Le nom de règne, un choix symbolique pour le nouveau pape
Des cardinaux se tiennent à un balcon tandis que l'Argentin Jorge Bergoglio (absent sur la photo), pape François Ier élu, apparaît à la fenêtre du balcon de la basilique Saint-Pierre, près d'une statue de saint Pierre, après avoir été élu 266e pape de l'Église catholique romaine le 13 mars 2013 au Vatican. ©SOLARO et Andreas SOLARO / AFP

De Pie à Clément en passant par Hilarius et Simplicius, les noms des papes à travers les siècles reflètent l'histoire millénaire de la papauté, dont la tradition veut que l'élu issu du conclave choisisse un nom de règne.

Les cardinaux réunis en conclave pour élire le successeur de François devront réfléchir rapidement au nom qu'ils choisiront s'ils sont élus, par admiration pour un pape précédent, la volonté de marquer une continuité ou au contraire une rupture.

Très peu de temps passe en effet entre l'élection du nouveau pape et sa présentation aux fidèles depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre au Vatican.

Lui-même jésuite, Jorge Bergoglio créa la surprise 2013 en étant le premier à choisir François, le défenseur des pauvres au XIIIème siècle, alors que les bookmakers avaient parié sur Léon.

Un choix annonçant tout un programme, puisque le saint italien d'Assise fit accomplir au christianisme une mutation décisive et fut rapidement surnommé l'Alter Christus, « l'Autre Christ », après sa mort en 1226.

Aux origines de la papauté, la tradition de changer de nom fut adoptée pour une raison fort prosaïque : lors de son élection en 533, Mercure fut le premier à abandonner le sien, celui du dieu romain (et surtout païen) du commerce, pour celui plus approprié de Jean, l'un des apôtres du Christ.

Il avait alors argué que si Jésus avait changé le nom de Simon - le premier pape - pour Pierre, d'autres papes pouvaient faire de même.

Depuis, la tradition veut que le doyen du Collège des cardinaux demande en latin au pape nouvellement élu : « De quel nom voulez-vous être appelé ? » Le nom du nouveau pape est ensuite proclamé à la foule par le cardinal protodiacre depuis le balcon central de la basilique Saint-Pierre, toujours en latin.

Seule exception : au XVIe siècle, Adrien VI conserva son nom de baptême.

Pas de Pierre II 

Dans l'histoire contemporaine, une raison invoquée pour justifier le choix d'un nom est une référence à un prédécesseur envers lequel le nouvel élu entend exprimer sa gratitude, sa filiation morale ou intellectuelle.

Cela peut « être aussi le premier signe qu'un nouveau pape donne sur la marque qu'il entend donner à son pontificat », selon qu'il prend le nom d'un pape conservateur ou progressiste, explique le vaticaniste John Allen dans un livre sur les conclaves.

L'Allemand Joseph Ratzinger, pape de 2005 à 2013, expliqua avoir choisi de s'appeler Benoît XVI « en référence à Benoît XV, qui a guidé l'Eglise dans la période difficile de la Première Guerre mondiale ».

Saint Benoît, patron de l'Europe, est également le fondateur de l'ordre des Bénédictins : « Le nom de Benoît évoque aussi le père du monachisme occidental, co-patron de l'Europe, particulièrement vénéré dans mon pays et surtout en Bavière », avait-il expliqué.

Quant à Jean-Paul II, pape de 1978 à 2005, il avait expliqué vouloir s'inscrire symboliquement dans la lignée de son prédécesseur Jean Paul Ier, mort soudainement 33 jours seulement après son élection.

« J'ai voulu porter les mêmes noms qu'avait choisis mon très aimé prédécesseur », avait simplement dit le pape polonais, alors qu'un tel double nom était sans précédent dans l'histoire de la papauté.

« Souvent, avertit toutefois John Allen, les papes choisissent un nom parce qu'ils veulent honorer un membre de leur famille ou un saint, aussi est-il important de ne pas surinterpréter » ce choix.

Etrangement, aucun souverain pontife n'a choisi le nom de Pierre II, par respect pour le premier pape, mais aussi peut-être parce que selon une prophétie l'avènement du second Pierre conduira à la destruction de Rome et déclenchera l'Apocalypse.

Formose n'est pas non plus très coté, car l'unique pape à avoir porté son nom fut exhumé au IXe siècle par son successeur qui le détestait, Stéphane VII, et jugé pour avoir occupé illégalement le trône de saint Pierre. Condamné, ses doigts qui donnaient la bénédiction furent tranchés et son corps jeté dans le Tibre.

Certains noms ont une connotation négative en raison de la personnalité du pape à l'avoir porté : Pie XII, critiqué pour son silence durant l'Holocauste, Grégoire VII, élu en 1073 et accusé de nécromancie, ou encore Alexandre VI, un Borgia célèbre pour sa débauche.

Dans l'histoire millénaire de la papauté, le nom le plus utilisé est Jean, suivi de Benoît, Grégoire, Clément, Innocent, Léon et Pie.

Par Ella IDE/AFP

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