
Les marchés mondiaux naviguent dans un océan d'incertitudes vendredi au terme d'une semaine de montages russes, à mesure que les États-Unis et la Chine s'enfoncent dans une guerre commerciale provoquant une perte de confiance dans les actifs américains.
Dernier épisode en date: la Chine a annoncé vendredi qu'elle porterait ses droits de douane supplémentaires sur les produits américains à 125%, en réaction aux surtaxes monumentales de 145% imposées par la Maison-Blanche cette semaine sur les importations venant de la Chine, quand les autres partenaires commerciaux bénéficient d'un gel pour 90 jours des droits de douane supplémentaires américains.
"Les investisseurs ont à nouveau eu à affronter une semaine de volatilité", à savoir d'importantes variations du jour au lendemain, dans un sens comme dans l'autre au gré des offensives protectionnistes de la Maison-Blanche et des mesures de rétorsion, relève Florian Ielpo, responsable de la recherche macroéconomique pour Lombard Odier IM.
La Bourse de Paris a terminé vendredi en petite baisse de 0,30%, Francfort de 0,92%, Milan de 0,73%. Seule Londres termine en terrain positif (+0,64).
Sur la semaine, les pertes sont finalement limitées: l'indice paneuropéen Stoxx Europe 600, qui réunit les 600 plus grosses capitalisations boursières du Vieux continent, a perdu près de 2%.
A Wall Street, vers 15H45 GMT, le Dow Jones glissait de 0,07%, l'indice Nasdaq gagnait 0,20% et l'indice élargi S&P 500 0,02%. Sur la semaine, ils restent toutefois en hausse.
"L'incertitude demeure et le manque de tendance sur la semaine en est la meilleure expression", souligne Florian Ielpo.
Un phénomène ressort: "la perspective d'une incertitude économique prolongée oblige les investisseurs à réévaluer la sécurité autrefois fiable des actifs américains", commente Fawad Razaqzada, analyste de City Index.
La même incertitude pèse sur les consommateurs américains, dont la confiance a reculé fortement en avril pour le quatrième mois d'affilée: les sondés du dernier baromètre publié vendredi redoutent une inflation massive, une dégradation de l'activité économique et une hausse du chômage.
Le roi dollar tombe
Premier perdant du bal de taxes punitives et volte-face de Donald Trump: "le dollar américain a pris un coup", souligne l'analyste.
Il a atteint vendredi un plus bas niveau en trois ans face à l'euro. Longtemps considéré comme un actif de confiance, le billet vert a perdu environ 5% par rapport à la monnaie unique depuis le début du mois.
Vers 15H45 GMT, le dollar dévissait de 1,29% face à la devise européenne à 1,1349 dollar pour un euro.
Le billet vert sert habituellement de "baromètre de l'anxiété du marché", explique M. Razaqzada, mais il souffre actuellement du manque de crédibilité et de la perte de confiance des investisseurs dans l'économie américaine.
"Actuellement, on peut avoir l'impression que les États-Unis ne savent plus ce qu'ils font", explique Andreas Lipkow, analyste indépendant.
Fuite des actifs américains
Le marché de la dette américaine est aussi délaissé, ce qui provoque une flambée du rendement des bons du Trésor. Le rendement de l'obligation à dix ans américaine, référence, atteignait vers 15H45 GMT 4,53%, contre 4,43% jeudi à la clôture, peu après après avoir poussé jusqu'à un plus haut depuis février.
Un contraste flagrant avec le début du mois, lorsque le taux à 10 ans avait touché un plus bas depuis octobre, à 3,88%.
Cette enflammée est d'autant plus surprenante que "les obligations d'État américaines, normalement considérées comme l'un des investissements les plus sûrs, devrait bénéficier (des périodes) de turbulences", relève Ole Hansen, analyste de Saxo Bank.
"Le message était clair: la vente massive d'actifs à risque a poussé la Maison-Blanche à assouplir sa position, au moins temporairement", poursuit-il.
"Je surveillais le marché des obligations", a lui-même reconnu le président américain mercredi, ajoutant avoir constaté que ses surtaxes douanières "effrayaient un peu" les investisseurs.
L'or, dernière valeur refuge
"La flambée désordonnée des rendements des bons du Trésor américain à long terme", parallèle à la baisse des marchés boursiers mondiaux, a laissé "les investisseurs sans options sûres", hormis quelques devises comme le franc suisse et le yen, mais surtout "l'or", souligne M. Hansen.
Le métal précieux s'est hissé vendredi à un nouveau record historique, à plus de 3.244 dollars l'once.
Vers 15H45 GMT, il évoluait à 3.235,50 dollars l'once, plébiscité pour ses performances de réserve de valeur.
Le pétrole chute sur la semaine
Le pétrole, stable vendredi, souffre aussi de la guerre commerciale entre les deux plus grandes puissances économiques. En une semaine, les deux références mondiales du brut ont dégringolé d'environ 15%.
Le Brent de la mer du Nord, référence européenne, se stabilisait finalement à 63,44 dollars le baril, et son équivalent américain, le WTI, à 60,23 dollars le baril vers 16H45 GMT.
Avec AFP
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