêtu d’un pagne pour couvrir ses parties intimes, certains artistes, eux, préfèrent une figure plus vraie et optent pour la nudité.
L’hypothèse la plus intéressante d’un point de vue théologique est celle de la présence du pagne, également appelé périzonium. Jésus, vrai Dieu et vrai homme, verbe de Dieu sur terre, est voilé dans sa vérité. Sa nature humaine et divine reste cachée dans le mystère de ce pagne, une relique chargée de sens que l’on peut voir à Aix-la-Chapelle.
Au moment du péché originel, l’homme a découvert sa nudité et a rapidement caché ses parties intimes par pudeur, en utilisant une feuille de figuier et, plus tard, en développant toute une série de tenues vestimentaires. Le Christ, exempt du péché originel, n’avait pas besoin d’observer la même pudeur que celle de l’humanité déchue. Cependant, étant aussi humain que ses contemporains, il ne pouvait que se soumettre à la norme de la société. Ce pagne probablement porté le jour de la crucifixion est une kénose (dépouillement de Dieu de sa divinité) et surtout une forme d’ultime humilité de Jésus.
Même lorsque l’Écriture est en train de s’accomplir, le Christ Rédempteur est soumis à cette pudeur, née du péché originel. Lui, vraiment Dieu, doit encore se soumettre et obéir jusqu’à sa mort. Une énième humiliation après son jugement par les hommes, son chemin de croix et son dépouillement de tout vêtement. Jésus aurait très bien pu manifester sa nature divine à travers la nudité. Car, selon le dominicain, la toute nudité du Christ (sa vérité totale) est une manifestation de la toute-puissance de Dieu.
Le nu est donc un objet théologique à explorer sans tabous et sans pudeur. Lorsque l’apôtre Paul appelle à revêtir le Christ, il appelle à revenir à une certaine forme de nudité, celle de l’homme nouveau, équivalente à la nature humaine d’avant le péché originel.
Dans son ouvrage, Alberto Fabio Ambrosio explore magnifiquement, et sans se couvrir, les dimensions de la question de la nudité de Jésus. En procédant à une analyse des paradoxes, il offre une réflexion fascinante sur la question du vêtement dans la Bible et répond également aux questions du XXIᵉ siècle, ère à laquelle le privé devient public avec la montée du virus de la pornographie et les débats autour du vêtement décent et de la mode.
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